ENV
ANALYSE GENERALE
Auteur(s) : Par Chantal Béraud
Comment les étudiants des écoles nationales vétérinaires ont-ils suivi leur enseignement dans le contexte de la crise sanitaire du Covid-19 ? Retours d’expérience à l’École nationale vétérinaire d’Alfort et sur le campus de Lyon.
Retour… chez les parents ! En 2020, durant la période stricte du premier confinement, les étudiants de l’école nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA) avaient le droit de rester dans les logements du campus, mais la très grande majorité est repartie vivre dans leur famille. De même, en l’espace d’un week-end, l’enseignement de VetAgro Sup (campus de Lyon) a basculé du réel au distanciel. Comment cette numérisation s’est-elle effectuée aussi vite ? « Il y a eu beaucoup d’entraide interne entre les enseignants : ceux qui savaient déjà faire ont appris aux autres, commente Henry Chateau, directeur des formations à l’ENVA. Heureusement aussi, une partie de notre enseignement était déjà digitalisée. La pandémie nous a obligés à poursuivre dans ce sens. Ainsi, sur notre plateforme, outre de la documentation, se trouvent désormais des questionnaires numériques d’autoévaluation, des capsules vidéo explicatives de certaines parties de cours, etc. Nous avons également organisé pour les TD des visioconférences interactives où l’enseignant interroge les étudiants, avec une réponse en ligne individualisée pour chacun d’entre eux. »
Des réussites et des limites
« Au final, convertir des cours magistraux à distance est assez facile. Nous allons d’ailleurs pérenniser certains outils. Ainsi, les étudiants pourront continuer à avoir accès à une banque extranet de vidéos. Et les quatre écoles vétérinaires pourront, sans doute, dans le futur mutualiser certains cours, avec un seul enseignant à distance », analyse Henry Chateau. De même, selon Luc Mounier, directeur des formations à VetAgro Sup, « la plateforme pédagogique est intéressante, notamment parce que chaque étudiant en s’y connectant travaille à son propre rythme. Et nous prévoyons de pérenniser certains examens en ligne, mais en présentiel dans les amphithéâtres, afin de limiter les risques de fraude. » Sur du long terme cependant, visionner des écrans est fatigant et facilite les risques de décrochages. Sans contact réel en face-à-face, il est plus difficile pour les enseignants de se rendre compte de qui a des difficultés ou non. En outre, ils ont parfois eu le sentiment de parler dans le vide. « Même les professeurs avaient envie de revoir nos têtes ! », confirme avec amusement Kévin Contart, représentant de la promotion de troisième année et élu au conseil des études et de la vie étudiante (Ceve) de VetAgro Sup.
Jongler avec les plannings et les amphithéâtres
Concernant l’enseignement pratique, il est évidemment indispensable de demeurer aux côtés du propriétaire et de l’animal ! « Dès la fin du confinement strict, indique Luc Mounier, les cliniques sont restées ouvertes aux étudiants de quatrième et cinquième années sur la base du volontariat. En revanche, les stages à l’extérieur n’ont pu repartir qu’en mai juin. Mais en novembre 2020, l’école n’a pas fermé : nous avons maintenu les cliniques, les TP et TD en présentiel, avec une jauge de 50 % des étudiants sur le site. » « En définitive, conclut Kévin Contart, certains étudiants ont perdu près de deux mois de clinique durant la première période de confinement. Ils ne jouent heureusement pas tout leur diplôme sur cette seule période : c’est rattrapable. » « Dès la fin du premier confinement strict, nos quatrième et cinquième années ont repris par petit groupe les cliniques au sein de l’hôpital universitaire, explique Henry Chateau. Pour le second confinement, on a également fait revenir les premières années sur site par groupe de 40, pour les TP et les TD, car ils s’étaient à peine vus depuis leur entrée à l’école ! C’est pourquoi on les a considérés eux aussi comme étant prioritaires. En jonglant avec les tailles des différents amphithéâtres, tout cela a fini par s’organiser. Mais les plannings étaient épuisants à imaginer. » Quant aux deuxième et troisième années, ils ont bénéficié autant que possible d’une organisation hybride, avec une partie des étudiants en présentiel, et l’autre partie suivant le même cours à distance.
Quid de la rentrée 2021
Tous n’ont cependant qu’un espoir en tête : renouer pour cette rentrée 2021 avec l’enseignement en présentiel, autant que possible ! « Cette expérience liée au Covid-19, on s’en serait bien passé, conclut Kévin Contart. Heureusement, notre campus est verdoyant, le cadre est dynamique, et nous sommes dans une ambiance plutôt familiale. Mais, franchement, dans d’autres facs plus grandes et plus urbaines, je ne sais pas comment les étudiants ont tenu. »
« C’est le manque de vie sociale qui pèse le plus »
« Être toujours seul devant un écran était lassant pour les enseignants comme pour les étudiants. Tant à Maisons-Alfort qu’au campus de Lyon, le lien avec les étudiants s’est maintenu grâce au soutien actif de leurs responsables de promotion. Sur ces deux lieux, les restrictions imposées ont cependant été vécues comme des pertes de liberté majeures, avec parfois pas mal de baisse de moral, indique Kévin Contart, représentant des élèves à VetAgro Sup. C’est surtout durant l’hiver 2020 qu’on avait l’impression de ne pas voir le bout du tunnel. Et sans sortir, on n’avait plus rien à se raconter. »
« Personne n’a été laissé sans aide »
« Pour conserver du lien social, on a maintenu les activités extérieures tant qu’on a pu. Comme le rugby sans placage, en suivant les consignes des fédérations sportives, affirme Jeanne-Marie Bonnet-Garin, directrice générale par intérim de VetAgro Sup. Du côté financier, les étudiants ont pu accéder à des aides de la métropole de Lyon et de la contribution à la vie étudiante et de campus (CVEC). Des ordinateurs, des abonnements ou des cartes SIM ont été distribués. Je pense que personne n’a été laissé sans aide : réagir vite, trouver des solutions, avoir de la résilience fait heureusement partie de l’ADN des vétérinaires. »