La WSAVA fait le point sur le diagnostic et le traitement de la PIF - La Semaine Vétérinaire n° 2012 du 24/11/2023
La Semaine Vétérinaire n° 2012 du 24/11/2023

ANALYSE CANINE

Auteur(s) : Par Anne-Claire Gagnon

Oui, la péritonite infectieuse féline est désormais guérissable. Les modalités du traitement, après un diagnostic de certitude, ont été précisées lors du dernier congrès de la World Small Animal Veterinary Association, à Lisbonne.

Alors que la World Small Animal Veterinary Association (WSAVA) a inclus l'analogue de nucléoside antiviral GS-441524 dans sa dernière liste1 des molécules essentielles, des conférences étaient consacrées à la péritonite infectieuse féline (PIF) lors du congrès mondial de l’association, qui s’est déroulé à Lisbonne (Portugal) en septembre 2023. Samantha Taylor, praticienne en Angleterre et membre de l’International Society of Feline Medecine (ISFM), est toujours enthousiaste de vivre la révolution thérapeutique de la PIF, pour laquelle elle a créé une adresse email2 dédiée, afin de répondre aux questions des vétérinaires du monde entier. La question désormais essentielle est celle du coût du diagnostic comme du traitement, pour les pays où l’usage des antiviraux est autorisé.

Un diagnostic par étapes

De par sa transmission oro-fécale, le coronavirus félin (FCoV) est particulièrement contagieux, surtout en collectivités félines (élevages et refuges). Pour autant, la forme clinique de la PIF y est rare, avec une prévalence de 1 à 3 %, surtout lors d’adoption. En chatteries et refuges, les co-infections sont possibles avec le Clostridium, le FeLV et le FIV. Le diagnostic nécessite d’éliminer d’autres affections, notamment le lymphome, la toxoplasmose, la cholangiohépatite et la pancréatite. Une concomitance de signes cliniques et biologiques, ainsi que des PCR sur épanchements, sont recherchés. Il convient de ne jamais traiter sur la base d’une sérologie positive et, pour sa part, Samantha Taylor ne recommande pas non plus de traiter les chats excréteurs du FCoV.

La distinction PIF humide et sèche n’est plus de mise, les deux formes étant l’expression d’une même maladie, les granulomes précédant la survenue des épanchements. Les signes neurologiques, qui dépendent de la localisation des lésions, comprennent de l’ataxie, des convulsions, des signes vestibulaires et/ou oculaires et des précipités kératiques. L’analyse sanguine montre souvent une anémie, une hyperglobulinémie avec un rapport albumine/globulines < 0,4 et l’Alpha-1-glycoprotéine acide (AGP) non spécifique > 1,5 g/l. L’échographie Pocus est essentielle pour localiser un épanchement, même peu abondant, sur lequel la PCR sera réalisée (et non sur le sang). Le test immunohistochimique est le seul test de confirmation réalisable du vivant du chat sur une biopsie, car pouvant montrer la présence des FCoV dans les macrophages.

Une récente étude3 menée sur 307 chats montre que 63 % des félins atteints de PIF sont des mâles, qui plus est de race. Et que plusieurs cas peuvent survenir sur une même portée.

Des traitements désormais établis

Samantha Taylor a souligné que la communauté scientifique internationale a appris des chats en réalisant les traitements. D’abord avec le GC-376, puis avec le GS-5734 ou Remdésivir, dont le principe actif GS-441524 est actuellement le plus utilisé, et, en dernier lieu, avec le molnupiravir, moins coûteux4. Après la publication princeps5 de Niels Pedersen (UC Davis) en 2018, la collaboration mondiale de tous les vétérinaires félins a été déterminante. Elle reste intense, soutenue par des laboratoires engagés comme Bova, qui en Australie d’abord, puis au Royaume-Uni, a mis à disposition des professionnels des produits de qualité et contrôlés. La douleur générée chez un chat sur deux par l’injection sous-cutanée du Remdésivir et du GS-441524 a conduit les vétérinaires et industriels à privilégier la voie orale. La dose administrée doit être adaptée au fur et à mesure du gain de poids du patient. Le taux de guérison clinique est de 84,4 %, et l’analyse effectuée sur les 9,1 % de décès tend à établir qu'ils seraient dus à une intervention thérapeutique trop tardive.

Selon l’expérience de Sam Taylor, avec ce traitement, l’hyperthermie diminue en quelques jours, puis les signes cliniques régressent en quelques semaines (1 à 3). Quant à la normalisation des paramètres biochimiques, elle nécessite plusieurs mois. Le taux de récidive est de 4,1 %, avec des délais variables après l’arrêt du traitement. Le suivi clinique et biochimique est essentiel, notamment avec le dosage de l’AGP qui est un bon indicateur de rémission, généralement dans les 12 semaines après le début du traitement. La majorité des chats atteints étaient jeunes et ont été vaccinés et stérilisés en cours de traitement3, sans souci. Il reste désormais à ce que le ou les traitements soient accessibles à tous, du point de vue économique et réglementaire. 

  • Bibliographie
  • 1. Steagall P.V., Pelligand L., Page S. et al. The 2023 World Small Animal Veterinary Association (WSAVA): list of essential medicines for cats and dogs. J. Small Animal Pract. 2023. urlz.fr/ov8y
  • 3. Taylor S.S., Coggins S., Barker E.N., et al. Retrospective study and outcome of 307 cats with feline infectious peritonitis treated with legally sourced veterinary compounded preparations of remdesivir and GS-441524 (2020-2022). J. Feline Med. Surg. 2023;25(9):1098612. urlz.fr/ovaD
  • 4. Compter entre 1000 et 2000 euros pour le traitement à base de GS-441524, en fonction du fournisseur, du poids du chat. 
  • 5. Murphy B.G., Perron M., Murakami E., et al. The nucleoside analog GS-441524 strongly inhibits feline infectious peritonitis (FIP) virus in tissue culture and experimental cat infection studies. Veterinary Microbiology. 2018;219:226-33. urlz.fr/ovb1