Maladies infectieuses
FORMATION MIXTE
Auteur(s) : Anne Couroucé D’après la conférence de Noah D. Cohen au congrès en ligne de l’IEIDC (International Equine Infectious Disease Congress) en 2021.
La rhodococcose est une maladie bactérienne due à une corynébactérie qui touche les poulains âgés de 15 jours à 8 mois, avec un pic entre 2 et 4 mois, et entraîne une pneumonie pyogranulomateuse (photo 1). La bactérie est virulente lorsqu’elle possède le facteur de virulence VapA. Dans les années 2000, le suivi des poulains par échographie thoracique (photo 2), permettant de mettre en évidence les abcès pulmonaires et d’établir un « score échographique » 1, est devenu plus systématique et a conduit à l’augmentation du nombre de poulains traités avec des antibiotiques. Pourtant, dans une étude sur 270 poulains menée dans une ferme où la maladie est endémique3, 80 % souffraient de consolidations pulmonaires plus ou moins importantes et 20 % ne présentaient aucune anomalie. Seulement 17 % avaient des signes cliniques alors que 63 % n’en présentaient pas. La différence s’est donc révélée très importante entre signes échographiques et signes cliniques, ce qui influe grandement sur la nécessité de traiter avec des antibiotiques ou non.
Les premières résistances sont apparues dans les années 1990 aux États-Unis avec 4 % de résistance aux macrolides et/ou à la rifampicine. Le risque de mortalité pour un poulain présentant une infection avec une bactérie résistante était 7 fois plus important que pour un poulain présentant une infection avec une bactérie sensible aux antibiotiques. La figure 1 montre l’augmentation très importante des résistances de R. equi aux antibiotiques depuis les années 2000. Or, c’est à partir de 2001 que les dépistages échographiques deviennent routiniers sur les poulains. Cette résistance est co-sélectionnée puisqu’elle existe tant pour les macrolides que pour la rifampicine.
Le sol d’élevages atteints a également été étudié. Il est apparu que 98 % des bactéries étaient résistantes aux macrolides et à la rifampicine et que 43 % d’entre elles étaient virulentes. Le nombre d’élevages présentant des résistances était corrélé avec le nombre de poulains traités avec des macrolides.
Pour étayer cette affirmation, une étude a été menée sur vingt élevages : dix pratiquant des dépistages échographiques réguliers sur les poulains et dix ne faisant pas d’échographies. Dans la première catégorie, 16 % des poulains étaient traités contre 6 % dans celle où il n’y avait pas de suivi.
Une résistance de R. equi à plusieurs antibiotiques a émergé aux États-Unis, avec une forte prévalence dans le Kentucky. Elle est également présente dans d’autres États et même d’autres pays. Ces bactéries résistantes sont porteuses de mutations erm (46) et rpoB qui surviennent sous la pression de sélection des macrolides et de la rifampicine. Il est à noter que ces bactéries sont également résistantes à d’autres antibiotiques comme les lincosamides, les tétracyclines et le chloramphénicol. Par ailleurs, la mutation pRErm (46) peut se transférer à des bactéries de l’environnement comme Actinobacteria. Ces souches de R. equi multirésistantes sont donc également un problème pour la santé humaine.
L’une des hypothèses de l’apparition de ces souches résistantes est la surutilisation d’antibiotiques probablement liée à l’amélioration des méthodes diagnostiques et surtout au suivi échographique de ces poulains. Il est donc important de ne pas traiter tous les poulains présentant des lésions et ne présentant pas de signes cliniques mais bien de suivre l’évolution de ces lésions. En effet, l’échographie thoracique a une bonne sensibilité mais une spécificité limitée pour prédire quels poulains évolueront vers une manifestation clinique de la maladie. Les différents systèmes de notation qui ont été proposés2, 3 permettent néanmoins de suivre l’évolution de l’état de santé des poulains et de décider lesquels ont besoin (ou non) d’un traitement antibiotique.