Fédération des vétérinaires d’Europe
ANALYSE GENERALE
Auteur(s) : Par Karin de Lange
La Fédération des vétérinaires d’Europe (FVE) a réuni près de 200 délégués européens à Londres pour son assemblée générale de juin. La guerre en Ukraine et la pénurie de vétérinaires ont notamment été l’objet de débats.
La présence et les témoignages de plusieurs collègues ukrainiens ont sans doute été le moment le plus poignant de l’assemblée générale. Oksana Rud, présidente de l’Association des vétérinaires d’Ukraine, s’est adressée à l’assistance dans un message vidéo bouleversant. Ayant perdu plusieurs membres de sa famille, des amis, sa maison, sa clinique, elle a décrit sa vie de personne déplacée en Ukraine depuis l’invasion russe. « Ma profession m’a aidée à survivre », a-t-elle souligné, ajoutant que « les collègues s’entraideront toujours ».
« Nous sommes touchés par la force et la résilience de nos confrères ukrainiens », a déclaré Nancy De Briyne, directrice exécutive de FVE. Elle a ensuite décrit les initiatives prises par la profession, dont le site web Vets for Ukraine1, mis en place quelques jours après le début de la guerre, pour aider à coordonner l’aide aux vétérinaires. La gratuité des soins pour les animaux de compagnie des réfugiés (jusqu’à 1 250 € par vétérinaire) a été rendue possible grâce à la collaboration avec la Humane Society International et la Fédération des associations européennes de vétérinaires d’animaux de compagnie (Fecava). Elle a également mis en garde contre la « fatigue de compassion ». Ou, selon les mots de la docteure Rud : « N’oubliez pas que nous avons une guerre ».
Outre la souffrance humaine et animale, le conflit provoque également une crise alimentaire mondiale, prévient Maurizio Ferri (Italie), membre du Mécanisme européen de préparation et de réaction à la crise de sécurité alimentaire (EFSCM). Il a souligné l’impact sur les pénuries alimentaires et d’autres risques associés à la guerre, dont le risque accru de maladies animales – notamment la peste porcine africaine, mais aussi l’influenza aviaire et la rage – un manque de biosécurité, avec un abattage et un commerce de viande largement incontrôlés.
Pénurie de vétérinaires
Un autre point important de l’ordre du jour a été le débat sur la pénurie de main-d’œuvre vétérinaire, qui s’avère un problème mondial. José Arce, président de l’association vétérinaire américaine (Avma), a décrit les diverses initiatives prises par son association, notamment une meilleure utilisation de la main-d’œuvre vétérinaire et un accent mis sur le bien-être des salariés et la gestion de la dette étudiante.
Enid Stiles et Trevor Lawson, s’exprimant au nom de l’Association canadienne des médecins vétérinaires, ont mis en avant « une éventuelle harmonisation des exigences européennes et canadiennes en matière d’accréditation, des incitations au retour des collègues travaillant à l’étranger, une augmentation du nombre d’étudiants vétérinaires et une campagne générale de mieux-être pour empêcher les collègues de quitter le lieu de travail ».
Bien qu’il n’existe pas de solution magique, Lizzie Lockett, directrice générale du Collège royal des chirurgiens vétérinaires (instance ordinale britannique), a déclaré que son organisation se concentrait sur le « recrutement et le bien-être » et avait mis en place des groupes de discussion pour analyser les obstacles. Un changement dans l’équilibre travail et vie personnelle et la culture du milieu de travail figuraient parmi les principaux objectifs identifiés.
Diverses causes du manque de main-d’œuvre ont été mises en avant, dont l’évolution des attentes professionnelles des jeunes diplômés. « La jeune génération semble avoir une perspective différente en ce qui concerne le besoin de mentorat, de soutien et d’équilibre travail et vie personnelle », a déclaré Mette Uldahl, vice-présidente de FVE. « Peut-être qu’il est temps de revoir notre propre point de vue ». Lors de l’assemblée générale (AG) de l’Union européenne des vétérinaires praticiens, tenu la veille, l’intervenant Alan Robinson (Vet Dynamics, GB) avait déjà observé que, même si « les affaires sont florissantes, les gens sont épuisés », signe que « le modèle d’entreprise actuel est fondamentalement vicié ».
