Constitution de société
ENTREPRISE
Auteur(s) : Par Jacques Nadel
Libération partielle ou totale du capital, il n’y a pas de solution parfaite. À la constitution de la société, les associés doivent prendre en compte divers critères, avantages et inconvénients, pour apprécier la meilleure option pour eux.
Le montant du capital social, divisé en parts sociales égales, est librement fixé par les statuts et à la constitution de la société. Les parts sociales sont attribuées aux associés en rémunération de leurs apports (en numéraire, en nature ou en industrie). En cas d’apport en numéraire, les parts sont attribuées même si les associés concernés ne versent pas l’intégralité des fonds au moment de la constitution de la société. En effet, les associés peuvent ne verser qu’une fraction de leur apport, laquelle ne peut pas être inférieure à 20 % des sommes promises pour une société à responsabilité limitée ou à la moitié de la valeur nominale de l’action pour une société anonyme. À la création d’une société par actions simplifiée, les apports en numéraire doivent être obligatoirement libérés de la moitié dans les huit jours après leur versement.
La libération du surplus doit intervenir, en une ou plusieurs fois, sur décision du ou des gérant(s) de la société dans les cinq ans qui suivent l’immatriculation de la société. À défaut, tout intéressé peut demander en justice que le ou les gérant(s) soi(en)t condamné(s) sous astreinte à procéder aux appels de fonds ou qu’un mandataire soit désigné afin d’effectuer cette formalité.
Le pour et le contre de chaque option
La libération partielle du capital social est intéressante lorsque les entrepreneurs ne disposent pas toujours des liquidités nécessaires et qu’ils ne souhaitent pas ouvrir le capital de la société à des investisseurs extérieurs. La libération totale du capital, elle, est d’abord conditionnée à la présence d’investissements nécessaires pour commencer l’activité. En effet, le capital social a pour principal objectif de financer le démarrage de l’activité, c’est pourquoi les associés créateurs d’une entreprise doivent veiller à ce que le montant du capital social libéré soit suffisant pour permettre la réalisation des investissements. Cette règle de prudence doit être pondérée en fonction du montant de la trésorerie dont dispose chaque associé au moment de la constitution de la société. Les montants déposés en compte courant d’associé sont des éléments fondamentaux à considérer, de même que s’il existe un emprunt bancaire.
La libération, partielle ou complète, du capital social a également une incidence sur la fiscalité de l’entreprise soumise à l’impôt sur les sociétés. En effet, les petites et moyennes entreprises peuvent, sous conditions, bénéficier d’un taux réduit d’impôt sur les sociétés. Fixé à 15 % (au lieu du taux normal à 25 %), ce taux s’applique aux 42 500 premiers euros de bénéfice – ce plafond vient d’être modifié par la loi de finances pour 2023 (38 120 euros jusqu’au 31 décembre 2022). Or, entre autres conditions pour pouvoir profiter du taux réduit, il faut que le capital de la société soit entièrement libéré.
Dans l’hypothèse inverse, les associés courent un risque lié à l’absence de libération ultérieure. Le non-respect de cette obligation de libération dans les cinq ans par l’un des associés peut entraîner de potentiels litiges susceptibles de mettre en péril la viabilité de la structure. La confiance entre associés est donc indispensable au démarrage de la société.
La libération d’emblée de tout le capital social est également un gage de confiance et de réassurance auprès des créanciers, et notamment de la banque prêteuse. Pour assurer son développement, financer de nouveaux projets, la société peut être amenée, au cours de sa vie sociale, à décider d’une augmentation de capital social. Or, le capital initial doit être entièrement libéré pour pouvoir procéder à cette opération.
Enfin, deux autres critères peuvent faire pencher la balance en faveur d’une libération immédiate du capital social : les intérêts des comptes courants d’associés sont déductibles du résultat imposable de la société à cette seule condition, et, pour les associés, la réduction d’impôt sur le revenu pour souscription au capital d’une société ne s’applique progressivement chaque année qu’en proportion du montant des apports effectivement versés.