Profession
ANALYSE GENERALE
Auteur(s) : Par Bénédicte Iturria
Plus que jamais, le Royaume-Uni fait face à des difficultés de recrutement de vétérinaires et de personnels infirmiers diplômés. Jusqu’à présent, ce manque de professionnels était comblé par l’arrivée de praticiens européens, mais le Brexit et la crise du Covid ont changé la donne.
L’année dernière, le Royal College of Veterinary Surgeons (RCVS) a déclaré que la profession vétérinaire britannique faisait face à une pénurie de main-d’œuvre estimée entre 11 % et 13 %. Ce calcul est basé sur un taux de vacance de postes à pourvoir fourni par les grands employeurs vétérinaires. D’autres chiffres publiés par le RCVS montrent que durant l’année 2020, seuls 740 vétérinaires de l’Union européenne (UE) ont été enregistrés au Royaume-Uni contre 1 132 en 2019 et 1 195 en 2018, soit une baisse significative. Le mois de mai 2021 s’est avéré le pire mois en près d’une décennie, avec seulement 15 nouveaux vétérinaires enregistrés contre 33 en mai 2020 et 69 en mai 2019.
Interrogée par Vet Times, la vétérinaire Laura Playforth, directrice des normes professionnelles chez Vets Now, un groupe de soins d’urgence, s’est exprimée sur la pénurie et la pression exercée sur les structures. En cause notamment l’augmentation du nombre de propriétaires d’animaux de compagnie depuis le début de la crise sanitaire : au Royaume-Uni, il n’y a « tout simplement pas assez » de vétérinaires et de personnel infirmier. Selon la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (RSPCA), durant le confinement, le nombre de recherches en ligne de chiots a été multiplié par plus de six. Les cliniques, déjà souvent en sous-effectifs, ont du mal à faire face au nombre croissant de chiots nécessitant vaccinations, contrôles de santé et traitements. Vicky Bridges, directrice régionale du réseau de cliniques My Family Vets, a expliqué qu’en raison d’une pénurie de rendez-vous disponibles, il est demandé aux propriétaires d’animaux de reporter leur visite si cela est possible afin de prioriser les consultations qui ne peuvent attendre.
Des incivilités croissantes
L’impossibilité de satisfaire entièrement les propriétaires a pour conséquence une augmentation des incivilités. Les réceptionnistes du cabinet de Lisa Price sont victimes presque quotidiennement d’abus verbaux de la part des propriétaires d’animaux. « Nous avons retrouvé des membres du personnel en larmes suite à des appels téléphoniques agressifs, lorsque quelqu’un demande une consultation et qu’on lui explique pourquoi il n’est pas possible de le recevoir tout de suite. Nous faisons de notre mieux pour voir des animaux qui ont un besoin urgent », a expliqué le vétérinaire du cabinet.
Le 19 août dernier, le président de la British Veterinary Association (BVA) James Russell s’est exprimé sur BBC Radio 5 Live pour sensibiliser le public au mal-être des vétérinaires britanniques et expliquer les raisons de la pénurie de personnel.
Pour pallier le manque de professionnels, la BVA a insisté sur la nécessité de former plus d’étudiants vétérinaires. Le Royaume-Uni compte actuellement dix écoles vétérinaires, et de nouvelles devraient ouvrir bientôt – un projet est notamment à l'étude en Irlande du Nord. Concernant les vétérinaires européens, le président de la branche galloise de la BVA, Collin Willson considère que le Royaume-Uni a « également traditionnellement importé beaucoup de vétérinaires d’Europe et d’autres pays, et actuellement les exigences en matière de visa s’avèrent très, très problématiques pour ceux qui essaient de faire venir des gens dans ce pays. Le gouvernement britannique a ajouté des vétérinaires à sa liste de professions en pénurie. » Cette démarche devrait selon lui permettre aux employeurs de recruter plus facilement des vétérinaires à l’étranger.