Parasitisme
ANALYSE CANINE
Auteur(s) : par Michaella Igoho-Moradel
Si le schéma d’une vermifugation automatique reste une habitude répandue en activité canine, une approche différente est à privilégier pour préserver l’efficacité des molécules disponibles sur le marché.
Vermifuger moins mais vermifuger mieux ! Chez les carnivores domestiques aussi la tendance semble être à la vermifugation raisonnée. C’était l’un des points abordés par Jacques Guillot, du service de parasitologie de l’École nationale vétérinaire d’Alfort et membre du European Scientific Counsel Companion Animal Parasites (Esccap), lors d’un atelier sur la sécurité du médicament vétérinaire organisé au congrès de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie en décembre dernier. Comme pour les ruminants, en particulier les herbivores, pour qui il est indispensable de traiter aussi peu que possible mais autant que nécessaire. Une stratégie bénéfique pour prévenir pour l’émergence d’une résistance aux antiparasitaires. Cette approche est-elle applicable aux carnivores domestiques ?
Une évaluation individuelle du risque
Chez les carnivores domestiques, la situation est quelque peu différente de celle des herbivores, comme l’a expliqué Jacques Guillot. Pour ces animaux, les refuges de sensibilité sont nombreux car ils vivent dans un environnement ouvert avec possibilité de contact avec des renards ou des animaux errants. Tandis que les herbivores vivent dans un environnement clos avec très peu de possibilités d’introduction de parasites sensibles. « Le risque de résistance n’est pas un argument à avancer pour limiter l’utilisation des antiparasitaires chez les carnivores domestiques. Les laboratoires sont actifs dans le développement d’antiparasitaires internes [API] et proposent une offre assez considérable. Le problème est que le praticien est un peu perdu face à toutes ces molécules, d’où la nécessité de fournir une aide à la prescription, comme le font l’Esccap ou la British Veterinary Association au Royaume-Uni. » Ces organismes fournissent des recommandations fondées sur une évaluation individuelle du risque. Cette approche tient compte de plusieurs facteurs : l’évaluation du danger (quelle est la dangerosité pour l’animal et pour l’humain ?), l’évaluation de l’exposition (quelle est la probabilité de présence de parasites sur ces animaux ?). Ces recommandations ont deux objectifs : préserver la santé animale et la santé humaine pour tenir compte du risque zoonotique.
Des mesures préventives
Certaines situations requièrent des mesures préventives. « Dans le cas des chiots et des chatons, l’utilisation préventive de l’API vise à limiter la contamination par Toxocara canis et Toxocara cati. » Autre situation, la problématique des maladies vectorielles, comme la leishmaniose ou la babésiose canine, pour lesquelles une approche différente est nécessaire pour cibler le vecteur. « Pour les ectoparasites, à part des antiparasitaires externes, il n’y a pas beaucoup d’autres solutions à proposer », relève l’expert. Autre exemple, les échinocoques qui nécessitent la mise en place de mesures préventives (comme empêcher l’animal de chasser, ou la prévention médicamenteuse) et l’utilisation de praziquantel. Enfin, pour prévenir la toxocarose, dans un foyer composé notamment de jeunes enfants, de personnes immunodéprimées ou vulnérables, il existe des recommandations détaillées, comme celles de l’Esccap. Elles prônent la mise en place de mesures d’hygiène afin d’écarter tout risque d’excrétion des œufs et la vermifugation des animaux tous les mois. Pour les chiens adultes, l’Esccap recommande une évaluation individuelle de chaque animal pour déterminer la nécessité et la fréquence de la vermifugation.
Identification et sélection
Si le principe d’une vermifugation sélective est accepté, il est nécessaire de bien cibler l'animal ou les animaux à traiter. Le recours à la coproscopie doit être fortement envisagé, car cette méthode permet de dépister la présence de parasites dans différents organes. Pour les parasites internes, Jacques Guillot, du service de parasitologie de l’École nationale vétérinaire d’Alfort et membre de l’association European Scientific Counsel Companion Animal Parasites, rappelle qu’il peut y avoir des signes cliniques mais que le plus important c’est l’analyse coproscopique : « Elle doit devenir la ligne directrice de la prescription des antiparasitaires internes. »
Lire aussi : « La coproscopie à la clinique », La Semaine Vétérinaire n° 1889 du 05/03/2021 (bit.ly/3Yn0bad) et « La coproscopie, un examen utile en pratique », La Semaine Vétérinaire n° 1856 du 29/05/2020 (bit.ly/3X3srh8).