UNE VÉTÉRINAIRE AU CŒUR DE LA PROTECTION ANIMALE - La Semaine Vétérinaire n° 1870 du 09/10/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1870 du 09/10/2020

INITIATIVE

PRATIQUE MIXTE

Auteur(s) : CHARLOTTE DEVAUX

Christine Filliat, vétérinaire ostéopathe, titulaire d’un DU d’éthologie, formée en nutrition équine via Lab To Field et membre du conseil d’administration de la Ligue française pour la protection du cheval, a créé une association recueillant des équidés maltraités ou saisis par la justice.

Pourquoi avoir créé cette association ?

Depuis une dizaine d’années, la pratique de l’équitation se démocratise, les clubs hippiques se multiplient, comme le nombre de chevaux en fin de carrière. Ceux-ci sont alors vendus à des particuliers qui manquent parfois de connaissances. Certains chevaux sont vendus moins cher sur Leboncoin que ce que coûtera l’équarrissage lors de leur décès… Un engouement pour les ânes et les petits chevaux « tondeuse à gazon » s’est aussi développé, avec son lot de maltraitance par ignorance. Dans ma pratique de vétérinaire équin, je constate que de nombreux soins auraient pu être évités si les animaux étaient entretenus correctement. Pour moi, le bien-être animal fait partie intégrante des missions vétérinaires, nous avons à charge la globalité de la vie de l’animal, y compris s’assurer que son lieu de vie soit adapté à ses besoins et qu’il ait une fin de vie digne. Je suis fermement convaincue que les associations doivent être tenues par des professionnels, au risque de devenir des mouroirs - j’ai reçu des chevaux saisis d’une association…

Quel est le but de votre projet ?

La mission de notre association est la réhabilitation fonctionnelle et sociale des équidés. Nous souhaitons aussi avoir une fonction éducative pour les néo-propriétaires. Nous proposons des formations de 48 heures sur les besoins physiologiques et l’abord du cheval, afin que les gens qui adoptent un équidé de l’association, ou achètent un cheval ailleurs, le fassent en conscience. Nous discutons aussi actuellement avec VetAgro Sup dans le but de devenir un troupeau pour travaux pratiques en conditions réelles. L’association a établi un partenariat avec la chaire Bien-être animal de VetAgro Sup Lyon. Nous allons recevoir des étudiants pour travailler sur les réhabilitations des chevaux maltraités.

En pratique, comment avez-vous monté ce refuge ?

Il y a un an, j’ai trouvé un terrain équipé de pâtures avec abri. J’ai fait un emprunt à titre privé pour financer la location du terrain, la nourriture et une salariée diplômée d’État pour s’occuper des animaux. L’association vit grâce aux cotisations de ses adhérents et aux dons. Nous proposons aussi des formules de parrainage de chevaux, dans lesquelles la personne vient s’occuper de l’animal comme si c’était le sien, mais sans le monter. Les pensionnaires servent aussi de chevaux de TP1 dans certains stages. Nous recherchons actuellement des aides du département et de la région, car donner aux équidés la vie qu’ils méritent est très onéreux. Sans communication, en un an, nous avons déjà 25 pensionnaires et les demandes sont quasi quo tidiennes. La France manque cruellement de lieux d’accueil : alors que je suis dans la Drôme, j’ai reçu des chevaux d’une saisie dans le Calvados !

Quelles sont, d’après vous, les mesures à prendre pour assurer le bien-être des équidés ?

Je pense qu’il faudrait aller vers un permis de détention, comme proposé dans le rapport de notre confrère Loïc Dombreval, mais aussi responsabiliser les détenteurs lors de nos visites et les sensibiliser aux soins indispensables. Il faudrait aussi mettre en place une retenue financière sur les licences FFE, comme cela est déjà mis en place dans le milieu des courses, afin de gérer la fin de vie des chevaux de loisirs.

1. TP : travaux pratiques.