LES NOUVEAUTÉS DU CONGRÈS DE L’AAFP - La Semaine Vétérinaire n° 1851 du 24/04/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1851 du 24/04/2020

MÉDECINE FÉLINE

PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC

Auteur(s) : ANNE-CLAIRE GAGNON

Qu’il s’agisse d’utilisation raisonnée des anti-inflammatoires non stéroïdiens ou de médecine prédictive, le congrès annuel de l’American Association of Feline Practitioners est l’occasion de discuter de l’avenir de la médecine féline.

Avec 1 387 congressistes, le congrès mondial de médecine féline, qui s’est tenu début novembre à San Francisco (États-Unis) sur le thème de la gestion des maladies complexes, a affiché la plus grande affluence jamais enregistrée par l’Association des praticiens félins américains (American Association of Feline Practitioners, AAFP).

Les anti-inflammatoires, pas obligatoires

Parmi les tendances pharmacologiques du moment, un appel unanime à la modération sur l’usage des anti-inflammatoires a été lancé. Après “Les antibiotiques, c’est pas automatique”, les anti-inflammatoires ne sont “plus obligatoires”, même si l’innocuité sur le long terme de certains AINS est de mieux en mieux connue. Dawn Boothe (université d’Auburn, États-Unis) a souligné qu’avec les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), comme avec les opioïdes, la capacité de l’organisme à se soigner lui-même est modifiée et que, par ailleurs, tous les chats sur la planète n’ont pas exactement le même génome, par conséquent des modifications enzymatiques peuvent donner des réactions inattendues à certains médicaments. Pour elle, les anti-COX2 sont les AINS qui se rapprochent le plus des régulateurs naturels, pour autant que les doses d’administration soient respectées, voire diminuées. Compte tenu de la sensibilité accrue des chats aux effets secondaires rénaux et gastro-intestinaux des AINS, Dawn Boothe recommande la prescription concomitante d’hépatoprotecteurs comme la S-adénosylméthionine (SAMe) ou la n-acétylcystéine.

Gabapentine, une mode ou un nouvel antalgique ?

L’approche holistique en matière de traitement de la douleur chronique est de mise, en faisant appel à l’acupuncture, à la physiothérapie, au laser, au dispositif Assisi Loop (champs éléctromagnétiques pulsés), etc. Reste que la nature humaine aime bien avoir une solution pour un problème et que la gabapentine connaît un succès d’utilisation croissant pour la prise en charge de la douleur chronique, notamment sur les chats âgés ou pour la prévention du stress et des agressions d’un animal lors d’une consultation. Un certain nombre de praticiens félins s’interrogent cependant, au vu des dernières publications, sur l’effet gabapentine, qui empêcherait seulement l’expression des manifestations d’humeur du chat (une sorte de camisole chimique) sans véritablement l’apaiser (les indicateurs biochimiques du stress ne sont pas modifiés par la molécule en une prise avant la consultation). Par ailleurs, le frunevetmab, un anticorps monoclonal antifacteur de croissance nerveuse (NGF) félin, aux résultats antalgiques prometteurs, surtout lors d’arthrose, est attendu prochainement aux États-Unis.

Mieux prendre en charge le chat âgé

Pourra-t-on, demain, grâce à l’intelligence artificielle, améliorer la médecine gériatrique préventive ? C’est le pari fait par Mars Petcare, Banfield Pet Hospital et l’université de Davis (États-Unis) qui codéveloppent un outil de modélisation capable, à partir de trois paramètres de suivi du “patient” âgé (créatinine et urée sériques, densité urinaire) et de son âge, de donner, avec une spécificité de 99 %, une anticipation de 1 à 2 ans sur le diagnostic de la maladie rénale chronique. Gageons qu’en y rajoutant le poids et la condition musculaire (qui reste à standardiser), la sensibilité (respectivement de 63 et 44 % à 1 et 2 ans) sera améliorée.

Jessica Quimby (université de Columbus, États-Unis) a souligné l’intérêt d’une approche pragmatique et centrée sur le tempérament du chat pour la prise en charge de l’hyperthyroïdie. L’approche diététique conviendra au chat stressé, qui n’aime ni la voiture ni les transports, l’approche chirurgicale sera déconseillée sur les très vieux chats, en présence de tissus ectopiques ou d’une maladie rénale chronique. Lors de traitement par radiothérapie, la dose basse (2 mCi [millicuries]) permettra de limiter les risques d’hypothyroïdie iatrogène. Enfin, avec le traitement médical, il est important de commencer par une dose basse pour ne pas diminuer trop rapidement le débit de filtration glomérulaire (dont l’élévation compensait jusque-là souvent la maladie rénale chronique). Enfin, Jessica Quimby avertit systématiquement les propriétaires des effets secondaires possibles (présents chez 67 % des animaux traités), avec des signes gastro-intestinaux, du prurit facial, des hépatopathies imposant un suivi régulier après la prescription.

LE TROISIÈME BOL, POUR HYDRATER EFFICACEMENT

Un chat de 3 kg a besoin de 100 ml d’eau par jour pour assurer son hydratation, fournis par son alimentation ou son abreuvement. Boire demande beaucoup d’énergie au chat, car l’eau est trop fluide pour sa langue, adaptée à des viscosités importantes, comme l’alimentation humide ou ses proies, composées à 70 % d’eau. Lorsqu’il mange des croquettes, il effectue 594 lapements pour obtenir 90 ml d’eau, alors que le chat consommant des sachets n’en effectue que 132 pour obtenir les 20 ml d’eau qui peuvent lui être nécessaires. La présence d’une fontaine à eau ne permet pas d’augmenter le niveau d’abreuvement du chat. Avec une alimentation sèche, le chat n’a jamais soif à la hauteur de ses besoins et son ingéré hydrique est toujours plus élevé avec une alimentation strictement humide. Par ailleurs, à état de déshydratation équivalent, le chat va mettre 24 heures de plus qu’un chien à avoir soif pour compenser son état. Or, plus de 50 % des chats âgés présentent de la déshydratation. Purina a développé un nutriment semi-liquide, capable d’augmenter significativement la prise hydrique (et la densité urinaire) des chats dont le régime est constitué de croquettes. Se présentant sous forme de sachets, à mettre à part dans un troisième bol, Hydra Care1 permettra d’augmenter d’au moins 28 % l’abreuvement des chats (lancement aux États-Unis). Reste à examiner un paramètre clé, négligé dans l’ensemble des études nutritionnelles : la qualité de l’eau fournie aux chats, car entre certaines eaux du robinet et la Mont Roucous - pour citer l’une des moins minéralisées du marché -, c’est le jour et la nuit.

1. www.bit.ly/39OPl3a.