Technologies
ANALYSE CANINE
Auteur(s) : Tanit Halfon
Suivi clinique des animaux en hospitalisation et à domicile, aide aux soins et à la prescription, orientation du diagnostic, triage aux urgences… le smartphone, et les applications qui peuvent être installées en lien, ou pas, avec des objets connectés, trouve de nombreuses utilités en pratique vétérinaire.
Le smartphone est une innovation technologique sur laquelle le vétérinaire peut s’appuyer dans sa pratique, a-t-il été montré lors d’un module consacré à ce sujet au cours du congrès 2022 de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac), qui s’est déroulé du 1er au 3 décembre derniers à Marseille, (Bouches-du-Rhône). Un premier exemple en ophtalmologie a été présenté par Charles Cassagnes (L 97), président du groupe d’étude en ophtalmologie de l’Afvac. En pratique, le praticien pourrait s’aider de photos envoyées par les propriétaires en amont d’une consultation pour mieux évaluer le degré d’urgence de la situation, et orienter sur la marche à suivre. Pouvoir disposer de photos apparaît aussi comme une aide au suivi postopératoire. Ce cadre posé, la limite est, bien entendu, d’obtenir des images interprétables. Pour y arriver, plusieurs recommandations peuvent être faites au propriétaire : respecter une distance minimale pour que l’image de la face soit nette, le praticien pouvant ensuite zoomer au niveau des yeux ; multiplier les prises de vues ; faire une vidéo ; écarter les paupières sans appuyer sur le globe oculaire pour éviter la procidence de la membrane nictitante ; prendre des images de face comme de profil ; privilégier un éclairage indirect (pas de plafonnier) avec une lumière tangentielle pour éviter les reflets. Le praticien pourra en tirer plusieurs informations utiles en matière de diagnostic lésionnel et de conséquences fonctionnelles : présence ou absence d’écoulements, état des paupières, de la cornée, de la chambre antérieure (vue de profil), du cristallin et de la pupille. De là à envisager une téléconsultation ? Cela semble encore limité, étant donné les questions de responsabilité. Ce pourrait aussi être une opportunité pour les échanges entre référent et référé, à condition d’avoir des systèmes de prise de vue très performants, comme Quickvue (VisuScience), qui permet d’améliorer significativement la qualité des photos prises avec un smartphone.
Applications et objets connectés
Autre exemple, la cardiologie. Il existe des applications qui facilitent le suivi à la maison de la fréquence respiratoire au repos, un des indicateurs les plus sensibles pour détecter une insuffisance cardiaque congestive chez le chien. Des valeurs supérieures à 41-44 mouvements par minute doivent inciter à amener l’animal en consultation pour évaluer la possibilité d’une insuffisance cardiaque, a indiqué Pierre Menaut (T 02), président du groupe d'études en cardiologie et pneumologie. La norme se situe entre 25 à 30 mouvements par minute durant le sommeil. Deux applications spécifiques sont disponibles, MyPet’s Heart2Heart, de Boehringer Ingelheim, et SuiVie Chien, de Ceva. Côté clinique, le vétérinaire peut désormais se passer du papier pour les électrocardiogrammes (ECG) grâce à de nouveaux dispositifs de mesure connectés pour accéder aux données (applications, site internet), par exemple eKuore ECG, AliveCor ou Beecardia ECG. Le praticien peut également se servir de stéthoscopes électroniques connectés, tels que eKuore VET II ou Bimod Vet de Cardiags (qui fait aussi ECG, avec des algorithmes d’aide à la décision).
Évaluer les offres disponibles
Au-delà de ces exemples spécifiques s’est développée toute une offre d’applications de santé, non associées à des objets connectés, à destination des propriétaires tout comme des vétérinaires, a expliqué Laurent Dillie (A 93). En médecine humaine, on parle de mHealth (santé mobile). En 2021, la Haute Autorité de santé s’est même penchée sur ce qu’elle appelle des « services numériques de santé », et en a dressé un état des lieux1. L’objectif était d’aider les professionnels à comprendre les différents usages de ces applications, et à les trier, en s’appuyant sur des critères de qualité. En médecine vétérinaire, deux universités américaines, de Pennsylvanie et du Minnesota, ont publié une liste d’applications2, mais la majorité d’entre elles ne sont pas disponibles en Europe. Il n’empêche, Laurent Dillie a proposé une première liste non exhaustive, élaborée au gré de ces recherches : Vetcalculators (calculs de posologies, scoring, etc), Vet Perfusion (calcul de débits de perfusion), MN Urolith (analyse de radiographie avec calculs), AntibioVet (fiches pratiques d’antibiothérapie), vPOP PRO (planification chirurgicale), Dechra Dog and Cat Anaesthasia (planification d’anesthésies), Recover (aide à la réanimation cardio-vasculaire), etc. Deux applications à destination des propriétaires ont été conçues par le Royal Veterinary College de Londres : RVC Pet Diabetes et RVC Pet Epilepsy Tracker. À l’Afvac, l’idée d’établir une telle liste avec des applications validées par les pairs est en discussion.