EXPRESSION
Auteur(s) : Propos recueillis par Michaella Igoho-Moradel
Face au manque de bras, les entreprises vétérinaires doivent adopter une stratégie pour poursuivre au mieux leur activité. Quels leviers peuvent-ils mobiliser pour faire face à la situation ?
Hélène Villarroya (A 01)
Consultante et fondatrice d’Adévet
Être proactif dans le recrutement est indispensable
Face à une pénurie de main-d’œuvre, il faut gagner le plus possible en performance. Il ne s’agit pas de dégrader la qualité du service mais d’identifier les points d’amélioration pour optimiser le temps de travail. La délégation de certains actes (la facturation, la saisie des comptes rendus, la remise de l’animal après une chirurgie, etc.) aux ASV1 en fait partie. Cela nécessite qu’ils soient formés à ce rôle. L’autre étape tout aussi importante est le recrutement de candidats. Il ne faut pas se contenter de diffuser une annonce : être proactif dans la recherche est indispensable. Réseaux sociaux, publicités ciblées, bouche-à-oreille, il ne faut pas se limiter sur les moyens et les ressources. Pour attirer l’attention des candidats, une annonce visuelle est plus percutante que 1000 mots. Au-delà de la description du type de poste, une bonne stratégie de fidélisation est essentielle. Mettre en avant la culture et les valeurs de l’entreprise, l’ambiance de travail, accompagner le candidat dans ses premiers mois sur le plan humain permet aussi de se démarquer.
Michel Muller (N 86)
Vétérinaire en pratique mixte à Fontenay-Le-Comte (Vendée)
La charge de travail physique et morale est importante
C’est une catastrophe ! Nous manquons de bras. La jeune génération veut un équilibre entre vie privée et vie professionnelle différent. Pourtant, nous sommes des employeurs corrects. Le nombre de gardes n’est pas excessif, nos propositions de rémunérations sont au-dessus du salaire conventionnel, nous accompagnons les nouveaux entrants… Cette situation a des conséquences directes sur notre mode de fonctionnement. Nous avons des retards de prise en charge, des opérations reportées, nos salariés actuels travaillent trop. Ces derniers s’impliquent et acceptent de faire des gardes. Nous tentons au maximum de les préserver. Ils font peu d’heures supplémentaires. Nous sommes obligés de refuser des clients ou de recommander des consœurs et des confrères qui sont eux-mêmes surchargés. Nous ne parvenons pas à proposer le service que nous pourrions rendre avec des bras supplémentaires. La charge de travail physique et morale est importante. Ce surcroît de travail est permanent. Une prise de conscience collective, ordinale, syndicale est nécessaire.
Benoît Savaëte (Liège 09)
Consultant en management des structures vétérinaires chez VetFamily
Déléguer davantage de responsabilités aux ASV
Cette problématique doit être abordée de façon pragmatique afin d’optimiser l’organisation du travail. Avec une bonne stratégie, cette contrainte peut devenir une opportunité de développement de la clinique. Il faut se demander qui fait quoi et combien de temps cela dure. Une action sur l’organisation du travail entre le vétérinaire et l’ASV est possible. En effet, souvent, la pénurie de main-d’œuvre vétérinaire peut être comblée par davantage de délégation de responsabilité managériale. Et, selon nos estimations, pour le même pourcentage de hausse de salaire, la valeur absolue sera toujours plus basse pour un(e) ASV qu’un vétérinaire. Autre volet d’action, la digitalisation de la relation client pour gagner du temps et de l’efficacité. La valeur perçue par le client doit augmenter et la qualité des soins doit être meilleure. Enfin, le bouche-à-oreille reste un atout efficace pour développer sa marque employeur. Les vétérinaires doivent être proactifs dans l’accueil de stagiaires. Les stagiaires ne sont pas en manque et en accueillir est un minirecrutement.