SOINS INTENSIFS
PRATIQUE CANINE FÉLINE NAC
FORMATION
Auteur(s) : TAREK BOUZOURAA
Dans l’espèce féline, les précautions d’usage lors de transfusion peuvent parfois être très contraignantes et il n’est pas aisé de trouver un chat donneur et compatible, notamment en situation d’urgence. Ces dernières années, plusieurs articles scientifiques ont documenté l’emploi de la xénotransfusion en urgence d’un donneur canin à un receveur félin, mais les études en question décrivent des protocoles variables qui génèrent des incertitudes. En effet, alors que certaines études évoquent des résultats satisfaisants sur le terrain, des hyperhémolyses transfusionnelles retardées fatales ainsi que des réactions anaphylactiques immédiates sont rapportées. Les situations pouvant inviter au recours à cette procédure doivent donc être bien précises - notamment urgence vitale, incapacité à grouper un donneur et/ou son receveur félin - et limitées au strict minimum. Une étude1 détaille l’emploi d’un protocole et en évalue les conséquences cliniques.
Les chats inclus ont fait l’objet d’une sélection soigneuse et éthique. Ont été pris en considération plusieurs éléments : le risque clinique majeur, défini par un décès imminent (fort probable sous un délai de 6 heures sans l’administration d’une transfusion sanguine) ; le recours à du sang en provenance d’un donneur félin non possible (absence de donneur, donneur incompatible, limites financières des propriétaires) ; et la clarté et la précision de l’information apportée aux propriétaires quant aux risques liés à une xénotransfusion depuis un donneur canin.
Les chats inclus ont fait l’objet d’un groupage sanguin, de l’application d’un protocole de réaction croisée - au titre de recherche académique car les résultats n’étaient pas connus immédiatement car non dédiés à orienter les décisions thérapeutiques initiales. Le suivi transfusionnel a été consigné dans des fiches dédiées, employées dans les structures ayant réalisé l’étude. Le protocole a consisté en une transfusion avec un débit de 1 ml/kg/h pendant 30 minutes, puis augmenté progressivement de manière à délivrer la totalité du volume souhaité sur une période de 6 heures. Le protocole complet et détaillé de soin est accessible dans l’étude1.
Un effectif de 49 chats anémiés a été inclus. Au sein de l’effectif, 5/49 chats sont décédés durant la procédure, tandis que 5/49 autres chats ont été euthanasiés dans les 24 heures suivant la procédure, en lien uniquement avec leur affection causale tumorale associée à un pronostic sombre. Sur les 39 chats restants, une réaction transfusionnelle retardée a été observée chez 25/39 chats, dont 14/25 sont retournés au domicile sans conséquence. Parmi les 14/39 chats restants n’ayant pas exprimé de réaction retardée, un décès spontané ou une euthanasie sont rapportés dans 9 cas sous 48 heures tandis que les 5 derniers chats ont survécu à la procédure au-delà de 6 jours.
La procédure de soin a autorisé une sortie d’hospitalisation dans 23/49 cas (environ 47 %), parmi lesquels 5 ont été euthanasiés ou sont décédés dans la semaine qui suivait leur retour au domicile. Finalement, seulement 18/49 chats, soit 37 %, étaient encore en vie au-delà de 7 jours après la xénotransfusion. Ces résultats ne font cependant pas tant contraste avec les données obtenues lors d’une transfusion usuelle chez le chat. Aucun chat n’a notamment présenté de réaction transfusionnelle immédiate.
1. Le Gal A., Thomas E.K. et Humm K.R., Xenotransfusion of canine blood to cats: a review of 49 cases and their outcome, J Small Anim Pract., 2019;61 (3).