Basse-cour
FORMATION MIXTE
Auteur(s) : Samuel Sauvaget* (N 07)* Dr Bassecour vétérinaire (drbassecour.fr), Labovet Conseil (labovetconseil.fr)
Les troubles de la ponte sont régulièrement rapportés dans les élevages de poules pondeuses. On distingue habituellement deux catégories de troubles : les anomalies métaboliques et les causes infectieuses. Ne sont décrites dans cet article que des situations et des prises en charge dans le cadre d’une médecine d’élevage, valables même pour des petits élevages amateurs.
La ponte physiologique
Une poule pondeuse adulte performante est capable de pondre près d’un œuf par jour en moyenne. Les besoins quotidiens en calcium de la poule pondeuse sont de 4 à 5 grammes par jour, dont 2,5 gr destinés à la fabrication de la coquille. D’autres éléments nutritionnels sont également nécessaires pour cette synthèse : phosphore, zinc, magnésium, manganèse, vitamine D3, etc. La synthèse de l’œuf s’accomplit la nuit dans le tractus génital et la ponte s’effectue tôt le matin. Elle est rendue possible par un déploiement important d’énergie et l'assimilation de nutriments, ce qui implique des apports alimentaires suffisants et un bon état sanitaire de la poule. Toute anomalie de santé peut conduire à une défaillance de la ponte.
Les signes cliniques
En premier lieu, c’est la diminution des consommations d’eau et d’aliments qui alertera l’éleveur, laquelle sera suivie très rapidement de la chute du taux de ponte. On pourra aussi observer des anomalies de coquille : molle, fragile, déformée, striée, décolorée. En fonction de la gravité de la cause et de son intensité, des signes cliniques généraux peuvent suivre : apathie, difficultés locomotrices, prolapsus cloacal, mortalité.
Le diagnostic différentiel
De nombreux agents pathogènes à tropisme génital peuvent être responsables de troubles de la ponte : coronavirus de la bronchite infectieuse, adénovirus de l’EDS (Egg Drop Syndrom), mycoplasmose, colibacillose… Ces maladies se caractérisent par des chutes du taux de ponte, des anomalies de la coquille, des accumulations liquidiennes ou fibrineuses dans les voies génitales et la cavité cœlomique (salpingite et cœlomite) et par une dégradation de l’état général.
Un examen nécropsique est souvent nécessaire pour observer les différentes lésions et effectuer les prélèvements nécessaires (bactériologie, PCR) au diagnostic définitif. Des sérologies sont également disponibles pour mettre en évidence la présence d’anticorps.
Concernant les anomalies métaboliques, l’hypocalcémie en lien avec des défauts d’apports ou d’absorption digestive oblige la poule à utiliser la réserve de calcium des os pour fabriquer la coquille, ce qui provoque une diminution de la ponte, une fragilité des œufs, mais aussi du squelette de la poule, pouvant conduire dans les cas graves à des fractures spontanées ou à des paralysies. En élevage rationnalisé, ce risque est limité. Dans les petits élevages, le risque est accentué par la consommation excessive de restes de table et l’absence d’une complémentation minérale (grit, coquilles d’huîtres broyées…). Le dosage du calcium sanguin permet d’objectiver l’hypocalcémie.
Autre cause métabolique, la stéatose hépatique, qui se caractérise par un stockage progressif de graisses dans le foie du fait d’un excès d’apports énergétiques alimentaires, lequel provoque la dégénérescence des hépatocytes et conduit à une altération de son intégrité et de son fonctionnement, avec des conséquences sur la fonction reproductrice. En élevage, le dosage du cholestérol et des transaminases (ASAT) est intéressant pour anticiper la survenue de la stéatose et, ainsi, conseiller des modifications nutritionnelles et l’emploi de protecteurs hépatiques (voir le diagramme de suivi biochimique du cholestérol).
Les traitements et la prévention
Pour les maladies infectieuses, les traitements choisis seront fonction du diagnostic étiologique : des antibiotiques en cas d’infection bactérienne, mais en faisant attention à certains délais de retrait qui imposent d’écarter de la consommation les œufs pondus pendant une période définie après le traitement ; des stimulants immunitaires en cas d’infection virale ; des compléments nutritionnels dans tous les cas.
Comme toujours dans le cadre des maladies infectieuses, la biosécurité joue un rôle clé dans leur maîtrise : hygiène des intervenants, respect des barrières sanitaires, nettoyage et désinfection des locaux, potabilisation de l’eau de boisson.
La vaccination est indispensable dans de nombreux cas, afin de maîtriser ces maladies. Elle s’effectue en nébulisation (bronchite infectieuse, colibacillose), en goutte dans l’œil (mycoplasmose) ou en injection (EDS). Il n’existe généralement pas de conditionnements adaptés aux petits élevages mais les tarifs restent habituellement accessibles. Le choix des vaccinations sera inscrit dans le protocole de soins du bilan sanitaire d’élevage (BSE) en fonction de l’historique et des diagnostics obtenus sur l’élevage.
Pour les maladies métaboliques, c’est principalement l’alimentation qui fera à la fois office de traitement et de prévention : apports minéraux (calcium) et vitaminiques (vitamine D) adaptés pour traiter et prévenir l’hypocalcémie ; apports énergétiques maîtrisés et hépatoprotecteurs dans le traitement et la prévention de la stéatose hépatique. À noter que des mesures zootechniques (température, ventilation, distribution de l’aliment) sont également souvent nécessaires pour accompagner ces mesures diététiques.
Le mal de ponte ou rétention d’œuf
Il s’agit d’une autre manifestation des troubles de la ponte chez la poule, mais dont la gestion sera individuelle. L’œuf reste coincé dans le salpinx ou le cloaque. Il existe des causes anatomiques (œuf trop gros), métaboliques (hypocalcémie) ou infectieuses (salpingite). La stabilisation de l’état général est primordiale avant toute intervention. Le diagnostic étiologique déterminera la marche à suivre : injection de calcium, bains de siège, taxis et extraction sous anesthésie générale, chirurgie (salpingotomie ou salpingectomie), couverture antibiotique.