Erreur ou omission : votre expert-comptable est-il responsable ? - La Semaine Vétérinaire n° 1937 du 22/03/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1937 du 22/03/2022

Gestion

ENTREPRISE

Auteur(s) : Par Jacques Nadel

Une erreur ou une omission de son expert-comptable peut parfois coûter cher à l’entreprise. Sa responsabilité peut être engagée si elle entre dans le cadre de ses prestations fixées dans la lettre de mission.

Dans la gestion d’une clinique, l’expert-comptable doit être un véritable conseil du vétérinaire dirigeant, s’impliquant dans la vie de l’entreprise de son client. Mais cette personne de confiance n’est pas infaillible et peut commettre des erreurs ou faire des omissions, comme cela a été le cas dans une affaire jugée récemment.

Une société exploitant un restaurant, estimant ne pas avoir été informée par son expert-comptable de l’existence d’aides à l’embauche et en avoir été privée par sa faute, engage sa responsabilité contractuelle et lui demande des dommages-intérêts devant les tribunaux. La lettre de mission de l’expert-comptable a été le point central de l’analyse du juge.

Rappelant que la responsabilité civile de l’expert-comptable s’apprécie au regard de la mission qui lui a été confiée, la cour d’appel de Versailles, saisie de la plainte, relève que même si la mesure d’aide à l’embauche ne rentrait pas dans la catégorie des événements occasionnels prévue dans la lettre de mission, laquelle, signée en 2014, n’avait pu anticiper la survenance de la mesure d’aide à l’embauche proposée en 2016, le contenu du paragraphe intitulé « Votre bénéfice » devait être compris comme une conséquence directe du choix du client de retenir ses services. Le paragraphe en question engageait l’expert-comptable à veiller à ce que son client bénéficie d’économies potentielles. Par ailleurs, étant tenu d’une obligation de moyens concernant les aides à l’embauche envers son client, il aurait dû l’alerter de leur existence.

Ayant manqué à son devoir général de conseil et d’information, l’expert-comptable est débouté. Le juge considère que, sans son manquement, la société aurait pu bénéficier des aides à l’embauche et des possibilités d’économies proposées par la réglementation en vigueur, de sorte que l’absence de perception de ceux-ci constitue un préjudice réparable dans son intégralité. L’expert-comptable a été condamné à verser le montant perdu des aides concernées.

Dans une autre affaire, un expert-comptable a appliqué un taux de TVA erroné. Il a été déclaré responsable du préjudice subi par son client. En effet, dans sa lettre de mission, il était chargé de l’établissement des déclarations de TVA et des comptes annuels. Les contrôles qu’il devait réaliser auraient normalement permis d’éviter l’application de ce taux erroné, et le devoir de conseil et d’information lui incombant aurait dû le conduire à aviser son client du taux applicable. L’action en responsabilité a abouti et l’expert-comptable fautif a dû réparation à son client.

La lettre de mission doit donc être rédigée avec soins et la plus grande attention. Elle doit comporter un certain nombre de mentions : l’identification de l’entreprise et de l’expert-comptable, la description des prestations réalisées, les conditions générales de son intervention, les obligations respectives des différentes parties (indiquées dans une grille de répartition des tâches), le montant des honoraires ainsi que les modalités de règlement, ainsi que la procédure à suivre en cas de litige et de résiliation.

Pour agir en responsabilité contre un expert-comptable, les règles du droit commun prévoient un délai de 5 ans à compter du jour où la prestation litigieuse a été exécutée, ou aurait dû l’être, sauf si la lettre de mission impose un délai plus court. En effet, elle peut préciser que les demandes de l’entreprise en réparation des fautes de l’expert doivent être introduites dans les 3 mois après la date à laquelle elle a eu connaissance de son préjudice. Si le délai de forclusion n’est pas respecté par le client ayant accepté la lettre de mission (et ses annexes), l’expert ne sera alors tenu à aucune réparation.