Métaphore écologique

L’écueil du cinéma animalier est souvent son commentaire. Explicatif, il condamne l’image à l’illustration et le spectateur à la passivité. A contrario, ce film sans voix off fait confiance à l’autonomie narrative du montage des images et des sons pour se donner les moyens de relever ce challenge. Tous les plans ont été documentés, scénarisés puis soigneusement storyboardés, comme un film de fiction, avant d’être tournés durant un an et demi en milieu naturel et en studio (pour les scènes souterraines) par Laurent Charbonnier, un de nos grands cinéastes animaliers. Luxe rare, l’étape décisive du montage s’est étalée sur 42 semaines. Le récit ainsi construit nous immerge, à l’écart des humains et au fil des saisons, dans l’écosystème d’un grand chêne décrit à travers la vie de ceux qui, comme dans un immeuble, en occupent les différents étages : un couple de geais, un écureuil, l’insolite balanin des glands (un coléoptère), des mulots… Le résultat est à la fois simple et magnifique, vivant et jamais mièvre, avec des scènes stupéfiantes (l’éclosion d’un cèpe, la course-poursuite entre les arbres d’un geai talonné par un autour des palombes) sans que le spectaculaire ne prenne le pas sur la narration. Un merveilleux outil pour donner la mesure des interdépendances naturelles.

• Le Chêne de Laurent Charbonnier et Michel Seydoux, France, 1h20, sortie le 23 février.