Les coccidioses chez la poule : les prévenir et les traiter - La Semaine Vétérinaire n° 1933 du 22/02/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1933 du 22/02/2022

Maladies aviaires

FORMATION MIXTE

Auteur(s) : Karim Adjou, professeur de pathologie des animaux de production à l’École nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA)

En raison des conditions d’élevage des poules (densité, bâtiment) et de la résistance des oocystes dans l’environnement, l’éradication des coccidioses n’est pas possible, ni même souhaitable. La lutte s’inscrit surtout dans une approche préventive, avec l’objectif de réduire la pression parasitaire dans l’élevage afin d’éviter des répercussions cliniques et leurs conséquences économiques, tout en garantissant le maintien d’un niveau minimum d’immunité au sein d’un lot.

Les programmes de prophylaxie reposent sur des mesures d’hygiène et de désinfection, ainsi que sur la vaccination. En cas de formes cliniques, des traitements sont possibles : ils permettront à la fois de soigner les animaux malades et d’éviter la contamination excessive de l’environnement.

Il existe 2 types de vaccins, les vaccins vivants virulents et les vaccins vivants atténués (des souches sauvages d’espèces Eimeria peu virulentes ou atténuées – E. acervulina, E. maxima et E. tenella – sont couramment utilisées). Les deux sont limités à un usage chez la poule pondeuse. Dans l’Union européenne, seuls les vaccins atténués sont autorisés.

Les vaccins commercialisés sont constitués de souches dites « précoces » de différentes espèces d’Eimeria spp. Elles ont la particularité de se différencier rapidement en gamontes mâles ou femelles, après un faible nombre de cycles de division asexuée (schizogonie). Les cycles parasitaires peuvent donc s’opérer et générer une réponse immunitaire locale sans occasionner de lésions significatives de la muqueuse digestive. Ces souches perdent ainsi leur pathogénicité mais gardent toujours leur pouvoir immunogène.

Trois vaccins sont actuellement disponibles :

- Le Paracox-8® constitué de 8 souches d’Eimeria spp est destiné aux oiseaux à longue vie (reproducteurs, poules pondeuses et poulets labels).

- Le Paracox-5® est réservé plutôt au poulet de chair. Ce dernier est plus facilement disponible et moins onéreux que le Paracox-8®, mais encore d’un coût nettement supérieur à la chimio prévention. Ce vaccin représente une alternative intéressante pour une production de poulet de chair sans anticoccidiens, sans changement d’aliment (période de retrait) et sans problème de résistance.

- Le Livacox® est un vaccin destiné aux poules pondeuses contenant des oocystes sporulés vivants de E. acervulina, E. maxima, E. tenella et E. necatrix.

Le contrôle de la coccidiose doit aussi s’appuyer sur des méthodes prophylactiques plus classiques relatives à une bonne gestion hygiénique des élevages :

- Limitation des visites et utilisation de bottes et vêtements propres pour éviter l’introduction des coccidies.

- Nettoyage et désinfection du poulailler pour contrôler la pression parasitaire.

- Utilisation d’une litière épaisse pour limiter le contact entre les oiseaux et les coccidies.

Un suivi sanitaire des volatiles par un vétérinaire est également central car les coccidies sont des parasites opportunistes qui profitent de l’affaiblissement des poules pour les infecter.

Enfin, plusieurs molécules anticoccidiennes complètent l’arsenal de lutte. Deux types d’anticoccidiens sont possibles. Les coccidiostatiques perturbent la multiplication du parasite sans le tuer. Ils réduisent ou éliminent ainsi l’excrétion des oocystes dans les matières fécales, amenuisant ou empêchant la contamination par les oocystes de l’enclos ou de la cour. Ils sont généralement ajoutés à la nourriture à un pourcentage déterminé. Dans le cas des aliments médicamenteux achetés dans le commerce ou en coopérative, l’étiquette indiquera le coccidiostatique inclus et à quel niveau. Cependant, tous n’ont pas la même capacité à supprimer toutes les espèces d’Eimeria. Parmi eux, figurent les anticoccidiens chimiques – diclazuril, décoquinate, amprolium, robénédine – et les anticoccidiens ionophores – monensin, lasalocid, narasin, salinomycine… Les coccidiocides, quant à eux, vont tout simplement tuer le parasite à l’image du toltrazuril (Baycox®).

Les anticoccidiens répondent à deux réglementations différentes. Les coccidiocides, peu nombreux, ont le statut de médicaments vétérinaires, et donc une allégation thérapeutique. Ils peuvent ainsi être utilisés pour traiter les animaux malades. Le traitement ne sera cependant pas individuel mais concernera l’ensemble du lot puisque son administration se fait par l’eau de boisson. Les coccidiostatiques, eux, sont des additifs ajoutés à l’alimentation animale. Dans ce cadre, on peut parler de chimioprévention, étant donné qu’ils seront distribués à faible dose à tous les animaux d’élevage, quel que soit leur statut, pendant toute la période d’élevage (hors délai de retrait avant abattage).

Quel que soit le programme de prévention par anticoccidiens choisi, il est désormais indispensable d’y associer une surveillance des résistances aux produits.

Le cas des basses-cours

Il existe quelques mesures préventives simples à utiliser par tous les détenteurs de volailles de basse-cour pour réduire la présence de coccidies dans l’environnement et diminuer le risque d’infection de leurs poules :

- Contrôle de l’humidité dans le poulailler. Cette mesure est essentielle pour contenir de nombreuses maladies, pas seulement la coccidiose.

- Si cela est possible, déplacement périodique de l’enclos et du poulailler. Toute zone sur laquelle se trouve du fumier pendant de longues périodes finira par présenter une charge élevée de bactéries, de virus et de parasites tels que les coccidies. Déplacer les poules et laisser les zones précédemment utilisées au repos pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois réduira efficacement la charge des pathogènes.

- L’utilisation d’aliments contenant un coccidiostatique devrait prévenir les infections cliniques. Ceci est extrêmement important pendant les 4 à 6 premières semaines de la vie d’un poussin car son système immunitaire n’est pas encore complètement développé. L’immunité complète n’est pas atteinte chez les poulets avant l’âge de 7 semaines environ.

- La pratique d’une biosécurité effective. C’est un bon conseil, non seulement pour la coccidiose mais aussi pour toute maladie susceptible de menacer le poulailler.

À noter que très peu de médicaments sont disponibles pour les animaux de basse-cour du fait d’un conditionnement non adapté au traitement d’un lot de taille limité.

  • Cet article est le deuxième d’une série de deux articles1.
  • 1. Voir l’article pages 30 et 31 du numéro 1931 de La Semaine Vétérinaire