Maîtrise durable du parasitisme à la mise à l’herbe  - La Semaine Vétérinaire n° 1912 du 17/09/2021
La Semaine Vétérinaire n° 1912 du 17/09/2021

Bovins

FORMATION MIXTE

Auteur(s) : Clothilde Barde

CONFÉRENCIER

PHILIPPE CAMUSET, commission parasitologie de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) 

Article rédigé d’après la conférence présentée lors du congrès de la SNGTV du 28 au 30 octobre 2020 à Poitiers.

Ce texte est le premier d’une série de deux articles.

Les animaux d’élevage peuvent être atteints gravement lors d’affections parasitaires car les conditions d’élevage ont changé en un laps de temps trop court pour que les hôtes et les parasites puissent s’y adapter. Dans des conditions de pâturage très extensif, pour que la rencontre hôte-parasite puisse avoir lieu, les parasites ont développé des stratégies de prolificité, de survie dans l’hôte et le milieu extérieur ainsi que de modulation de la réaction immunitaire de l'animal parasité. De plus, même si les différents antiparasitaires découverts (benzimidazoles, lactones macrocycliques) ont permis de maîtriser les infestations parasitaires, ils ont un impact environnemental. C'est pourquoi il semblerait que raisonner les traitements en tenant compte de la biologie, de l’épidémiologie, mais aussi des santés animale, végétale et humaine (One Health) soit devenu incontournable. À cet égard, le conférencier a détaillé les protocoles de maîtrise médicale de l’infestation parasitaire envisageables à la mise à l’herbe selon le type de parasite.

Prévention des strongles digestifs

Concernant les strongles digestifs, l’immunité ne se met en place que progressivement, rendant les jeunes animaux vulnérables aux primo-infestations. Si l'on considère que, pour les strongles intestinaux, l’immunité est totalement acquise après une saison de pâturage, pour Ostertagia, il faut deux saisons pour qu'elle soit totale. Toutefois, le conférencier estime que l’immunité commence à être performante après cinq à huit mois de primo-infestation et qu'elle dépend de la durée et de l'intensité de l'infestation. Par conséquent, au moins pour la première saison de pâture en élevage laitier, voire la seconde en élevage allaitant, les jeunes bovins peuvent rester permissifs à l’infestation par les strongles digestifs et, étant donné la prolificité des parasites, les conditions de pâturage, la contamination initiale des parcelles et les conditions climatiques, les générations parasitaires se succèdent pendant la saison de pâturage. Comme en témoignent certaines études menées en France, les lots témoins, en première année de pâture et non traités, ont subi des manifestations cliniques ou subcliniques dans 100 % des cas. Ces résultats soulignent l’importance de mettre en place une gestion raisonnée et quasi systématique des strongyloses gastro-intestinales, a minima en première année de pâture. L’objectif de la prévention antiparasitaire est d’éviter les pertes zootechniques tout en permettant un contact parasitaire de nature à générer une immunité suffisante. Pour cela, il est nécessaire d'autoriser un contact parasitaire suffisant en saison de pâture. La contamination résiduelle sur les parcelles pâturées devenant quasi nulle à partir du mois de juillet, il importe que la fin de la prévention antiparasitaire ne dépasse pas cette période car, en deuxième partie d’été, les animaux peuvent ainsi s’infester et un faible challenge parasitaire, à condition qu’il soit durable, permet l’acquisition de l’immunité. Actuellement, il existe des formulations injectables et pour-on d’ivermectine et d’éprinomectine (4 semaines d’activité), de doramectine et de moxidectine (5 semaines d’activité), un diffuseur continu de lévamisole (3 mois d’activité), une formulation injectable longue action de moxidectine et un diffuseur à libération séquentielle d’oxfendazole (4 mois d’activité pour les deux dernières formulations). 

Prévention de la dictyocaulose et de la paramphistomose

En ce qui concerne la dictyocaulose, les bovins porteurs latents sont considérés comme omniprésents dans les troupeaux européens. Ces individus excrètent des larves dans les fèces à partir de la fin de l’hiver et, généralement, jusqu’à la fin du printemps. L’amplification de la contamination se fait, à partir de la mise à l’herbe, par les individus dont les compétences immunitaires sont les moins accomplies, primipares essentiellement. Par conséquent, il est recommandé dans certaines situations critiques la mise en place d’un traitement, globalement six à huit semaines après la mise à l’herbe, avec de préférence une lactone macrocyclique en raison de la rémanence de cette famille d’antiparasitaires. Pour les vaches laitières en lactation, seule l’éprinomectine est toutefois utilisable. Toutefois, ce type de mesure a un impact environnemental fort et il ne faudra y avoir recours qu’en cas d’extrême nécessité. Pour la paramphistomose, l’impact pathogène de Calicophoron daubneyi provient de la migration rétrograde et grégaire des formes immatures qui s'avère plus importante lors de l'ingestion de grosses quantités de métacercaires –étés secs ou quand les animaux pâturent de façon intensive les zones restées humides et luxuriantes. Or, les bovins étant les hôtes quasi exclusifs de Calicophoron daubneyi, le traitement médical pourra réduire la contamination de l’environnement et, pour que celui-ci soit optimal, il sera effectué à distance de la rentrée à l’étable. En pratique, lorsqu'à la coproscopie l'excrétion moyenne est supérieure à 100 opg, l'éleveur pourra traiter à l’oxyclozanide à partir de mi-février. Les posologies utilisables sont 10,2 ou 15,3 mg/kg avec une efficacité supérieure mais aussi des effets secondaires plus accusés pour la posologie la plus élevée. Enfin, la gestion de la dicrocoeliose procède du même raisonnement que pour la paramphistomose.