MATÉRIEL
PRATIQUE MIXTE
Auteur(s) : NICOLAS ZINZIUS*, CLOTHILDE BARDE**
Pour contribuer à la lutte contre l’antibiorésistance en élevage par la réduction de consommation d’antibiotiques, le vétérinaire peut installer dans son cabinet un laboratoire d’analyse de lait. Retour d’expérience terrain et conseils de Nicolas Zinzius, vétérinaire à Champagnole (Jura).
La lutte contre l’antibiorésistance est un défi majeur mondial de santé publique, car la perte d’efficacité des antibiotiques impacte la santé humaine, la santé animale et celle des écosystèmes. Dans ce contexte, avec le Plan Écoantibio 21, la France s’engage à poursuivre dans la durée sa dynamique de réduction de l’utilisation des antibiotiques sur les animaux avec le soutien des vétérinaires. Dans un tel objectif, les vétérinaires peuvent aider les éleveurs en proposant un service d’« analyse de lait » au cabinet : analyse bactériologique, comptage cellulaire et recherche d’inhibiteurs.
Tout d’abord, avec une analyse bactériologique du lait, sous réserve que le prélèvement soit bien réalisé, le praticien peut établir un diagnostic précis pour les mammites cliniques et subcliniques, ainsi que pour un éventuel tarissement sélectif. Ce type de service est intéressant, car l’investissement est limité. En effet, hormis les consommables, seule une étuve est nécessaire. Deux solutions principales s’offrent alors au vétérinaire. Une des possibilités est le test VétoRapid, gélose avec trois compartiments de divers milieux permettant de révéler les agents pathogènes Gram négatif, streptocoques et staphylocoques, puis d’identifier plus précisément le germe responsable par colorimétrie. L’autre technique, la plus connue, dite des « 3 géloses », permet à l’aide de trois boîtes de milieux différents - COS, milieu non sélectif ; CNA, milieu sélectif Gram positif ; et Hektoën, milieu sélectif Gram négatif - et grâce à des analyses complémentaires simples d’identifier de façon très précise le germe responsable selon la croissance bactérienne sur les différents milieux. À la suite de cette identification, le praticien aura la possibilité, s’il le souhaite, de réaliser un antibiogramme. Cependant, quelle que soit la technique utilisée, le prélèvement sera considéré contaminé s’il y a plus de deux colonies distinctes sur les cultures. Personnellement, je trouve la méthode des 3 géloses moins subjectives, surtout vis-à-vis de la colorimétrie. De plus, pour les mammites subcliniques, la taille des compartiments du VétoRapid peut être trop petite, ce qui peut conduire à une « fausse stérilité ».
Par ailleurs, la réalisation de comptages cellulaires peut aussi être un service utile à développer pour les éleveurs. Le vétérinaire devra alors investir dans un compteur cellulaire de type DeLaval Cell Counter (DCC) par exemple. Celui-ci peut être utilisé pour un comptage cellulaire au cours des visites d’introduction ou pour identifier le quartier susceptible d’être infecté en cas de vache à comptage cellulaire somatique (CCS) élevé. Toutefois, cet outil ne doit en aucun cas être utilisé pour donner une valeur cellulaire sur un tank. Enfin, le praticien peut aussi proposer de réaliser des tests de recherche d’inhibiteurs (test IDEXX) dans les laboratoires des cliniques. Attention néanmoins aux éventuelles divergences avec les laiteries, qui peuvent ensuite engager la responsabilité du vétérinaire.
La pérennisation du service doit passer par une prise complète et précise des commémoratifs, un rendu précis et rapide des résultats et la mise en place, si besoin, d’un traitement adapté. En pratique, pour renforcer le lien avec l’éleveur, le contact téléphonique doit être privilégié. Il est néanmoins important d’y ajouter un compte rendu écrit envoyé par mail ou par courrier. La présence d’une feuille récapitulative de l’ensemble des analyses est fondamentale. Cette dernière permet, à tout moment et pour tous les membres de la structure, de savoir où en est l’analyse. Les services d’« analyse sur le lait », et surtout la bactériologie, apportent donc une plus-value indéniable aux structures vétérinaires, en tant que professionnel de santé publique et partenaire privilégié des éleveurs.