COMMENT SE FAIRE PAYER SES FACTURES - La Semaine Vétérinaire n° 1843 du 28/02/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1843 du 28/02/2020

CLIENTÈLE

ENTREPRISE

Auteur(s) : FRANÇOISE SIGOT

Le recouvrement de créances est toujours délicat pour un chef d’entreprise. Faire rentrer l’argent est pourtant indispensable pour assurer la pérennité de la clinique. Quelques pistes pour mettre en place une organisation efficace.

Manque de temps, négligence, les raisons qui conduisent à ne pas réclamer le paiement d’une facture sont nombreuses. D’autant plus si les montants en jeu sont peu conséquents. Mais mises bout à bout, les petites sommes impayées impactent fortement la trésorerie et le développement d’une entreprise, jusqu’à compromettre sa pérennité parfois. Car les additions sont au final très importantes. Ainsi, selon la Fédération nationale de l’information d’entreprise, de la gestion des créances et de l’enquête civile (Figec), chaque année, les entreprises françaises perdraient de l’ordre de 56 milliards d’euros à cause des impayés. De quoi expliquer un bon quart des défaillances d’entreprises. Avant d’en arriver là, quelques garde-fous peuvent être mis en œuvre assez facilement et, s’ils ne suffisent pas, il ne faut parfois pas hésiter à actionner la justice.

Un fichier clients tenu à jour

Le recouvrement de créances est avant tout un domaine où toute perte de temps joue contre son camp, c’est pourquoi il faut être en mesure d’agir vite. Pour cela, connaître ses clients est essentiel. « Il faut toujours avoir un fichier clients parfaitement à jour. Cela impose de chercher à prendre le maximum d’informations : nom, téléphone, situation de famille, adresse. Ainsi, si un incident de paiement survient, il sera plus facile de contacter le client avec succès », indique Ghada Fakha, cogérante du cabinet Bureau central de recouvrement, qui constate que nombre de dossiers d’impayés ne trouvent pas de solutions parce que les créanciers ne parviennent pas à contacter leurs débiteurs. « Il est possible de faire appel à un enquêteur qui recherchera l’adresse du débiteur, mais cela génère des frais importants », explique Ghada Fakha. Par ailleurs, pour les actes onéreux, il est impératif de faire signer un devis au client et, mieux encore, une reconnaissance de dette. « Cette dernière permet d’agir plus efficacement en cas de procédure judiciaire », observe la cogérante de BCR.

Pas de relances inutiles

Une autre arme utile est la gestion scrupuleuse de son poste clients. Ainsi, les relances pourront être faites rapidement en cas de non-paiement, par téléphone d’abord puis par courrier. Il est d’ailleurs judicieux de ne pas attendre la limite de l’échéance pour relancer mais de la devancer de quelques jours. Fort d’un fichier clients bien à jour, l’appel téléphonique et le courrier ont plus de chance de porter leurs fruits. « Il est inutile d’envoyer un premier courrier exigeant simplement le paiement, puis un deuxième le relançant, puis un troisième pour préciser les sanctions. Cela permet juste au débiteur de gagner du temps. Un seul courrier détaillant le montant dû, les conditions de paiement et les sanctions qui seront appliquées en cas de non-paiement suffit », estime la spécialiste du recouvrement de créances. Un “dosage” est toutefois de mise entre les clients réguliers et les occasionnels. Un premier courrier indiquant que l’on constate un retard de paiement est à privilégier pour un client que l’on connaît, alors qu’avec celui qui se révèle mauvais payeur dès le début mieux vaut être ferme. Une relance téléphonique quelques jours plus tard est tout de même conseillée, mais il ne s’agit pas de perdre du temps à relancer indéfiniment.

Faire appel à un spécialiste

Ceux qui ne sont pas à l’aise avec de telles procédures peuvent opter pour le recours à un cabinet de recouvrement. Ce dernier se chargera d’actionner tous les moyens nécessaires pour contraindre le mauvais payeur. Cela a un coût. Certains cabinets se rémunèrent en prélevant un pourcentage sur les sommes recouvrées, d’autres appliquant des forfaits, d’autres encore un mix. Comme dans beaucoup de domaines, le recouvrement n’échappe pas à la tendance digitale. De plus en plus de start-up proposent ainsi des services de recouvrement digital. Reste une règle immuable : « Plus la facture est ancienne, plus il sera difficile de faire aboutir la procédure, le temps est l’ennemi du recouvrement », prévient Ghada Fakha. L’affacturage qui vise à obtenir un paiement anticipé et à sous-traiter le recouvrement à un établissement de crédit spécialisé peut aussi être actionné. Il s’agit alors de recouvrer une créance auprès d’un professionnel et non d’un client particulier avec de très grosses sommes en jeu, car l’affacturage est onéreux.

Saisir la justice

Si aucune solution n’aboutit, l’ultime étape est celle de l’action en justice. La patience est là encore de mise. Le créancier peut saisir le tribunal d’instance qui rendra une décision. Celle-ci est d’ailleurs souvent favorable. « Une facture impayée et, mieux encore, une reconnaissance de dette sont des preuves que reconnaissent généralement les tribunaux », note la spécialiste du recouvrement. Mais un jugement favorable, autrement dit une injonction de payer, ne va pas toujours de pair avec le recouvrement. Une fois le jugement rendu, le débiteur dispose en effet d’un mois pour contester la décision. S’ensuit alors une convocation des deux parties devant le tribunal. Par ailleurs, il appartient au créancier de transmettre l’ordonnance d’injonction de payer au débiteur par huissier de justice, à ses frais, au moyen d’une copie certifiée conforme de la requête et de l’ordonnance. L’ordonnance est, en effet, annulée si ce n’est pas fait dans les six mois.

Se faire payer s’apparente parfois au parcours du combattant. Pour limiter les risques d’impayés, le règlement immédiat en liquide ou par carte bancaire reste encore le moyen le plus sûr. À condition toutefois que le client ait un moyen de paiement sur lui. Si tel n’est pas le cas, mieux vaut lui conserver un document officiel (permis de conduire ou carte d’identité, par exemple), le temps qu’il revienne avec une carte bleue ou quelques billets pour honorer sa facture.

RETOUR D’EXPÉRIENCE
PAULINE VACHERAND (L 14)
Clinique des Aravis à Thônes, en Haute-Savoie (3 associées, 2 ASV)

En deux ans d’exercice, nous n’avons jamais eu de chèque en bois, nous conservons ainsi ce mode de paiement qui présente l’avantage de permettre les paiements en plusieurs fois ou différés pour les clients en difficulté financière. Lors d’intervention chirurgicale ou d’hospitalisation, nous avons pris l’habitude de donner un devis oral à titre informatif mais sans signature pour l’instant. Lorsque le propriétaire n’est pas en mesure de payer en fin de consultation sans nous l’avoir averti au préalable, nous conservons les médicaments le temps d’obtenir le paiement, et nous procédons de la même façon pour la récupération des cendres lors du choix d’incinération individuelle, car ces deux derniers cas restent notre principale source d’impayés à ce jour.