CYNOPHILIE
PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC
Auteur(s) : MYLÈNE PANIZO
Néonatalité, maladies génétiques, prédispositions raciales… La 2e Journée de la recherche canine, organisée le 1er octobre dernier par la Société centrale canine (SCC), a été l’occasion de présenter les progrès à venir en médecine vétérinaire.
La Société centrale canine (SCC), située à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), a organisé le 1er octobre dernier sa deuxième édition de la Journée de la recherche canine, en partenariat avec Agria Assurance pour Animaux. La présence des acteurs de la filière canine n’a pas été possible en raison du contexte sanitaire, mais les conférences ont été transmises en direct à travers une plateforme numérique et sont disponibles en replay1. Pour Gérard Thonnat, président de la SCC, l’objectif de la journée était de « faire connaître à tous les cynophiles l’avancée des travaux scientifiques actuels et les espoirs portés par la recherche pour améliorer la santé et le bien-être de nos compagnons à quatre pattes ». Neuf interventions scientifiques ont ainsi permis de présenter des études en cours parmi les 15 financées par le fonds de recherche commun à la SCC et à Agria, en 2019 et en 2020.
Hanna Mila, qui fait partie de l’équipe NeoCare, centre créé au sein de l’école vétérinaire de Toulouse, a exposé les résultats préliminaires de son étude sur le développement de biomarqueurs précoces des infections bactériennes chez les chiots nouveau-nés. Les premiers résultats semblent démontrer que la procalcitonine pourrait être un marqueur de mortalité néonatale - sa concentration sanguine diminue au deuxième jour de vie chez les chiots décédés la première semaine. L’analyse des données sur des marqueurs non spécifiques - albumine, protéines totales, protéine C réactive - est en cours et permettra de les comparer à la procalcitonine.
Juan Hernandez, du service de médecine interne d’Oniris, a présenté un projet de recherche en cours à Oniris, en collaboration avec l’INRA Micalis (Jouy-en-Josas), sur la composition du microbiote fécal et son déterminisme racial. Le microbiote fécal d’une large cohorte de chiens sains de 3 races - berger allemand, yorkshire-terrier et berger australien - sera analysé afin d’identifier des éventuelles variations interraciales. Il s’agit à terme de pouvoir expliquer certaines prédispositions raciales à des maladies associées à une modification du microbiote intes tinal, telles que les entéropathies inflammatoires chroniques, et de proposer ainsi de nouvelles approches préventives et curatives.
Une étude concernant les mécanismes impliqués dans la formation des calculs d’oxalate de calcium chez le yorkshire-terrier a été présentée par Christelle Maurey, du service de médecine de l’EnvA, en collaboration avec l’Inserm et Royal Canin. L’augmentation de la prévalence des calculs d’oxalate de calcium, le taux de récidive élevé et l’absence de traitement médical calculolytique incitent à améliorer la prise en charge actuelle des chiens atteints, en particulier chez le yorkshireterrier, race fortement prédisposée à ce type de calcul. Une notion émergente apparaît en médecine vétérinaire, celle de la distinction whewellite (oxalate de calcium monohydraté) et weddellite (oxalate de calcium dihydraté). Cette différence existe chez le chien mais n’induit pas encore une approche thérapeutique différente, contrairement à ce qui est fait en médecine humaine. Un travail génétique sera également réalisé afin d’identifier des variants génétiques impliqués. À long terme, un outil de sélection pourrait voir le jour pour les éleveurs de yorkshire-terriers.
Benoît Hédan, ingénieur de recherche dans l’équipe génétique du chien du CNRS de Rennes, a présenté une étude en cours sur les facteurs génétiques influençant la longévité des races canines, en collaboration avec AgroParisTech et l’UMR INRAE. La corrélation négative entre la taille et le poids des chiens et leur espérance de vie est connue depuis longtemps. Cependant, au sein d’une même race, des indi vidus font preuve d’une longévité extrême - jusqu’à 4 ans supérieure à la médiane de la race -, ce qui suggére l’existence d’autres régions chromosomiques impliquées dans la longévité (non associées à la taille et au poids). Si cela est démontré, cela ouvrirait de nouvelles perspectives pour les éleveurs, qui pourraient alors sélectionner leur chien sur la longévité sans modifier le phénotype. L’étude présente également un intérêt fondamental, celui de mieux comprendre le processus de vieillissement, commun à tous les mammifères, et donc à l’humain.
Marie Abitbol, de l’unité d’enseignement de génétique à VetAgro Sup, a fait le point sur 2 projets de recherche collaborative en génétique canine. Des travaux sont en cours pour étudier une nouvelle forme d’ataxie cérébelleuse - dite juvénile pour la distinguer de la forme néonatale déjà connue - du coton de Tuléar. L’étude a permis de démontrer que le mode de transmission de cette nouvelle forme est autosomique récessif et a mis en évidence une unique région candidate du gène impliqué, ce qui devrait permettre prochainement d’identifier ce gène et la mutation causale. Par ailleurs, une nouvelle forme d’ataxie - initialement cérébelleuse, évoluant vers une atteinte spinocérébelleuse -, chez le berger australien a été identifiée à VetAgro Sup chez 2 chiens de la même portée. Une étude est en cours pour identifier son support génétique. Chez le staffordshire terrier américain, une polyneuropathie juvénile a été décrite. Les travaux en cours, présentés par Lucie Chevallier, de l’unité de génétique de l’EnvA, ont permis de supposer que cette affection neuromusculaire dégénérative possède un mode de transmission autosomique récessif. L’étude a pour objectif de caractériser la maladie puis d’identifier la ou les mutations causales, afin de développer un test génétique de diagnostic et de dépistage. Enfin, un état des lieux concernant la rétinopathie multifocale chez le border collie a été effectué. La maladie, dont la transmission est liée au chromosome X, est connue depuis les années 1990. La recherche avance pour identifier la mutation causale. Grâce aux financements de la SCC et d’Agria, des séquençages complets de chiens atteints ont été réalisés et sont en cours d’analyse.
Clément Chalard, étudiant à VetAgro Sup, a présenté son futur travail de thèse. Il souhaite démontrer l’existence d’une compensation olfactive chez le chien sourd. Les capacités olfactives remarquables du chien sont depuis longtemps mises à profit pour l’humain - dépistage du cancer du sein, recherche de produits stupéfiants, chiens truffiers, etc. Les chiens étudiés - 10 dalmatiens ayant une surdité bilatérale congénitale héréditaire et 10 dalmatiens sains - seront entraînés, par le jeu, à rechercher une molécule odorante. Les seuils de détection olfactive seront comparés dans les 2 groupes, afin de pouvoir déterminer si la privation sensorielle auditive congénitale s’accompagne d’une meilleure aptitude olfactive.
Un projet novateur visant à analyser l’impact d’un dispositif de médiation canine au profit de militaires victimes du trouble de stress post-traumatique a été présenté par Christophe Blanchard, docteur en sociologie au laboratoire Experice - issu du rapprochement des équipes de Sorbonne Paris Nord et de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Ce projet collaboratif a pour objectif d’aider les militaires blessés physiquement et/ ou psychologiquement à se réinsérer socialement. L’étude doit analyser les liens entre l’humain et l’animal, l’impact de la médiation canine sur les victimes mais aussi sur le bien-être des chiens sélectionnés.