Conférence
FORMATION MIXTE
Auteur(s) : Clothilde Barde CONFÉRENCIER PHILIPPE VERDOOLAEGE (Morbihan), Commission vaches laitières de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) Article rédigé d’après la conférence présentée par lors du congrès de la SNGTV du 28 au 30 octobre 2020 à Poitiers.
Le stress thermique (incapacité à évacuer la chaleur produite par l’organisme en vue de maintenir l’équilibre thermique 1) est l’un des principaux facteurs qui affecte négativement la production laitière, le comportement, la santé et le bien-être des vaches laitières. Crée par un déséquilibre entre les facteurs environnementaux et la température corporelle des vaches au repos, il accentue le déficit énergétique, diminue la production laitière ainsi que les capacités reproductives des animaux, ce qui entraine des pertes économiques en élevage. Or, comme il existe un lien entre l’augmentation de la production laitière et la production de chaleur, les vaches à fort potentiel génétique seront toujours les plus sensibles aux effets négatifs du stress thermique. Dans le contexte actuel de réchauffement climatique, il est donc important de bien comprendre le mécanisme en cause afin d’améliorer la production, les performances de reproduction ainsi que le bien-être des animaux en cas de fortes chaleurs.
Plusieurs critères d’évaluation
Pour cela, des travaux portant sur l’indice température-humidité (THI), indice qui permet d’estimer la sensation de confort ou d’inconfort thermique des vaches laitières, ont été effectués. Selon les résultats obtenus, il semblerait que dans les climats tempérés le stress thermique diminue la production laitière journalière de 20% quand les valeurs de THI passent de 68 au printemps à 78 en été. De plus, pour chaque point supplémentaire ajouté à la valeur du THI au-dessus de 69, on peut constater une baisse de 0,4 kg de lait par vache et par jour. Un score d’halètement, échelle qui utilise le comportement et la fréquence respiratoire 2, a également été proposé pour aider les éleveurs à évaluer et à gérer le stress thermique. Ses manifestations en termes de reproduction sont nombreuses. En effet, on observe une baisse des performances de reproduction ainsi qu'une perturbation de la saisonnalité des vêlages, une diminution de la libido et de l’expression des chaleurs, de la fertilité (jusqu’à un mois après l’épisode de stress thermique) et de la survie embryonnaire. Les vêlages prématurés sont également plus nombreux avec la naissance de veaux plus légers et la fréquence des rétentions placentaires, des métrites et de la mortalité des veaux est augmentée. A cet égard, le stress thermique est aujourd’hui considéré comme l'un des facteurs principaux à l’origine du faible taux de fertilité observé sur les vaches inséminées durant les mois d’été 3.
Une origine hormonale
Par ailleurs, des travaux ont permis de comprendre les mécanismes biologiques à l’origine de l’effet délétère du stress thermique sur la reproduction, soit la réduction de la matière sèche ingérée (MSI), la présence d'un bilan énergétique négatif et de perturbations endocriniennes. Ainsi, par exemple, en ce qui concerne le développement des follicules ovariens, comme il prend un temps relativement long (autour de 180 jours), cela explique comment une phase d’hyperthermie à des stades précoces (durant les 10 jours avant l’œstrus) peut conduire à une baisse de fertilité avec des perturbations de la production d’inhibine, d’oestradiol et de progestérone à des stades ultérieurs du développement . La régulation hormonale du cycle ovarien est également sensible au stress thermique. La production de prostaglandines et les concentrations en œstradiol plasmatique sont en effet inhibées par les glucocorticoïdes . De même, les glucocorticoïdes limitent le comportement de chaleurs (intensité et durée) induit par l’œstradiol.
Des conséquences sur le long terme
De plus, la compétence de l’ovocyte (capacité à maturer, à féconder avec succès et à poursuivre le développement embryonnaire) est globalement diminuée en cas de stress thermique car il entraine des modifications morphologiques des cellules, un stress oxydatif, une fragmentation du noyau et des dysfonctionnements au niveau des mitochondries. Ensuite, l’embryon est également soumis au stress thermique même si sa sensibilité décroit à mesure que le stade de gestation avance. L’une des principales causes de mortalité embryonnaire est alors l’insuffisance de développement du corps jaune et de sa production de progestérone car il produit alors moins de progestérone. Cela va compromettre le développement du follicule, la maturation de l’ovocyte et ainsi augmenter le risque de mortalité embryonnaire précoce. Enfin, à long terme, le stress thermique en fin de gestation peut également avoir un impact négatif sur la future production de la génisse naissante.
Vers plus de prévention ?
Face à cette réponse physiologique des animaux, diverses solutions ont alors été proposées aux éleveurs pour réduire le stress thermique. Ainsi, les animaux doivent bénéficier d'un accès libre à l’eau, de zones d’ombres naturelles ou artificielles, de ventilateurs et/ou brumisateurs mais l'éleveur peut également agir sur l'alimentation (niveau NDF, inclusion de matières grasses, apport de levures, augmentation de la teneur en potassium, apport de sodium (sous forme carbonate) et de magnésium en augmentant la fréquence des repas ou en les distribuant préférentiellement tôt le matin ou tard le soir.