NAC
ANALYSE CANINE
Auteur(s) : Par Tanit Halfon
Les signes cliniques sont classiques, et le traitement chirurgical apparaît de bon pronostic, rapporte une récente étude rétrospective.
Avec l’essor des nouveaux animaux de compagnie, les vétérinaires peuvent être amenés à être sollicités pour des questions sur une grande variété d’espèces animales : parmi elles, on trouve le porc. Comme le chat ou le chien, il peut être sujet à un classique : l’occlusion intestinale, rapporte une publication nord-américaine récente du Journal of Veterinary Internal Medicine. Cette étude rétrospective multicentrique1, a passé en revue les cas vus en consultation sur une période de sept ans, entre 2013 et 2019, dans quatre grands hôpitaux vétérinaires américains. Si seulement 17 cas ont été finalement inclus dans l’étude, toutes les données cliniques sur la médecine du porc de compagnie sont toujours bonnes à prendre étant donné la jeunesse de cette discipline.
Pour le diagnostic, le premier constat est que la présentation clinique est généralement classique. Anorexie ou hyporexie, tachypnée, tachycardie, vomissements, déshydratation, sont des signes cliniques communs chez les porcs de l’étude, en particulier tous les porcs étaient anorexiques ou hyporexiques. Quatre porcs présentaient des signes de colique (grincements de dents, spasmes abdominaux, apathie), quatre porcs avaient une palpation abdominale douloureuse.
La présence d’un corps étranger n’a pas été confirmée pour tous les porcs de l’étude par imagerie médicale, mais tous ont subi une laparotomie exploratrice l’ayant mis en évidence. L’épaisseur de la peau et le gras abdominal du porc réduit les chances de succès de l’échographie abdominale et un scanner serait utile, lorsque la radiographie et l’échographie ne permettent pas de poser le diagnostic.
Une chirurgie de bon pronostic
Au total, 19 corps étrangers ont été comptabilisés avec plusieurs localisations possibles : l’estomac (pour 9 objets), l’intestin grêle (8), le côlon (1) et le cæcum (1) Différents types d’objets ont été retrouvés : des noyaux de fruit en particulier de pêche (pour 6 cas), des morceaux de couche (3), de la mousse (2), des objets métalliques (2), des bézoards (2) et des fragments de verre (2). Dans un cas, le corps étranger a été retrouvé sous une forme linéaire, à plusieurs endroits. Quinze des porcs ont récupéré après l’intervention chirurgicale avec une durée d’hospitalisation moyenne de quatre jours (deux à huit jours) ; deux ont été euthanasiés du fait d’une péritonite, dont une sévère liée à une perforation duodénale sur un noyau de pêche. Cela équivaut à un taux de survie de 88 %, ce qui rejoint les données connues pour les chats et chiens. Trois porcs ont eu des complications : abcès cutané sur le site d’incision 30 jours après la chirurgie, traité par chirurgie ; contamination intra-abdominale traitée par antibiothérapie par voie veineuse ; constipation qui s’est résolue sans traitement.
Ces résultats montrent que le traitement chirurgical est de bon pronostic chez le porc de compagnie. Ils soulignent aussi que l’occlusion intestinale doit rentrer dans le diagnostic différentiel en plus de l’hypothèse de la constipation, face à un porc présentant vomissements, anorexie, absence de défécation ou léthargie.
Éclairage de Barbara Blanc (2011, Nantes), praticienne faune sauvage, captive et nouveaux animaux de loisirs à Faune Vet
L’occlusion par corps étranger est-elle une problématique fréquente chez le porc de compagnie ?
Jusqu’à présent, je n’ai pas eu de cas dans ma pratique. Mais je suppose que cela dépend des conditions de détention. Il y a probablement plus de risque si l’animal a accès au domicile du propriétaire, ce qui peut être le cas dans le contexte américain. Mais c’est vrai que les signes d’abattement, anorexie et absence de selles constituent les principaux motifs d’appel en consultation. Le cochon est un animal très sensible. Il n’est pas toujours évident de trouver la cause primaire des ralentissements de transit (pouvant aller jusqu’à des iléus paralytiques) mais la prise en charge médicale avec une analgésie adaptée est primordiale. Cela fonctionne généralement bien.
Peut-on envisager des examens d’imagerie médicale ?
Oui. Le gabarit et le comportement (animal nerveux avec vocalisations stridentes) de l’animal rendent complexe leur réalisation. Si le poids de l’animal dépend de sa race, je rappelle qu’un cochon vietnamien adulte pèse entre 60 et 80 kg lorsqu’il n’est pas en surpoids. Il est bien souvent nécessaire d’avoir recours à l’anesthésie voir la télé-anesthésie. Il faut être vigilant car en plus des particularités liées à l’anesthésie des suidés, il y a également de grandes variations intra-individuelles. À gabarit et à contexte d’anesthésie égaux, un même protocole anesthésique n’induira pas forcément les mêmes effets attendus. En termes d’imagerie médicale, il est possible d’avoir recours à la radiographie, le scanner, la fibroscopie. L’échographie abdominale est intéressante surtout pour le tractus urogénital, mais la quantité de gras de la cavité abdominale et le gaz contenu dans le tube digestif peut entraver la bonne réalisation de l’examen.
Que conseiller à un vétérinaire qui souhaiterait se former en médecine porcine ?
De faire de la bibliographie. Un bon support peut-être la consultation du site du refuge http://www.groingroin.org, reconnu pour sa solide compétence sur les suidés. On peut trouver sur le site des informations intéressantes sur l’alimentation, le comportement, les soins de bases etc. Cela permet aux praticiens de pouvoir fournir des recommandations utiles aux détenteurs de cochons.
Il faut bien avoir conscience que c’est une espèce délicate à gérer, nécessitant une infrastructure et du matériel adapté. Mais ces difficultés ne doivent pas décourager : la médicalisation d’un cochon de compagnie est tout à fait possible !