À hauteur de chat

La scène où, dans La Nuit américaine (1973) de François Truffaut, l’équipe de tournage s’impatiente qu’un chaton dédaigne la tasse de lait qu’on voudrait qu’il lape illustre bien la difficulté de tourner avec les chats. La magistrale séquence d’ouverture du nouveau long-métrage de Guillaume Maidatchevsky ferait croire le contraire tant le jeu muet des chatons y est expressif et limpide. Dans l’enchaînement fluide de plans serrés, magnifiquement éclairés, nous comprenons à chaque instant ce que l’animal voit, ressent et veut faire. Après le remarqué Aïlo*, le réalisateur confirme ici sa belle fibre animalière et relève le défi rare de construire toute une fiction autour d’un chat bien réel. Le film est une libre adaptation du roman Rroû (1931) de Maurice Genevoix. Né dans les combles d’un immeuble parisien, le héros, orphelin, est recueilli à deux mois par une fillette. Après l’âge des apprentissages complices, le minet arrive dans les Vosges avec sa jeune maîtresse. Il y découvre la forêt, sa faune et la liberté à laquelle aucun félin domestique ne renonce jamais. L’enfant se construira en l’acceptant tandis que d’âpres épreuves attendent le petit animal. Un double récit d’apprentissage qui évite la mièvrerie et qui, outre la virtuosité de la réalisation, peut compter sur le jeu mesuré de la jeune actrice et de l’impeccable Corinne Masiero (en voisine marginale), ainsi que sur le formidable travail de la coach animalière, Muriel Bec.

• Mon chat et moi – La grande aventure de Rroû, de Guillaume Maidatchevsky, avec Capucine Sainson-Fabresse, Corinne Masiero, 1 h 23, sortie le 5 avril.

• * Voir La Semaine Vétérinaire n° 1801 du 9 mars 2019.