Cursus vétérinaire privé
ANALYSE GENERALE
Auteur(s) : Tanit Halfon
Comment se passera le recrutement des étudiants de la première promotion vétérinaire d’UniLaSalle ? Auront-ils accès à des aides financières pour réduire le coût élevé des études ? Comment va s’organiser leur première année d’enseignement ? Caroline Boulocher, vétérinaire directrice du projet, répond à nos questions.
La première rentrée vétérinaire sur le campus de Rouen d’UniLaSalle est prévue pour septembre 2022. Le recrutement des étudiants se fera directement en post-bac, explique Caroline Boulocher, directrice du projet de cursus vétérinaire au sein de l’établissement.
À moins d’un mois de la clôture des inscriptions sur Parcoursup (le 29 mars, NDLR), comment comptez-vous recruter une promotion complète d’étudiants ?
Dans ces conditions, la question est de savoir si j’aurai une promotion suffisante d’étudiants d’excellent niveau académique et au profil requis. De fait, au lieu des 120 étudiants visés au départ, nous avons déplacé le curseur à 100, à raison de 96 issus de la filière générale et de 4 de la filière sciences et technologies de l’agronomie et du vivant (STAV). Si les dossiers reçus apparaissent de très bons niveaux, nous pourrons augmenter la taille de la promotion jusqu’à 120. Nous avons par ailleurs prévu des actions de communication au niveau des lycées, des radios locales, des réseaux sociaux….. Au 12 mars, huit jours après l’annonce de l’agrément provisoire, nous avons reçu 360 candidatures, ce qui est un joli score et très encourageant (le lundi 14 mars, le nombre de candidatures avait dépassé les 400, NDLR).
Comment va se passer concrètement le processus de sélection ?
Il se fera en deux étapes. D’abord, une première phase d’admissibilité via Parcoursup qui vise à juger des qualités académiques des étudiants. Pour cette étape, le lycéen a la possibilité d’associer à son dossier scolaire des documents annexes, notamment une lettre de motivation, ce qui comptera aussi dans nos critères de choix. La deuxième phase vise à évaluer les motivations réelles des candidats et leurs qualités intellectuelles et humaines. Tout l’enjeu de cette étape sera de détecter des profils de futurs étudiants qui se sentiront bien durant leurs études, et dans leur future profession. Il y aura d’une part des épreuves individuelles avec une première épreuve de communication pendant laquelle le lycéen va exposer oralement un argumentaire sur deux sujets que nous lui aurons préalablement indiqué afin qu’il puisse s’y préparer. Ici, l’objectif est de tester sa motivation intrinsèque, mais aussi sa vivacité d’esprit. Dans une 2e épreuve d’observation, l’étudiant sera mis en immersion dans une situation typiquement vétérinaire afin de tester son agilité intellectuelle et son esprit critique. Il y aura aussi un QCM afin de jauger la capacité des étudiants à analyser des données sans connaissances préalables. Enfin, une épreuve collective va permettre d’évaluer son comportement en groupe et sa capacité à travailler en équipe.
Pour ces épreuves, le jury sera mixte, avec des vétérinaires issus de notre équipe projet1 notamment, ainsi que des enseignants-chercheurs d’UniLaSalle. Tous seront formés pour ce recrutement par nos équipes d’ingénierie pédagogique. Il y a aussi un jury d’admission, qui est défini par décret2, ayant pour fonction d’émettre un avis sur les modalités des épreuves que l’on propose.
Quels sont vos leviers pour avoir des profils plus orientés vers les productions animales ?
Au niveau du recrutement, on ne peut pas sélectionner les étudiants selon des critères géographiques ou sociaux. On va jouer sur la communication : le réseau d’UniLaSalle nous permet en effet de communiquer largement vers des cibles intéressées par le monde agricole. Nous avons ouvert aussi le concours à la filière STAV et nous comptons sur un effet boule de neige dans les années à venir pour ouvrir davantage de places pour les lycéens issus de cette filière. Il faut que les candidats aient conscience, et que cela leur plaise, qu’il y aura beaucoup d’expériences en milieu rural durant le cursus et qu’en année d’approfondissement3, la filière clinique est soit animaux de production soit mixte.
Comment va s’organiser la première année de formation ?
