LE POINT DE VUE DE GHISLAINE JANÇON, DOCTEUR VÉTÉRINAIRE, REPRÉSENTANTE DU CNOV DANS LE GROUPE DE CONCERTATION - La Semaine Vétérinaire n° 1866 du 11/09/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1866 du 11/09/2020

PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC

ANALYSE

Que pensez-vous des deux scénarios proposés par le CNA ?

Ces scénarios constituent tous les deux une première marche vers une dynamique d’amélioration de l’information des consommateurs sur la qualité de ce qu’ils mangent, afin qu’ils puissent choisir leurs produits de façon éclairée et responsable. L’Ordre des vétérinaires est pro fondément attaché à cette notion.

Le scénario 2 est-il satisfaisant ainsi ou un étiquetage indiquant les modes de transport et d’abattage des animaux devrait-il être aussi inscrit au même endroit sur les produits ?

Pour l’Ordre des vétérinaires, chaque consommateur a des attentes, des priorités différentes. L’objectif à atteindre est de l’informer parfaitement et complètement sur le produit qu’il veut acheter, produit issu de tout un processus de production comportant différentes phases (élevage, transport, abattage…), afin qu’il puisse le choisir en connaissance de cause. Certains consommateurs de viande sont attachés au principe d’un haut niveau de bien-être animal : il est donc important que celui-ci soit « tracé » tout au long du processus de production, et le transport et l’abattage en sont deux périodes particulièrement sensibles. Un étiquetage portant sur le « mode d’élevage » seulement est donc pour nous un premier pas, celui-ci pourra - et, de notre point de vue, devra - ensuite être complété pour aller vers un étiquetage intégrant l’ensemble des données caractérisant le BEA, afin d’informer correctement les consommateurs pour lesquels ces données sont essentielles.

Que pensez-vous des mentions « animaux élevés sans traitement antibiotiques » ?

Personnellement cette mention m’horripile, je la trouve fallacieuse et tendancieuse. Fallacieuse, car elle semble opposer les traitements antibiotiques au bien-être des animaux alors qu’un des éléments essentiels du BEA est bien la bonne santé de l’animal, et qu’un traitement raisonné, y compris avec prescription d’antibiotique, y contribue fortement. Tendancieuse, car elle semble suggérer que les antibiotiques vétérinaires sont utilisés aujourd’hui à tort et à travers, alors que les vétérinaires sont très attentifs à ce niveau. En tout état de cause, cette mention n’est certainement pas le gage du respect du bien-être de l’animal pour lequel il est ainsi allégué qu’il a été privé d’antibiotiques !

Comment le vétérinaire peut-il à travers cet étiquetage mettre en avant son rôle majeur dans la garantie d’une alimentation sûre d’un point de vue sanitaire et dans le contrôle du respect du bien-être animal ?

Le vétérinaire est un professionnel qui œuvre au quotidien pour la santé et le bien-être des animaux. Il est formé pour distinguer chez eux l’anormal du normal, le pathologique du physiologique, traiter et prévenir le pathologique, et identifier les mesures nécessaires pour garantir un environnement conforme aux besoins. Par ailleurs, le vétérinaire est soumis à une déontologie : il a de nombreux devoirs, et no tamment celui d’indépendance, de respect de l’animal, de certification exemplaire. Il est par excellence le tiers de confiance tout désigné dans une telle démarche. Les vétérinaires pourront donc intervenir tant au niveau de l’élaboration des cahiers des charges, référentiels et grille de lecture en amont de l’étiquetage, qu’en aval, au niveau des contrôles, audits et enquêtes…

L’image des vétérinaires auprès du grand public peut-elle être modifiée avec un tel dispositif ?

Ce dispositif peut amener à terme à mettre en lumière le rôle essentiel joué là par les vétérinaires, si tant est qu’ils saisissent l’opportunité de valoriser leurs compétences dès cette première marche. Ils apparaîtront enfin pour ce qu’ils sont vraiment : les gardiens de la santé et du bien-être des animaux, mais aussi de la santé et du bien-être des humains, en leur garantissant une alimentation saine et conforme à leurs attentes. Le CNA considère que l’expérimentation pourrait se faire en deux étapes.