Le FGF-23, un nouveau marqueur dans la prise en charge de la maladie rénale chronique féline - La Semaine Vétérinaire n° 2001 du 01/09/2023
La Semaine Vétérinaire n° 2001 du 01/09/2023

Urologie

FORMATION CANINE

Auteur(s) : Mylène Panizo

Conférencière

Christelle Maurey (A 98), diplômée de l’European College of Veterinary Internal Medicine-Companion Animals, professeure en médecine interne à l’École nationale vétérinaire d’Alfort.

Article rédigé d’après la webconférence « FGF 23 : un nouveau marqueur dans la prise en charge de la MRC féline », organisée par le laboratoire Idexx le 29 mars 2023.

Le facteur de croissance des fibroblastes 23 (FGF-23, pour fibroblast growth factor 23) est un acteur majeur du métabolisme phosphocalcique, connu depuis longtemps chez l’humain. Chez le chat atteint de maladie rénale chronique (MRC), des études récentes ont démontré l’intérêt de ce biomarqueur. Les recommandations de l’International Renal Interest Society (Iris), qui ont été actualisées, en tiennent compte, ce qui permet d’affiner la prise en charge de la MRC féline.

Un acteur clé de la régulation phosphocalcique 

Le FGF-23 est une protéine appartenant à la famille des facteurs de croissance des fibroblastes. Il est synthétisé par l’os (par les ostéoblastes et par les ostéocytes) et éliminé par les reins. C’est un acteur clé du métabolisme phosphocalcique, avec la vitamine D et la parathormone (toutes deux hyperphosphatémiantes et hypercalcémiantes). Il agit principalement sur les reins et les parathyroïdes. Le FGF-23 est une hormone hypophosphatémiante par son action hyperphosphaturiante (qui augmente la phosphaturie). Il exerce également un rétrocontrôle négatif en diminuant le calcitriol et la parathormone, et a une action globalement neutre sur la calcémie.

Son implication lors de MRC

Les chats atteints de MRC peuvent présenter des troubles osseux métaboliques. Au début de la maladie, l’augmentation du taux de FGF-23 plasmatique est un mécanisme compensateur qui se met en place en réponse à une augmentation de la phosphatémie due à une diminution du débit de filtration glomérulaire. L’augmentation du FGF-23 permet de réguler la phosphatémie. Lorsque la MRC s’aggrave, ces mécanismes compensateurs ne fonctionnent plus (car la diminution de la masse rénale limite l’excrétion urinaire de phosphore), la phosphaturie s’effondre et ainsi survient l’hyperphosphatémie.

Chez les chats atteints de MRC, l’élévation du FGF-23 plasmatique est précoce (dès les stades 1 et 2), et elle est continue au fur et à mesure de la dégradation de la fonction rénale. L’élévation est plus précoce que celles de la parathormone (à partir du stade 2) et de la phosphatémie (aux stades 3 et 4). Il semblerait que son élévation soit aussi plus précoce mais moins fréquente que celle de la symmetric dimethylarginine (SDMA). Il est ainsi possible que le taux de FGF-23 reste dans les normes chez des chats atteints d’une MRC au stade 2. De plus, sa valeur peut être modifiée en raison d’une hyperthyroïdie non contrôlée, d’une cardiopathie, d’un processus inflammatoire, d’une néoplasie, d’une anémie sévère, d’une lyse osseuse, ou en fonction de la phosphatémie et de la calcémie. Le FGF-23 ne doit donc pas être utilisé en tant qu’outil diagnostique pour la MRC.

Le FGF-23 est un marqueur prédictif indépendant de la survie et de la progression de la MRC. Son augmentation est associée négativement au taux de survie (de même que la créatininémie et la protéinurie). Chez l’humain, il est démontré que le FGF-23 entraîne des modifications cardiovasculaires qui participent à la mortalité des patients atteints de MRC. Cette causalité n’est pas démontrée à ce jour en médecine vétérinaire.

L’utilisation en pratique

Le dosage du FGF-23 plasmatique (par la méthode Elisa) est actuellement disponible uniquement chez le chat, et se réalise sur 1 ml de sérum. Cette mesure ne doit pas être utilisée en tant qu’outil diagnostique de MRC. Le diagnostic précoce de cette maladie repose encore sur le dosage de la SDMA et de la créatininémie, les données d’imagerie et l’analyse d’urine.

Le dosage du FGF-23 plasmatique est essentiellement indiqué dans les stades précoces (1 et 2) de MRC pour guider la prise en charge thérapeutique des troubles phosphocalciques. Il est utilisé comme aide à la décision pour prescrire un traitement de réduction de la phosphatémie.

L’alimentation de soutien rénal est restreinte en phosphore. Elle a une action significative sur la phosphatémie et la baisse du FGF-23. Elle a également un effet positif démontré sur la survie des chats atteints de MRC. Cependant, l’application de ce régime à tous les chats atteints de MRC est remise en cause, en particulier pendant les stades précoces. En effet, une alimentation trop restreinte en phosphore pourrait favoriser l’apparition d’une hypercalcémie, qui pourrait elle-même occasionner l’apparition d’une néphrocalcinose et de calcifications ectopiques. Le dosage du FGF-23 est donc utile pour affiner la démarche thérapeutique concernant la réduction des apports phosphorés.