Les chats et les chiens inclus dans la législation
Dans le domaine du bien-être animal, les prises de position sur les labels « bien-être animal » et sur le bien-être des animaux lors du transport ont été adoptées à l’unanimité. Mette Uldahl a signalé que la FVE et la Fédération des associations vétérinaires équines européennes (Feeva) avaient appelé à l’arrêt de l’importation et de la production européenne de PMSG (hormone gonadotrophine chorionique équine) « si les procédures de collecte de sang chez les chevaux ne sont pas à la hauteur des normes de bien-être animal ». Nancy De Briyne a fait le point à propos le sous-groupe sur le commerce des chiens de la plateforme européenne sur le bien-être animal, et a indiqué que la Commission européenne avait formulé le souhait d’inclure les chats et les chiens dans la future législation européenne sur la santé et le bien-être des animaux, le qualifiant de « début d’une nouvelle ère prometteur ».
La disponibilité des médicaments
Parmi les autres points à l’agenda, les médicaments vétérinaires, avec une présentation d’Ivo Claassen, chef de la division des médicaments vétérinaires de l’Agence européenne des médicaments. Il a souligné qu’une bonne disponibilité des médicaments était à la base de la nouvelle réglementation sur le médicament vétérinaire (2019/6), par exemple par la création d’une base de données des produits et un système de cascade plus souple. Cependant, l’exigence de suivre strictement le résumé des caractéristiques du produit (RCP) d’un médicament (article 106) était l’objet de débats. Il a admis que ce critère pouvait être handicapant dans certains cas, et qu’une solution devrait être trouvée.
Des sondages
Un sondage de la Fédération des vétérinaires d’Europe (FVE) sur les visites vétérinaires requis en vertu de la nouvelle loi de l’Union européenne sur la santé animale a révélé un besoin crucial d’harmonisation au niveau communautaire pour éviter une application incohérente. Par exemple, bien que la visite sanitaire ne soit pas un contrôle officiel, elle est souvent effectuée par des inspecteurs ou des vétérinaires d’État dans certains pays. De même, la biosécurité, un élément clé du règlement, n’est pas contrôlée dans tous les pays.
Un autre sondage a montré que l’usage métaphylactique d’antibiotiques est relativement faible et qu’une interdiction complète augmenterait les maladies causées par les Enterobacteriaceae (principalement chez les porcs et les volailles) et les Pasteurellaceae.
En bref
- L’ancien directeur exécutif de la FVE, Jan Vaarten, a été nommé officier de l’Ordre d’Oranje-Nassau (ordre honorifique civil et militaire des Pays-Bas) pour services rendus à la profession vétérinaire par Karel van Oosterom, ambassadeur des Pays-Bas au Royaume-Uni. Finalement, la FVE a publié son rapport d’activités semestriel et a déménagé dans de nouveaux locaux à Bruxelles.
- Mette Uldahl a présenté la campagne « Unis dans la diversité » de la FVE et a annoncé qu’un site web dédié et des dépliants seraient bientôt lancés sur les thèmes de la diversité, l’équité et l’inclusion (DEI), et elle a partagé des vidéos sur l’importance de la DEI dans le milieu de travail vétérinaire.
- Jimmy Saunders (Belgique) a fait le point sur VetCEE, qui a désormais pour mandat l’accréditation des programmes de formation permanente vétérinaire. L’organisation a lancé un nouveau site web (vetcee.eu), de nouveaux statuts et un nouveau bureau. Stéphane Martinot (France) a rendu compte des activités du système européen d’évaluation de la formation vétérinaire (eccvt.fve.org).
- La prochaine assemblée générale se tiendra à Malte, du 24 au 26 novembre.