RÉGIMES SANS CÉRÉALES : BEAUCOUP DE BRUIT POUR PEU D’INDICATIONS - La Semaine Vétérinaire n° 1874 du 06/11/2020
La Semaine Vétérinaire n° 1874 du 06/11/2020

NUTRITION

PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC

ANALYSE

Auteur(s) : CHARLOTTE DEVAUX

La mode du régime sans céréales repose sur la double croyance erronée selon laquelle les animaux de compagnie souffriraient d’allergies alimentaires et que cette forme de nourriture leur serait bénéfique.

L’alimentation sans céréales est devenue de plus en plus populaire ces dernières années par peur du gluten et des « allergies » aux céréales. Le guide de nutrition édité par la British Small Animal Veterinary Association (BSAVA)1 fait le point sur cette tendance.

Allergie alimentaire : épidémie ou effet de mode ?

La vraie intolérance alimentaire à expression cutanée est rare – 1 % des cas observés dans la pratique –, loin derrière l’allergie aux puces et l’atopie. Les affections gastro-intestinales d’origine alimentaire sont courantes chez les chats et les chiens, mais il est prouvé que seule une minorité de cas est le résultat d’une véritable hypersensibilité alimentaire à médiation immunitaire : une allergie. La plupart résultent d’autres mécanismes relevant de l’intolérance. Les aliments les plus courants associés à des effets indésirables chez les chats et les chiens sont le bœuf, le soja et les produits laitiers. Malgré cela, les propriétaires croient de plus en plus que leurs animaux de compagnie souffrent d’allergies alimentaires qui bénéficieraient d’un régime sans céréales.

Intolérance alimentaire, un diagnostic difficile à établir

La méthode de référence pour conclure à une intolérance alimentaire est un régime d’exclusion correctement conçu, avec un aliment hydrolysé ou à défaut contenant une source de protéines et de glucides unique que l’animal n’a jamais mangé. Ce régime doit être distribué exclusivement pendant 2 semaines en cas de signes intestinaux et 6 à 10 semaines pour les signes cutanés. À la fin de l’essai, un test de provocation doit être effectué avec l’aliment initial. Le diagnostic d’intolérance alimentaire ne pourra être établi qu’en cas de rechute avec l’ancien aliment. Pour connaître l’ingrédient précis, chacun des ingrédients devra être testé individuellement. Les tests sérologiques ne sont pas fiables, rappelle la BSAVA.

Sans céréales mais pas sans risque

Des régimes sans céréales ont récemment été associés à des cas de myocardiopathie dilatée chez des chiens. Ces aliments étant majoritairement formulés par des petites marques récentes, il est possible que des problèmes de formulation en soient la cause. Cependant, la récurrence du même type de produits, notamment les légumineuses comme le pois et les lentilles, dans les 4 premiers ingrédients des formules et la rétrocession des symptômes après passage à un aliment classique avec céréales génère des soupçons sur ces matières premières. Ainsi, le sans céréales ne semble pas indiqué même dans les cas d’intolérance au gluten, car il existe des céréales sans gluten comme le riz. D’un point de vue général, les aliments de petites marques ne réalisant pas d’analyses de leurs produits, la BSAVA explique qu’il est plus sage d’éviter les régimes sans céréales non formulés par des compagnies employant des vétérinaires nutritionnistes jusqu’à ce que les suspicions de myocardiopathie dilatée soient élucidées.

1. BSAVA Guide to Nutrition (e-book), par Marge Chandler, Alexander J. German et Georgia Woods, juin 2020.

CAS D’INTOLÉRANCE AU GLUTEN CHEZ LES CHIENS

En plus de l’intolérance au gluten du setter irlandais, une autre maladie nécessite un régime sans céréales : la dyskinésie paroxystique sensible au gluten. C’est un trouble neurologique qui affecte principalement les border terriers et qui provoque des mouvements anormaux des membres. Il a été démontré que l’élimination du gluten alimentaire améliore les signes cliniques, ce qui fait du régime sans gluten une composante essentielle de la prise en charge de cette maladie.