L’ANIMAL EST UN ÊTRE VIVANT DOUÉ DE SENSIBILITÉ, ENTENDONS-LE BIEN - La Semaine Vétérinaire n° 1854 du 15/05/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1854 du 15/05/2020

JURISPRUDENCE

ENTREPRISE

Auteur(s) : CÉLINE PECCAVY

Un vol de chiots chez une éleveuse a permis de réaffirmer que l’animal a un statut particulier.

Les faits

Mme C. est éleveuse professionnelle de chiens de race spitz poméranian. Son élevage est de petite taille et elle peut donc s’en occuper seule. À l’automne 2015, Mme C. va solliciter, pour des menus travaux, l’aide de personnes habitant à proximité. Le malheur voudra que parmi ces personnes se trouve M. D, individu déjà fortement connu défavorablement des services de police pour avoir à son actif, en septembre 2015, pas moins de 12 condamnations.

C’est ainsi que le 12 septembre 2015, Mme C., ne se méfiant pas au cours d’une conversation, va donner l’information qu’elle sera absente de son domicile en début d’après-midi. Il n’en faudra pas plus à M. D., qui a déjà repéré la faiblesse d’une baie vitrée, pour prendre la décision de s’introduire avec effraction dans le domicile de Mme C. afin de la voler. Mais ce qui l’intéresse ce jour-là, ce n’est pas de l’argent liquide ou des bijoux. Non, il va repartir avec trois chiots en laissant ses empreintes sur la baie vitrée qu’il a forcée.

Un véritable réseau organisé

M. D. dispose d’un réseau organisé pour ce type de vols, un réseau où tous sont connus défavorablement des services de police. Il va donc emmener les chiots pour les monnayer à un couple qu’il sait habitué à un tel trafic : M. V et Mme M. Ils seront ensuite vendus par le couple à M. G. Là, se perd la trace des chiots.

Un seul chien retrouvé

Seule une petite chienne a pu être retrouvée en Belgique. Elle avait été cédée à une animalerie, s’en était échappée et avait été alors récupérée dans un très mauvais état de santé par un couple qui l’avait accueillie et fait soigner.

Les auditions

M. D. a rapidement reconnu le vol, tout comme M. V. le recel. Beaucoup plus de mauvaise foi du côté de Mme M. et de M. G. Ce dernier va, en outre, toujours refuser de communiquer les noms des Hollandais auxquels il aurait revendu les chiots.

Les poursuites

M. D., à l’origine de tout, va être poursuivi pour vol par effraction dans un local d’habitation.

Dans de telles circonstances, « le vol est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende » (article 311-5 du Code pénal).

Quant au couple V.-M. et à M. G, ils seront poursuivis pour recel de bien provenant d’un vol.

Petit rappel sur le recel qui est « le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d’intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d’un crime ou d’un délit. Le recel est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende » (article 321-1 du Code pénal).

L’audience du 24 septembre 2019

Si Mme C. va se présenter à cette audience accompagnée de son avocat pour faire valoir ses demandes, aucun des quatre autres protagonistes n’y sera. Un avocat représentera néanmoins le couple V.-M.

Rappelons que lorsque la convocation a été faite en bonne et due forme, le jugement rendu est applicable. Il serait bien trop facile de se dérober à l’audience pour ne pas être condamné.

Des condamnations sévères

Le tribunal va rendre son délibéré sur l’audience. Il est à la hauteur des faits commis et des protagonistes de cette affaire qui ont déjà tous été condamnés par le passé par la justice.

Peines principales toutes prononcées pour de l’emprisonnement ferme :

M. D. : 7 mois ; M. G. : 5 mois ; M. V. : 8 mois ; sa compagne, Mme M. : 6 mois.

Peines complémentaires : le Code pénal les prévoit expressément mais elles restent soumises à l’appréciation du magistrat. Ici, la particularité du dossier était que les trois receleurs étaient tous des éleveurs professionnels de chiens. La sanction n’a donc pas manqué pour tous les trois : l’interdiction d’exercer toute profession en relation avec l’élevage ou la vente de chiens pendant cinq ans.

Partie civile

Mme C. a, quant à elle, été indemnisée à hauteur de 10 000 € en réparation de son préjudice matériel et de 1 000 € en réparation de son préjudice moral. En conclusion : un jugement qui prend véritablement en compte l’animal en tant qu’être vivant doué de sensibilité.

Source : jugement rendu le 24/9/2019 par le tribunal correctionnel de Bergerac (Dordogne).