L’Oaba fête les 30 ans du troupeau du bonheur - La Semaine Vétérinaire n° 1996 du 30/06/2023
La Semaine Vétérinaire n° 1996 du 30/06/2023

Protection animale

ANALYSE MIXTE

Auteur(s) : Par Marine Neveux

L’assemblée générale de l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (Oaba) s’est tenue le 10 juin dernier dans les locaux de l’Assemblée nationale à Paris, l’occasion de fêter les 30 ans d’existence du troupeau du bonheur.

« En 1961, date de création de l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs (Oaba) par Jacqueline Gilardoni, l’amélioration des méthodes d’abattage et la prise en charge des animaux à sauver faisaient déjà partie des objectifs de l’association », a rappelé le 10 juin notre confrère Manuel Mersch (A 89) en introduction de l’assemblée générale de l’association. En 1993, l’Oaba se voit confier la garde définitive d’animaux maltraités. Treize bovins survivants sont placés chez un éleveur partenaire en Savoie. Ainsi est né le troupeau du bonheur avec Gil Raconis. La volonté de Jacqueline Gilardoni était de donner un nom à tous les animaux sauvés, et elle avait lancé une souscription pour leur venir en aide. Dans le troupeau du bonheur, l’hébergeur s’engage à ne pas exploiter ceux qui lui sont confiés et à fournir un environnement et une alimentation qui répondent à leurs besoins et attentes. L’Oaba prend, elle, en charge les frais de pension et de santé.

Un site dédié au troupeau du bonheur

En 2023, le troupeau du bonheur regroupe 561 pensionnaires dans 40 fermes partenaires réparties sur le territoire. Un site internet* vient d’être lancé pour permettre de développer la communication et le parrainage des animaux. « Sur le site, on peut devenir marraine et parrain en faisant un don mensuel, explique Manuel Mersch. Il existe plusieurs types de parrainage possibles. Et l’on choisit nominativement l’animal. »

Des difficultés qui s’amplifient

L’Oaba fait malheureusement le constat de problématiques qui s’amplifient d’année en année, et du nombre croissant de retraits d’animaux maltraités ou abandonnés. « En 2022, 2 090 animaux de ferme maltraités ou en abandon de soin ont été saisis par les services de l’État puis confiés à notre association. » Le malaise du milieu rural continue et l’association se dit inquiète pour l’année 2023. L’Oaba avait lancé une alerte auprès de l’Administration pointant le manque de prise en charge des éleveurs en difficulté. « La crise actuelle du monde rural a des graves répercussions sur les éleveurs, qui se retrouvent bien souvent confrontés à des situations dont ils ne peuvent se sortir seuls. »

Un abattoir sur trois présente des non-conformités !

L’Oaba continue le combat sur l’étourdissement de tous les animaux avant abattage. En 2022, deux recours ont été déposés devant la Commission européenne, en vue de l’insensibilité totale des volailles avant abattage et pour lutter contre l’absence de traçabilité des viandes. « Par une note de service du 23 novembre 2020, la direction générale de l’Alimentation a autorisé les abattoirs à utiliser des paramètres électriques inférieurs à ceux mentionnés dans le règlement européen. De ce fait, les volailles ne sont pas efficacement étourdies mais simplement immobilisées par choc électrique […] Ce subterfuge permet de tenir des cadences élevées, économiquement viables mais ne permet nullement d’assurer que les volailles seront bien inconscientes lors de la saignée. » Manuel Mersch émet la proposition de créer un observatoire des animaux d’élevage.

Comme l’a rappelé Frédéric Freund, directeur de l’Oaba, l’association siège dans des comités consultatifs et participe à des groupes de travail et de concertation, comme le Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale, et le Comité national d’éthique des abattoirs. Pour ce dernier, ce sont cinq réunions qui se sont tenues en 2022. Les ordres du jour ont concerné notamment le suivi des non-conformités en abattoirs par les services officiels de contrôle. « Les services officiels ont ainsi inspecté 882 process d’abattage : 67,4 % se sont révélés conformes et 32,6 % des process ont révélé une ou plusieurs non-conformités », relate Frédéric Freund. « Sur ces 32,6 % de process non conformes, 80,6 % ont été corrigés à six mois. Un bilan de financement du plan de relance de 125 millions d’euros pour la modernisation des abattoirs a été présenté : 181 dossiers ont bénéficié de ce plan, dont 60 % pour des financements inférieurs à 500 000 euros. Enfin, le sous-groupe ‘abattage sans étourdissement’, qui avait été créé afin de trouver des pistes d’amélioration de cette pratique compte tenu de l’absence de volonté politique de la voir supprimée, ne s’est pas réuni en 2022. »

Formation et sensibilisation

L’Oaba participe à la formation des élèves ingénieurs agronomes, des vétérinaires inspecteurs et d’auditeurs en abattoirs. Elle est membre fondateur de l’association Étiquette bien-être animal, qui a lancé le premier étiquetage « bien-être animal » en France, en 2019, pour la viande de poulet. Le référentiel d’évaluation du bien-être animal est construit sur 230 critères et une notation de A à E avec l’appui du groupe Casino. En 2022, de nombreuses réunions ont cherché à mettre au point cette étiquette pour la viande de porc. De nouvelles réunions ont débuté pour une étiquette concernant les œufs de poules.

Jamais deux sans trois !

En 2022, l’Oaba et huit autres Organisations non gouvernementales de protection animale ont saisi le Conseil d’État d’une requête commune contre le décret du 15 décembre 2021 qui restreint l’interdiction édictée par la loi Egalim de 2018 de tout bâtiment nouveau ou réaménagé de poules élevées en cages. « Avec ce décret, le gouvernement limite en effet l’interdiction aux seuls bâtiments qui augmentent leur capacité de production, les bâtiments existants pouvant être réaménagés à neuf, explique Frédéric Freund. Ainsi ce décret va à l’encontre des promesses du président de la République émise en début de quinquennat et contrarie le cap fixé par la Commission européenne. »

Triste record

En 2022, l’Oaba a initié 28 procédures pénales concernant des animaux délaissés ou maltraités. Elle s’est vu confier la garde de 2 090 animaux (874 bovins, 1 195 ovins-caprins, 11 équidés, 10 cochons). C’est la première année où l’association dépasse la barre des 2 000…Les demandes des services de l’État (services vétérinaires et tribunaux judiciaires) sont de plus en plus fréquentes.

  • *troupeaudubonheur.fr