Approche des maladies infectieuses : des prérequis - La Semaine Vétérinaire n° 1932 du 15/02/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1932 du 15/02/2022

Médecine interne

FORMATION MIXTE

Auteur(s) : Marine Neveux

D’après l’intervention de Jean-Luc Cadoré, dipl. ECVIM-CA, PhD, HDR, professeur à VetAgro-Sup, sur les fièvres isolées présentée le 25 novembre 2021 lors des 6es rencontres du Respe (réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine) à Caen (Calvados).

Comme l’a rappelé le professeur Jean-Luc Cadoré en préambule de ses interventions sur les fièvres chez le cheval, certains prérequis sont utiles pour aborder les maladies infectieuses. Il rappelle notamment la nécessité de faire la différence entre infection et expression clinique de l’infection, ce qui est fondamental car de cette notion va découler la définition même d’une maladie, et la déduction de ses manifestations. Au-delà, cela va permettre d’identifier éventuellement les différentes formes cliniques.

Pour établir un diagnostic, il est important de s’intéresser aux contextes épidémiologique et clinique sur lesquels les vétérinaires vont tout d’abord s’appuyer. La connaissance de l’épidémiologie et de la répartition géographique de l’infection et les données sur la présence de pathogènes peuvent permettre d’expliquer l’incidence et la prévalence des formes cliniques des infections.

En outre, il convient de garder à l’esprit que des agents pathogènes peuvent avoir une pathogénicité différente en fonction de leur évolution et selon les périodes.

Enfin, il faut considérer que l’intervention se fait soit en médecine individuelle, soit en médecine collective, et l’attitude par rapport à la détection d’une fièvre isolée peut alors être différente.

La pathogénicité est la capacité d’un pathogène à rendre malade. Elle est variable en fonction de l’agent pathogène et d’un certain nombre de facteurs, dont la situation géographique. De plus, à partir du moment où un pathogène est présent dans un organisme, il faut encore établir une relation stricte entre ce pathogène et l’infection, et ainsi potentiellement confirmer l’expression clinique de la contamination. Cette relation de cause à effet n’est pas toujours facile à démontrer.

La connaissance de la pathogénie, c’est-à-dire comment un pathogène rend malade et agit sur l’organisme, est fondamentale car cela permet d’expliquer l’expression clinique des symptômes.

La relation entre un traitement administré et l’amélioration clinique ne fait pas la preuve de l’efficacité thérapeutique de la molécule utilisée, rappelle Jean-Luc Cadoré.

Il convient également de rester prudent face à l’interprétation d’un test sérologique. Ce dernier révèle que l’organisme a rencontré ce pathogène, mais cela ne veut pas dire que l’individu est malade à cet instant précis.

De même, un résultat de PCR doit être interprété avec prudence. La PCR amplifie un morceau de génome. Un résultat positif signe l’amplification de ce bout de génome, mais ne veut pas dire que l’intégralité du pathogène existe dans l’organisme. À l’inverse, un test négatif ne signifie pas une absence totale du génome du pathogène.

Enfin, en fonction des connaissances épidémiologiques, un surdiagnostic peut être fait de certaines infections et maladies en période épizootique. Ces dernières sont parfois amenées à être sous-estimées. Il faut donc faire preuve de prudence et ne pas céder à la facilité en posant des diagnostics refuges.

Le professeur Jean-Luc Cadoré attire la vigilance sur les biais potentiels :

- Le biais de non-connaissance d’une maladie ou d’une infection chez un cheval qui aurait pu voyager et pu contracter quelque chose ailleurs.

- Le biais de préjugé : par exemple, tout cheval qui présente une hyperthermie et urine foncé est atteint de babésiose, alors qu’il peut exprimer une autre infection hémolysante.

- Le biais de motivation qui consiste à vouloir reconnaître une maladie précise, à l’image de l’évocation fréquente de la borréliose face à des affections articulaires.