FORMATION MIXTE
Auteur(s) : Clothilde Barde
Article rédigé suite à la conférence donnée par Christophe Hugnet (vétérinaire (26)) lors des Journées nationales des groupements techniques vétérinaires (JNGTV) qui se sont tenues à Tours du 20 au 22 octobre 2021.
Les praticiens ruraux n’ont actuellement accès à aucun traitement antibiotique utilisable par voie oculaire avec AMM pour les bovins, ovins, caprins et porcins. En effet, seul l’ophtocycline, médicament qui possède une AMM pour les chevaux, avec un délai d’attente viande et abats de 1 jour, est disponible sur le marché actuellement. Le prescripteur doit donc envisager le recours à des médicaments vétérinaires suivant le principe de la cascade (voir encadré). Ces traitements doivent en outre être composés de substances disposant d’une LMR (viande ou lait) permettant leur utilisation chez les espèces de rente. Le choix peut donc se porter sur des médicaments vétérinaires dont l’AMM prévoit une utilisation ophtalmologique destinée à une autre espèce animale, à condition que les substances utilisées aient bien une LMR définie : Ophtocycline® (chlortétracycline), Fradexam® collyre ou pommade (framycétine et dexaméthasone), Ophtalkan® (néomycine) et Soligental® (gentamicine). Il est également possible de prescrire des médicaments destinés aux bovins ayant une autre indication. Ainsi, toutes les pommades intra-mammaires sont utilisables in situ sur la cornée.
Une utilisation hors AMM réglementée
Comme l’a indiqué le conférencier, pour une utilisation hors AMM quelle que soit la spécialité retenue, il conviendra d’appliquer les délais d’attente forfaitaire (a minima 7 jours pour le lait et 28 jours pour la viande). Tous les médicaments vétérinaires autres que ceux cités précédemment ayant une AMM pour une utilisation ophtalmologique dans d’autres espèces que les bovins mais sans LMR définie pour leur substance (Omnicol® collyre, Tévémyxine® collyre ou pommade et acide fusidique) ne peuvent donc pas être utilisés. Par ailleurs, l’utilisation de médicaments comme l’Ophtalon®, qui contiennent du chloramphénicol, une substance interdite pour les animaux de rente 1, conduit à l’euthanasie de l’animal et à son équarrissage. En effet, le règlement délégué2 vise à faire cesser les pratiques illégales et ce même lorsqu’il est avéré qu’il n’y a aucun risque de santé publique (résultats d’analyses inférieurs à la LMR). Selon ce dernier, outre l’abattage et l’élimination, l’opérateur doit déclarer toutes les carcasses rendues impropres à la consommation humaine par cette médication illicite ainsi que les produits concernés.
Des infractions et des sanctions diverses
Il convient aux vétérinaires prescripteurs de prendre garde car ils peuvent être sanctionnés pour une prescription non conforme, la délivrance irrégulière d’un médicament relevant des listes I et II ou classé comme stupéfiant ou substance vénéneuse3 ainsi que pour la rédaction non conforme d’une prescription par un professionnel de santé. Ces infractions peuvent conduire à une amende et une peine d’emprisonnement. Les praticiens risquent également une interdiction temporaire ou définitive d’exercer, ainsi qu’une confiscation des produits. Par ailleurs, une plainte, ou un signalement, peut être déposée au CROV par le Préfet et conduire à une enquête disciplinaire.
Principe de la cascade
La cascade1 doit amener à préférer les médicaments les mieux évalués dans l’indication envisagée. Le praticien doit d’abord utiliser les médicaments disponibles avec une autorisation de mise sur le marché (AMM) vétérinaire dans une autre espèce, puis les médicaments humains ou les médicaments avec une AMM vétérinaire dans un autre État européen sous réserve d’avoir obtenu l’autorisation d’importation de l’Agence nationale du médicament vétérinaire et, en dernier recours, des médicaments sans AMM, les autovaccins et les préparations extemporanées.
Les temps d’attente forfaitaire (7 jours au minimum dans le lait et les œufs et 28 jours dans la viande) s’appliquent obligatoirement en l’absence de temps d’attente dans l’espèce et éventuellement, à titre volontaire, aux augmentations de dose ou de durée dans la même espèce (sans que cela constitue une obligation légale).
Les médicaments sans aucune limite maximale des résidus (LMR) sont interdits d’usage (et donc de prescription) en productions animales.