Comment sortir de la triade perfectionnisme, imposture, burn-out - La Semaine Vétérinaire n° 2001 du 01/09/2023
La Semaine Vétérinaire n° 2001 du 01/09/2023

Santé mentale

COMMUNAUTE VETO

Auteur(s) : Par Anne-Claire Gagnon

Année après année, le congrès de la British Small Animal Veterinary Association (Bsava) fait une place croissante aux formations en développement personnel. En 2022, une ancienne praticienne équine y sensibilisait les professionnels au syndrome de l’imposteur.

En 2022, au congrès de la British Small Animal Veterinary Association (Bsava), Carolyne Crowe, ancienne vétérinaire devenue coach, a donné les clés pour reconnaître le syndrome de l’imposteur et réussir à admettre en être victime – une étape salutaire, car préalable à sa prise en charge et à sa guérison. Cette tendance psychique à douter exagérément de ses compétences et capacités est favorisée par le perfectionnisme, qui est très répandu dans la profession vétérinaire où les attentes, d’une hauteur vertigineuse, se heurtent à la réalité fracassante du terrain. Une récente publication* a ainsi montré le lien important entre le syndrome de l’imposteur chez les jeunes femmes vétérinaires, le perfectionnisme (doublé d’une autocritique permanente) et le burn-out, trois phénomènes qui ont déjà fait l’objet de recherches.

Une expression clinique intermittente

Il est important de savoir que l’expression clinique du syndrome de l’imposteur est intermittente, en raison de la stratégie de protection qu’il induit (la personne qui en souffre ne voulant surtout pas être découverte). Cependant, certaines petites phrases ne trompent pas, comme « je ne suis qu’un vétérinaire généraliste », « je travaille beaucoup… j’ai des facilités, de la chance » ou « il y a tellement de personnes plus méritantes et brillantes que moi » alors que la personne qui les pense ou les prononce pourrait reconnaître être douée ou se dire fière de réussir.

Choisir d’accepter les compliments légitimes

Plus qu’un syndrome – ce terme, comme celui d’imposteur, est inadéquat –, il s’agit d’un mode de fonctionnement cérébral, d’une mentalité, caractérisés par une incapacité à déléguer, à demander de l’aide car l’autre (le collègue, client ou proche) découvrirait que celui qui en souffre ne sait pas tout et qu’il est faillible. Nobody’s perfect ! Ancienne praticienne équine, Carolyne Crowe a expliqué que la première étape est de prendre conscience de cet état, qui conduit à se mettre en retrait et qui se manifeste par une difficulté importante à accepter la reconnaissance, les compliments (toujours jugés suspects), les récompenses. Les personnes atteintes par ce syndrome minimisent leurs réussites, trouvent normal de rendre service, sous-estiment leur contribution, ne réagissent plus quand on les rabaisse (« j’ai l’habitude… »).

Être conscient des émotions ressenties

La rééducation demande de se faire confiance, d’accepter sa lumière sans en avoir peur et de réécrire objectivement ses réussites. Carolyne Crowe a proposé d’être conscient des émotions ressenties, d’identifier les lieux et individus toxiques pour s’en éloigner tant que l’on n’est pas capable d’interagir avec eux. Enfin, savoir reconnaître les personnes qui aident, soutiennent, et se remercier chaque jour des petites et grandes choses accomplies est essentiel. La stratégie "trois kifs par jour" fait rapidement boule de neige, permettant de voir ce qui va, pour envisager sereinement ce qui doit être amélioré sans se blâmer en premier.

  • * Kogan L.R., Schoenfeld-Tacher R., Hellyer P. et al. Veterinarians and impostor syndrome : an exploratory study. Vet Rec. 2020;187(7):271. urlz.fr/mDh6
  • À lire aussi : Le Syndrome d’imposture, d’Élisabeth Cadoche et Anne de Montarlot (éd. Les Arènes, 2020). Et un résumé sur urlz.fr/mDhA