Plus de la moitié des sinistres 2022 ont trait à la reproduction - La Semaine Vétérinaire n° 2008 du 27/10/2023
La Semaine Vétérinaire n° 2008 du 27/10/2023

Sinistralité de la profession

ANALYSE GENERALE

Auteur(s) : Par Irène Lopez

Le dernier rapport vétérinaire de la MACSF révèle que, de manière générale, la sinistralité est légèrement à la baisse dans la profession. Néanmoins, parmi les résultats remarquables, figure une augmentation des litiges liés à la stérilisation des femelles chez les animaux de compagnie. Décryptage. 

La Mutuelle d'assurances du corps de santé français (MACSF) compte 1 551 vétérinaires sociétaires. L’année dernière, l’assureur généraliste a recensé 155 sinistres déclarés contre 191 en 2021. Cette légère baisse fait reculer son taux de sinistralité de deux points.

Si la répartition des réclamations ne connaît pas de modification majeure, il est tout de même à noter une part un peu plus importante de sinistres touchant les animaux de compagnie : plus d’un sur deux (54 %) concerne les chats et les chiens. Marie-Émilie Pétigny, juriste MACSF en charge des sinistres RCP concernant les professionnels de la santé, précise que les plaintes ont notamment concerné le prix des actes. La juriste a, par exemple, traité un dossier dans lequel le propriétaire d’un animal reprochait au vétérinaire le coût d’une incinération car le professionnel ne lui avait pas précisé le montant, au préalable. Cette situation semble emblématique de la tendance sociétale observée par la profession : les propriétaires d’animaux deviennent de plus en plus procéduriers. Depuis la crise sanitaire, ils sont plus enclins à réclamer et à se montrer agressifs. 

Le reste des réclamations se partage entre les animaux de rente (très majoritairement des bovins ; un seul litige se rapporte à un élevage de volailles), avec une part de 43 %, tandis que les chevaux représentent 3 % des dossiers. « Aucun litige n’a visé de NAC, alors que la tendance était à la hausse ces dernières années », ajoute la juriste. Et de s'interroger : « Les vétérinaires ont-ils eu l’impression d’avoir moins pris en charge des NAC ? Ou sont-ils davantage formés ? »

Des litiges en augmentation chez les animaux de compagnie

Un des faits marquants de cette année 2022 concerne les sinistres qui ont trait à la reproduction. Marie-Émilie Pétigny déclare : « La sinistralité, déjà importante auparavant dans ce domaine, est en augmentation, surtout chez les animaux de compagnie. Elle représente 78 % des sinistres déclarés pour les bovins (dont plus des 2/3 concernent des césariennes) et 40 % des sinistres déclarés pour les chiens et chats, contre 25 % en 2021 ! » 

La tendance à l’augmentation des litiges liés à la stérilisation des femelles chez les animaux de compagnie se confirme très largement, puisqu’elle représente 20 % des sinistres déclarés pour ces animaux. L’échec des ovariectomies est majoritaire sur ces cas.

Deux éléments pourraient expliquer ces données. Le premier reposerait sur une hausse des actes suite à des campagnes de communication pour sensibiliser les propriétaires à faire stériliser leur animal. Le second pourrait trouver son origine outre-Atlantique, où les félins sont pris en charge de plus en plus tôt. Les vétérinaires français auraient-ils pris le pas, stérilisant des chatonnes dès 3 mois contre 6 auparavant, augmentant ainsi les réactions adverses à l’anesthésie ?

En revanche, seul 5 % des litiges chez les chiens et chats ont trait à l’établissement de certificats, ce qui signe une légère baisse de sinistralité dans ce domaine.

« Le recours au certificat téléchargeable établi par le Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL) permet désormais d’éviter des mises en causes. Les problèmes liés aux certificats relevaient bien souvent d’une question administrative », rappelle la juriste en charge des sinistres RCP. Fini les mentions manquantes. Les certificats sont aujourd’hui mieux rédigés que par le passé. Outre le document téléchargeable, les vétérinaires sont également davantage sensibilisés aux aspects juridiques de la profession.

Enfin, 22 % des litiges sur les soins délivrés aux animaux de compagnie relèvent d’actes de médecine, notamment liés au diagnostic. Les actes de chirurgie, et plus particulièrement l'orthopédie, représentent 20 %, tandis que 6 % des cas sont en rapport avec l’anesthésie.

Transfert de garde : une vigilance de mise

La garde de l’animal reste génératrice de sinistres, avec 5 % des litiges chez les chiens et chats. Lorsque le vétérinaire prend en charge l’animal, il existe un transfert de garde qui doit l’inciter à une vigilance particulière. Marie-Émilie Pétigny cite le cas classique d’un propriétaire blessé par son chat lors de la consultation. L'animal l’a griffé sur la main. Comme le transfert temporaire de garde s’effectue lors d’une consultation, la responsabilité du praticien a été engagée. La mesure, considérée comme injuste par le vétérinaire est néanmoins légale.

Le rapport vétérinaire de la MACSF comprend d’autres cas concrets permettant de mettre en lumière des points de vigilance, voire d’inciter les vétérinaires à revoir leurs pratiques. Comme dans ce cas d'espèce : « Suite à une césarienne sur une chienne, sept chiots sont sortis vivants. Malheureusement, à son réveil, la chienne s’est attaquée à ses petits et quatre chiots ont eu les oreilles mordues et déchirées. L’éleveuse a demandé le remboursement du manque à gagner pour la vente des quatre chiots concernés. L’incident étant survenu lors de l’hospitalisation de la mère et des chiots, ils étaient sous la surveillance du vétérinaire. Cette surveillance n’a pas été suffisamment rapprochée pour éviter l’accident. » Ici encore, la responsabilité du vétérinaire a été engagée pour défaut de surveillance.

Marie-Émilie Pétigny poursuit l’analyse du rapport vétérinaire, en pointant que : « Les mises en cause liées à la contention sont à la marge, tout comme celles liées aux vaccins et aux infections nosocomiales. »

Quant aux litiges liés aux soins délivrés aux bovins, 13% d'entre eux relèvent d’actes de médecine (le diagnostic et la vaccination notamment). La sinistralité liée au drenchage des bovins, elle, reste stable, avec seulement trois sinistres en 2022. Deux cas relèvent de l'anesthésie et deux autres portent sur des actes de chirurgie.

Se voulanr rassurante sur la situation, la juriste conclut : « Sur les 155 dossiers déclarés en 2022, tous ont fait l’objet d’une gestion amiable par la MACSF. »