LIVRE BLANC DE VETFUTURS : LES LEVIERS D’ACTION POUR DEMAIN - La Semaine Vétérinaire n° 1870 du 09/10/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1870 du 09/10/2020

PERSPECTIVES

ANALYSE

Auteur(s) : JEAN-PAUL DELHOM

Lors d’une visioconférence organisée le 29 septembre dernier, le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) a présenté le Livre blanc de VetFuturs, groupe de réflexion dont l’objectif est d’accompagner la profession vétérinaire dans un monde en pleine mutation.

Préparer l’avenir de la profession vétérinaire à la lumière des changements humains, sociaux, scientifiques, économiques et techniques, tel est le but de VetFuturs. Ce groupe de réflexion a établi un Livre blanc qui résume l’ensemble des travaux qui ont été menés depuis 2017, formule les grandes orientations de la profession liées à la protection animale, la biodiversité, la maîtrise des nouvelles technologies et propose des leviers d’action pour demain. C’est au cours d’une réunion organisée en visioconférence que le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) a présenté ce livre blanc.

L’implication des vétérinaires en protection animale

Les vétérinaires devraient s’impliquer plus dans la protection animale estime Jean-Yves Gauchot, président de la Fédération des syndicats vétérinaires de France, c’est pourquoi il a créé le Comité de liaison des associations de protection animale (Clapav). L’objectif de ce comité est d’organiser des actions concrètes pour une meilleure prise en compte des animaux et de leur bien-être avec des associations ne remettant pas en cause la domestication animale (SPA, œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoir, Ligue française pour la protection du cheval, etc.).

La profession n’a pas su rapidement occuper la place qui est la sienne dans ce domaine avec ses compétences scientifiques, juridiques tout en laissant de coté l’anthropomorphisme, renchérit Jean-Pierre Kieffer, président de l’OABA. En tenant compte des demandes du public, il est aujourd’hui possible de contribuer au bien-être animal par un dialogue intelligent et constructif avec des associations de protection animale (APA).

D’un point de vue pratique, le Clapav aide à la stérilisation des chats errants en expliquant par des spots TV qu’il s’agit d’un acte pour le bien-être animal. L’an prochain, cette action se concentrera sur les mairies. Il soutient les APA dans la lutte contre la castration systématique des porcs d’élevage.

Jean-Pierre Kieffer insiste sur les maltraitances par abandon de soin dans les exploitations souvent liées à la détresse économique. Le rôle social et l’obligation du vétérinaire en tant que lanceur d’alerte (article L. 203-6 du code rural et de la pêche maritime) sont essentiels pour le bien-être des animaux et des éleveurs.

Préserver la biodiversité

La préservation de la biodiversité est un enjeu crucial et un devoir pour le futur. Son implication dans ce domaine est une évolution de notre profession. Une évolution somme toute logique car, désormais, la fonction du vétérinaire est moins de soigner les animaux que de réharmoniser les rapports homme/animaux.

Selon Norin Chai, vétérinaire responsable des animaleries du Muséum national d’histoire naturelle, la biodiversité ne peut s’appréhender sans respect des populations locales, le but étant de préserver un écosystème. Pour cela il a créé l’association Yaboumba, impliquant de nombreux jeunes. Il ne s’agit pas d’avoir une vision uniquement médicale mais holistique grâce à une formation pluridisciplinaire.

Un hôpital a été créé à Sumatra, en Indonésie, pour des espèces menacées. Plusieurs projets humanitaires et sociaux sont menés au Cambodge. En Afrique et Amérique latine est dispensée une aide sous forme d’expertise.

Prendre la parole

Loïc Dombreval, député vétérinaire, président du groupe d’études sur la condition animale à l’Assemblée nationale, estime que les vétérinaires ne prennent pas assez la parole. « Sur tous les débats de société qui animent les médias et le monde politique, je n’entends pas les vétérinaires. S’ils n’en parlent pas, qui va en parler à leur place ? Il faut organiser et structurer la parole des vétérinaires : ils sont attendus. » La profession n’a de futur que si elle est unie sur les questions de société qui la concernent. Vétérinaires pour tous (VPT) est une magnifique expérience qu’il faut remettre au goût du jour.

Sur la question du One Health et des zoonoses, une absence de parole des vétérinaires est impensable et serait une faute de la profession. Dans le cadre du référendum d’initiative partagée sur les animaux, Loïc Dombreval estime que les vétérinaires sont muets alors que politiques et médias en parlent tous les jours.

Loïc Dombreval est fier d’annoncer qu’après un rude combat il a été décidé de mettre fin à la détention d’animaux sauvages dans les cirques et delphinariums et d’interdire l’élevage des visons pour la fourrure. Concrètement, une transition et un accompagnement doivent être mis en place de la manière la plus sereine possible.

Le futur passe par l’intelligence artificielle

Le futur technologique passe par l’utilisation de l’intelligence artificielle. Il s’agit d’une intelligence généraliste mais restreinte. Des êtres humains sont là pour l’entraîner, interpréter les résultats - modélisation moléculaire dans la recherche de nouveaux médicaments, gestion des données, etc. Les travaux de Dominique Grandjean, professeur de l’École nationale vétérinaire d’Alfort, ont montré que l’on pouvait utiliser les capacités animales pour la gestion de crises, comme la détection du Covid-19 par les chiens. « Par les mécanismes biologiques nous sommes plus proches de l’intelligence animale. »

Les cas d’usage sont l’aide au diagnostic et aux choix thérapeutiques mais aussi à la compréhension des interactions humaines et animales dans leur contexte. Au fur et à mesure, les services apportés par l’intelligence artificielle seront de plus en plus intéressants et importants, tout en utilisant de plus en plus de données. Ces outils ne vont pas remplacer l’humain mais intervenir dans des cas précis grâce à l’extrême rapidité de traitement et l’appréhension de l’ensemble des données.

Vétérinaire pour la vie, Vétérinaire pour la planète : la marque pépite de VetFuturs

Ces trois années de réflexion autour de VetFuturs sont une première pour notre profession. Cette aventure doit continuer à vivre à travers des actions concrètes », déclare Jacques Guérin, président du Conseil national de l’Ordre vétérinaire.

Les enjeux qui attendent les vétérinaires sont liés à la protection animale - accès aux soins pour tous à tout moment, médecine solidaire, permanence des soins. Certains enjeux sont soulignés : diversité du recrutement des étudiants, travail en équipe, entreprise vétérinaire et sa transmission, données et data. Nul doute que des débats suivront. À travers ces démarches, il convient de maintenir le standard de la qualité du service rendu aux usagers.

VetFuturs va générer des actions qui vont faire évoluer le cadre de l’exercice de la profession. « Il faudra se questionner pour savoir si ces évolutions rentrent dans le cadre de nos valeurs éthiques et déontologiques (secret et indépendance professionnels) », poursuit Jacques Guérin.

Dans le cadre de la pandémie, la place du vétérinaire a été méconnue par les gestionnaires du risque. « Notre cœur de métier - la relation homme/animal - nous oblige à la remontée des données épidémiologiques pour permettre la recherche et une meilleure prise de décision par les autorités sanitaires. La marque "Vétérinaire pour la vie, Vétérinaire pour la planète" est une pépite de VetFuturs, la naissance du Comité d’éthique animal, environnement, santé en est une autre. »