Télémédecine vétérinaire : faut-il la facturer et si oui, comment ? - La Semaine Vétérinaire n° 1955 du 30/08/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1955 du 30/08/2022

EXPRESSION

EXPRESSION

Auteur(s) : Propos recueillis par Chantal Béraud

La télémédecine vétérinaire peut faire l’objet de nombreux usages. Trois praticiens partagent ici leur retour d’expérience en matière de tarification au sujet de sa rentabilité.

Thierry Poitte (T 83)

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Spécialiste et fondateur du réseau CAPdouleur (Charente-Maritime)

Un tarif de spécialiste inchangé

Je travaille pratiquement exclusivement sur la douleur chronique et j’utilise régulièrement la plateforme LinkyVet pour le suivi des cas de la clinique de l’île de Ré ou pour les référés douleur. Très souvent, ces cas sont complexes et imposent un travail préparatoire conséquent. Donc mes tarifs en visioconsultation sont le plus souvent facturés de manière identique à une consultation spécialisée douleur en présentiel. Les praticiens libéraux « généralistes » pourraient aussi avoir utilement recours à de la télémédecine. Le prix à facturer dépendra de plusieurs critères. Une visio de cinq minutes pour un suivi en post-opératoire ne devrait évidemment pas coûter le même prix qu’une visioconsultation qui dure, elle, dans les 45 minutes. La visioconsultation est un complément idéal à la visite en présentiel, car elle permet notamment l’évaluation de la douleur dans l’environnement familier de l’animal. Mais elle oblige dans tous les cas à une consultation en présentiel qui peut être réalisée par le vétérinaire généraliste en étroite concertation avec le spécialiste.

Julie Fontaine (N 06)

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Praticienne avicole et cunicole à Bressuire (Deux-Sèvres)

Une facture plus verte

D’abord, je pense que l’objectif premier de la télémédecine vétérinaire est bien de parvenir à pallier des manques dans le maillage vétérinaire. Néanmoins, la facturation est une vraie question puisque dès que l’on y consacre plus d’un quart d’heure – et que l’on édite ensuite un compte-rendu de visite – il s’agit bien d’un véritable acte de consultation… Dans le Réseau Cristal dont je fais partie, nous n’avons pas encore formalisé la chose via des grilles standard harmonisées. J’aurais tendance à penser qu’il faut facturer le même tarif horaire que d’habitude moins les frais de déplacement… Dans certains cas, la télémédecine fait gagner du temps à tout le monde et la journée du vétérinaire devient ainsi moins fatigante avec moins de kilomètres en voiture. Pour mes confrères qui travaillent en aquaculture dans toute la France entière – et qui ne peuvent donc pas toujours être sur place le jour même – la télémédecine est un outil supplémentaire très intéressant. Avec un délai de réponse amélioré, un meilleur suivi et parfois moins de pollution atmosphérique générée à la clé.

Matthieu Desmulliez

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Directeur des opérations de la plateforme Vetapp

Savoir monétiser la télémédecine

La Dre Marie-Flore Awad (L 2006) est chargée des relations avec les vétérinaires utilisateurs de notre plateforme. Soit pour de la téléconsultation, depuis décembre 2021, soit, depuis février 2022, en télé-expertise (dans le cadre d’une activité de référé par des vétérinaires experts). Afin de favoriser et de démocratiser tant l’usage de notre plateforme que celui de la télémédecine vétérinaire, nos services sont gratuits cette année. Mais nous étudions actuellement un business modèle qui pourrait être pertinent en correspondant à la fois aux vétérinaires généralistes, aux spécialistes et à Vetapp pour janvier 2023. Quant aux vétérinaires qui pratiquent la téléconsultation sur Vetapp, leurs tarifs se rapprochent du prix d’une consultation traditionnelle (37 euros en moyenne). Pour la partie télé-expertise, les vétérinaires référents sont pour l’heure nombreux à la faire gratuitement. Nous sommes en train de les accompagner pour mettre en place une chaîne de monétisation sur ces demandes d’avis, pour un « juste » prix modulable selon la nature du conseil rendu.