Il s’agit d’une combinaison équilibrée entre des enseignements en sciences fondamentales classiques et spécifiques vétérinaires et de mise en pratique pour construire le socle de base des « compétences du premier jour ». Par exemple, il y aura un module sur la protection de l’animal et de l’environnement en association avec des visites sur le terrain dans des élevages, des refuges, des haras et des parcs animaliers. Cela permettra de préparer l’étudiant à quatre semaines de stage en exploitation (bovin, porcin ou aviaire) et à une semaine en collectivité animale (refuge ou parc animalier) durant cette première année. Pour débuter, nous avons également opté pour des enseignements en médecine factuelle et en sciences humaines et sociales afin d’aborder la psychologie générale ou la gestion des litiges, ainsi qu’en sciences de gestion pour l’exercice vétérinaire. À notre sens, il s’agit de disciplines aussi importantes que les autres pour être apte à pratiquer. Ce concept de fitness to practise est développé au Royaume-Uni. Tous les étudiants bénéficieront également d’enseignement d’une LV2.
En résumé, l’idée générale est d’exposer chaque étudiant le plus tôt possible à l’animal, et au monde rural, et de lui donner des outils afin qu’il se sente bien dans sa peau et dans sa future profession. À l’issue de cette première année, l’étudiant devra savoir ce qu’est un animal en bonne santé, en quoi consistent ses soins quotidiens et son environnement. Cette agilité pédagogique est permise par le fait qu’il s’agit d’une création de cursus.
Par ailleurs, nous réfléchissons déjà à l’accueil des nouveaux étudiants avec l’optique de donner un esprit de corps à la promotion vétérinaire qui bénéficiera d’un accueil par les élèves déjà en étude à Rouen.
Qu’en est-il du personnel encadrant ?
Nous sommes en train de finaliser les fiches de poste pour les premiers recrutements de vétérinaires enseignants. Nous avons également identifié des intervenants extérieurs qualifiés pour la mise en place de la 1re année. Nous avons déjà reçu une vingtaine de candidatures spontanées. D’ici 7 ans, notre objectif est de recruter 75 ETP vétérinaires. À noter qu’à UniLaSalle, plus de 75 % des enseignants ont un doctorat.
Ce cursus se distingue par des frais de scolarité très élevés : 91 500 € pour six années (13 000 € les trois premières années, puis 17 500 € les trois suivantes), contre 15 000 € environ pour les ENV (environ 2 500 € par an). De quels types d’aides disposeront les étudiants ? N’est-ce pas un facteur limitant ?
Étant donné que nous sommes sous contrat avec le ministère de l’Agriculture pour la formation vétérinaire, nos étudiants pourront bénéficier des bourses d’État. Par ailluers, UniLaSalle va octroyer huit bourses à raison de 75 % des frais de scolarité pour les 3 premières années (bourse au mérite seulement pour les lycéens ayant obtenu la mention TB au baccalauréat, NDLR). Il y a aussi des possibilités de prêts à taux zéro, sans dépôt de garantie, avec caution portée par l’école ainsi que de bourses et prêts spécifiques permis par le dispositif de mécénat que porte l’école4. À partir de la 4e année d’études, les étudiants pourront solliciter les collectivités territoriales dans le cadre du dispositif Ddadue. Enfin, en 6e année, les titulaires du certificat d’études fondamentales vétérinaires (CEFV) pourront assister un praticien en dehors de leur temps de présence scolaire obligatoire.
Former un vétérinaire coûte cher en raison d’un taux d’encadrement élevé et d’infrastructures spécifiques mais nous avons la volonté de contenir au maximum les frais de scolarité et de mettre en place une vraie politique d’accompagnement personnalisé des étudiants. Ils bénéficieront également d’un suivi académique fort, avec du coaching individualisé pendant le cursus s’ils rencontrent des difficultés dans certaines disciplines – c’est l’ADN du projet éducatif lassalien –, et du soutien pour leur projet professionnel avec notre centre des carrières. De plus, il y a de très belles opportunités professionnelles en tant que vétérinaire, avec des rémunérations attractives.
Quel est votre état d’esprit ?
C’est une grande fierté que d’avoir obtenu cet agrément, et aussi une grande responsabilité qui nous est confiée. Dans ce contexte, ma mission professionnelle reste la même (Caroline Boulocher est en disponibilité de son poste d’enseignant-chercheur HDR à VetAgro Sup, NDLR) : je suis au service des étudiants et de la profession vétérinaire. Je suis convaincue que l’enseignement en établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général (EESPIG) est complémentaire de l’existant, que je connais très bien, et que nos atouts respectifs sont des forces à mettre au service de la société, de la santé de l’homme et des animaux. Il faut maintenant apprendre à se connaître respectivement, respectueusement.