Certificat d’engagement et de connaissance : utile ou pas ? - La Semaine Vétérinaire n° 1969 du 09/12/2022
La Semaine Vétérinaire n° 1969 du 09/12/2022

EXPRESSION

Auteur(s) : Propos recueillis par Caroline Driot

La loi du 30 novembre 2021 contre la maltraitance animale impose depuis le 1er octobre 2022 la signature d’un certificat d’engagement et de connaissance avant toute acquisition de chien, chat, furet et lagomorphe, et pour toute détention d’équidé à partir du 31 décembre prochain. Les vétérinaires sont toutefois partagés quant à l’efficacité réelle de cette mesure. 

Cassandre Boogaerts (A 08)

Vétérinaire canine et éleveuse canin à Buzançais (Indre)

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Un papier de plus à signer

Je ne suis pas convaincue de l’utilité de ce nouveau certificat. L’objectif est louable mais, sur la forme, on retrouve le document d’information exigible pour toute cession depuis 2012. Faire peser la responsabilité de la signature sur les vendeurs est une bonne chose, cependant qui sait aujourd’hui que le non-respect de cette mesure est passible d’une amende ? Le délai de sept jours entre la signature du certificat et la vente limitera peut-être les achats coups de cœur. Ce document sensibilisera certains acquéreurs potentiels, mais pas la majorité. Car on le constate avec les ordonnances : les clients ne les lisent plus. Je crains que cela ne devienne un papier de plus à signer, comme on accepte, sans les lire, les conditions d’utilisation sur Internet. Alors que des animaux sont encore cédés en étant non identifiés et sans certificat de bonne santé, le fossé se creuse entre les exigences réglementaires et la réalité du terrain.

Nathalie Simon (A 79)

Vétérinaire comportementaliste à La Chapelle-sur-Erdre (Loire-Atlantique)

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Cela ne résoudra pas la problématique des abandons

Ce certificat part d’une bonne idée, parce qu’il faut sensibiliser les gens aux besoins physiologiques des animaux, et aux contraintes qui en découlent. Sur ce point, les certificats diffusés par la profession vétérinaire sont très complets. La mention manuscrite, dans laquelle le futur propriétaire s’engage à respecter les besoins de son animal, et le délai de réflexion de sept jours éviteront sans doute des achats impulsifs. Mais cela ne réglera pas la problématique des abandons, en particulier des chiens, majoritairement liés à des problèmes de comportement. En effet, lorsque des conseils contre-productifs sont prodigués, notamment dans certains modèles de certificats qui suggèrent, par exemple, de mettre à disposition des tapis de fouille ou d’organiser des chasses au trésor en plaçant de la nourriture dans des objets ou en l’éparpillant dans la maison, on crée des conditions favorables aux destructions et aux vols. De quoi faire des chiens éduqués ainsi de futurs candidats à l’abandon.

Christine Filliat (L 86)

Vétérinaire en productions animales, ostéopathe équin à Châteauneuf-sur-Isère (Drôme), membre du comité bien-être de l’Avef, fondatrice de l’association Une nouvelle vie pour Melchior

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Pas de certificat de complaisance

Ce certificat est une bonne initiative si celle-ci n’est pas galvaudée. À ce jour1, seuls les vétérinaires sont habilités à délivrer ce certificat aux détenteurs d’équidés non professionnels. Connaissances et engagement sont requis, mais aucun contrôle de formation n’est exigé. Cela revient à donner les clés d’une voiture à toute personne qui déclare connaître le code de la route ! L’Avef2 veut aller plus loin, et plaide pour que ce document soit remis à l’issue d’une formation dispensée aux futurs détenteurs. L’association a d’ores et déjà établi un cahier des charges relatif à ce type de formation, soumis pour avis à la Direction générale de l’alimentation, ainsi qu’un modèle de certificat d’engagement validé par la chaire bien-être de VetAgro Sup. Le sujet peut être fédérateur : dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, nous avons constitué un groupe de dix vétérinaires autour de l’association pour équidés maltraités Une nouvelle vie pour Melchior, afin de réfléchir à l’organisation de formations communes pour nos clients.

  • 1. Selon le décret, ce certificat peut également être délivré par les organismes professionnels de la filière équine figurant sur une liste fixée par arrêté ministériel, non parue à ce jour.
  • 2. Association vétérinaire équine française.