Les NAC, grands oubliés de la loi contre la maltraitance animale  - La Semaine Vétérinaire n° 1975 du 03/02/2023
La Semaine Vétérinaire n° 1975 du 03/02/2023

Réglementation

ANALYSE CANINE

Auteur(s) : Par Brigitte Leblanc

La législation a instauré une protection des animaux de compagnie à deux vitesses, avec d’un côté les chiens, chats, furets et lapins, plutôt bien pris en compte, et de l’autre les NAC, exceptés ces deux dernières espèces, quasiment absents des dispositifs prévus.

La loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a entériné des mesures fortes dans de nombreux domaines, dont celui des animaux de compagnie. Toutefois, si elle constitue une avancée certaine pour la protection des nouveaux animaux de compagnie (NAC) non domestiques, elle n’a guère été analysée du point de vue des NAC domestiques1.

Des améliorations générales

À l’instar de tous les animaux de compagnie, les NAC domestiques bénéficient tout de même de plusieurs dispositions législatives, telle que l’interdiction de la vente aux mineurs sans accord d’une autorité parentale, ce qui constitue un grand pas pour toutes ces espèces « peu chères à l’achat » (mais dont l’entretien nécessaire à leur bien-être est bien plus onéreux). Sous réserve, bien sûr, que le contrôle en caisse soit bien effectué. En outre, l’expédition des vertébrés vivants et la présentation des animaux en vitrine sont interdites, ce dernier point ayant pour but de limiter les achats impulsifs. Il en est de même des « offres promotionnelles » ou de la mention « satisfait ou remboursé », ce qui contribue à déréifier les animaux. La vente en ligne des animaux de compagnie est également encadrée et ne pourra apparaître que dans une rubrique réservée diffusant des messages d’information et de sensibilisation. Néanmoins, le contrôle des annonces de cession sera difficile à effectuer pour les NAC domestiques, qui n’ont aucune identité, en dehors du furet, le seul dont l’identification est obligatoire, comme les chiens et les chats.

Le renforcement des sanctions contre la maltraitance à l’encontre des animaux va également dans ce sens : peines presque doublées en cas d’acte de cruauté ou d’abandon, création d’un nouveau délit correspondant au fait d’attenter à la vie d’un animal (qui jusque-là relevait d’une simple contravention). La difficulté sera de caractériser l’infraction, particulièrement en cas d’abandon, en l’absence d’identification individuelle de l’animal, à moins de surprendre la personne sur le fait. Or, le lapin est l’espèce la plus abandonnée en France, avant les chiens et les chats, en l’absence de chiffres concernant les animaux plus petits, tels que les hamsters ou les rats.

Le lapin de compagnie privilégié 

À sa parution, la loi laissait quelque espoir quant à la prise en compte des NAC domestiques dans l’obligation pour le cédant et l’acquéreur d’un animal de compagnie de respectivement fournir et signer un certificat d’engagement et de connaissance (CEC). Malheureusement, le décret d’application du 18 juillet 2022 en a réduit la portée pour les NAC aux seuls furets et lapins de compagnie (non destinés à la consommation humaine). Des questions se posent alors : Pourquoi seulement eux ? Pourquoi cette considération à deux vitesses ? Cobayes, rats, canaris ne sont-ils pas dignes que l’on connaisse leurs besoins physiologiques, comportementaux, et l’implication financière et logistique inhérente à leur possession ?

La deuxième avancée dont, parmi les NAC domestiques, seuls le lapin de compagnie et le furet bénéficient est le délai de réflexion de sept jours entre la remise du CEC et l’acquisition réelle de l’animal. Cette décision, qui pourra éviter de nombreux achats impulsifs, ne peut qu’être saluée. Pourtant, de nouveau, des interrogations émergent. D’une part, quid des autres NAC domestiques qui ne semblent pas mériter ce délai de réflexion, alors qu’ils sont, pour beaucoup d’entre eux, encore plus concernés que le lapin par ces acquisitions sans réflexion préalable ? En effet, ils ne coûtent que quelques euros, et beaucoup mesurent encore la valeur d’un animal à son prix. D’autre part, comment faire respecter et contrôler ce délai de réflexion pour le lapin sans identification individuelle, à l’inverse des chiens, chats et furets ?

Une occasion manquée pour encadrer l’élevage de NAC domestiques

Il est regrettable que, concernant les animaux de compagnie domestiques, les avancées se soient principalement limitées aux chiens et aux chats, avec, entre autres, l’interdiction de vente en animalerie à partir de 2024. L’exposé de Loïc Dombreval (A 91), ex-député de la deuxième circonscription des Alpes-Maritimes, lors de la présentation de la proposition de loi à l’Assemblée nationale mettait en avant la nécessaire obligation de respecter l’acquisition du répertoire comportemental dans la période juvénile des chiots et des chatons, la lutte contre ces achats impulsifs, le sevrage précoce trop souvent constaté et le manque de contact avec l’humain dans ces périodes d’éducation cruciales au sein des structures que sont les animaleries. Force est de constater que l’on retrouve les mêmes problèmes pour les NAC ; les connaissances de plus en plus poussées que nous avons de leur comportement le prouvent. De ce fait revient la question : Pourquoi cette protection à deux vitesses ?

De nombreux autres amendements ont été retoqués au Sénat, notamment celui2 déposé par Arnaud Bazin (A 90), sénateur du Val-d’Oise, qui visait à encadrer les élevages de NAC domestiques. En l’état, ils ne bénéficient pas sur le territoire de l’encadrement pourtant prévu par la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie, ratifiée par la France en 2003.

In fine, il est bon de rappeler à tous les acteurs de la protection et du soin des animaux que les NAC ne sont pas uniquement des espèces exotiques, mais que nombre d’espèces domestiques vivent depuis bien longtemps près de nous comme compagnons, et semblent être les grands oubliés de la protection animale et de la législation. 

  • 1. Pour rappel sont considérées comme domestiques les espèces listées dans l’arrêté du 11 août 2006 fixant la liste des espèces, races ou variétés d’animaux domestiques (bit.ly/3XWc5rB).
  • 2. bit.ly/3QQ5NXO.