GÉNÉTIQUE
PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC
Auteur(s) : LUCIE CHEVALLIER
Fonctions : MAÎTRE DE CONFÉRENCES EN GÉNÉTIQUE À L’ENVA
Actuellement des panels de tests permettent de détecter avec un seul prélèvement la présence ou l’absence de plusieurs mutations génétiques. Ils ouvrent la voie à une médecine préventive et personnalisée, à un coût raisonnable.
Jusque très récemment, le vétérinaire praticien n’avait accès qu’à des tests génétiques « simples » ou « classiques », permettant de déterminer le génotype d’un animal pour une mutation spécifique. Ainsi, le test ostéogenèse imparfaite du teckel permet de confirmer l’origine héréditaire d’une fragilité osseuse chez un jeune animal. Outre un usage comme examen complémentaire, ces tests sont également très utiles pour le dépistage des maladies héréditaires ou d’autres caractères héréditaires. Le plus utilisé étant le test MDR1 qui évalue le risque de sensibilité médicamenteuse chez un chien de berger (et autres races à risque). Aujourd’hui, le marché des tests génétiques s’est enrichi de panels de tests, dits multimaladies/multiraces. Ces panels correspondent en réalité à un grand nombre de tests simples regroupés sur un même outil.
Les panels proposés actuellement regroupent généralement entre 150 et 200 mutations responsables de maladies héréditaires chez le chien, toutes races confondues, ainsi que les tests génétiques de couleur de robe, de texture du pelage ou de caractères morphologiques. Si un test génétique simple s’adresse à une race en particulier, ou à quelques races qui partagent une même mutation, un même panel, en revanche, peut être théoriquement proposé à tous les chiens. C’est ensuite l’interprétation des résultats qui se fera en fonction de la race du chien testé. Par exemple, pour un labrador, sur 200 tests réalisés, seule une douzaine aura un intérêt réel dans la race. Les autres mutations n’étant normalement pas retrouvées chez le labrador, un résultat négatif n’aura pas de valeur. Ces panels existent aussi chez le chat, mais ils sont nettement moins développés, avec 50 à 60 mutations testées ainsi que des tests génétiques de couleur du pelage.
Les panels ont pour principal avantage de rendre plus accessible financièrement une médecine préventive « génomique ». Lors d’une première consultation, un vétérinaire pourra ainsi plus facilement proposer un panel de tests pour un chiot appartenant à une race à risque de développer plusieurs maladies héréditaires, à un prix plus abordable que plusieurs tests simples. C’est le cas typiquement des chiens à risque de présenter une sensibilité médicamenteuse (le test MDR1 fait quasiment toujours partie des tests réalisés dans les panels), pouvant être également porteurs d’autres mutations. Ces données vont pouvoir aider le praticien à adapter le suivi médical du chien tout au long de sa vie. Pour les éleveurs qui consultent pour un reproducteur, outre l’aspect financier, ces panels de tests sont particulièrement intéressants d’un point de vue pratique, car ils évitent les envois multiples de prélèvements à différents laboratoires. De plus, ces panels proposent quasi systématiquement en complément des tests génétiques une évaluation de la diversité génétique du chien par le génotypage de marqueurs génétiques, pouvant guider les schémas de reproduction à l’échelle de l’élevage et de la race. Certains panels permettent aussi de déterminer l’héritage racial des chiens croisés, ce qui peut avoir un intérêt en médecine préventive ou simplement satisfaire des propriétaires curieux de l’histoire génétique de leur chien. Il est à noter que ces panels n’incluent généralement pas de profil génétique permettant de vérifier les liens de parentés tels qu’ils sont pratiqués chez le chien et le chat actuellement.
L’offre des panels de tests ciblée pour les vétérinaires est encore restreinte en France contrairement aux pays anglo-saxons, mais elle évolue très rapidement. Actuellement, on trouve aux États-Unis Canine HealthCheck, Embark, Orivet, et en Europe MyDogDNA et MyCatDNA, ou encore Optimal Selection et Wisdom Panel Health. Le panel MyDogDNA, qui fait désormais partie des produits proposés par Wisdom Health, permet, pour 100 euros, de tester plus de 200 variants génétiques, dont environ 150 sont impliqués dans des maladies héréditaires chez le chien. Si leur marketing s’adresse plutôt au propriétaire - le kit permet facilement au maître d’effectuer lui-même le prélèvement -, l’outil pourrait être utilisé et valorisé par le vétérinaire dans un contexte de médecine préventive ou même de diagnostic. Il est néanmoins nécessaire de vérifier la liste des tests génétiques effectués sur le site internet du fournisseur car certains tests sous brevet ne sont disponibles qu’en format individuel dans d’autres laboratoires. Attention, certains « panels » vendus actuellement en France ne permettent de déterminer que la composition raciale d’un chien croisé, ils ne comportent pas de tests génétiques de santé, c’est le cas du Wisdom Panel 2.0. La Société centrale canine propose également un « pack génomique » à destination des éleveurs : y sont fournis les résultats de tests de couleurs de robe et des maladies pertinentes pour la race du chien testé, ainsi qu’une identification génétique.
L’interprétation des résultats d’un panel doit être faite avec précaution. Tout d’abord il faut garder en mémoire que ces panels testent plus de mutations que nécessaire, puisque la très grande majorité des mutations ne sont retrouvées que dans une seule race. Il est nécessaire de faire un tri des tests valables pour la race concernée - ce tri est généralement fait par le fournisseur qui indique les résultats pertinents dans la race et donne à titre indicatif les autres résultats. De plus, comme pour les tests génétiques simples, l’interprétation des résultats dépend de la corrélation entre le génotype (les allèles portés par l’individu) et le phénotype (statut clinique : malade ou non). Quand la corrélation est élevée, l’interprétation du résultat du test (muté/non muté) est simple, mais lorsque la corrélation est faible, l’interprétation est plus complexe. En effet, certaines maladies héréditaires présentent un phénomène de pénétrance incomplète, c’est-à-dire que la présence de la mutation n’implique pas forcément le développement des symptômes de la maladie par l’animal. En outre, certaines maladies héréditaires peuvent être dues à différentes mutations dans différents gènes au sein d’une même race. Dans ce cas, l’animal doit être testé pour toutes les mutations connues.