Fiscalité
ENTREPRISE
Auteur(s) : Par Holly Jessopp
Le rachat de cliniques et d’activités libérales vétérinaires, notamment de vétérinaires partant à la retraite, est d’actualité. C'est l’occasion d’examiner la fiscalité applicable au vétérinaire cédant, à savoir l'imposition sur la plus-value et ses éventuelles exonérations.
Le fonds libéral comprend des éléments corporels (matériel, etc.) et incorporels (clientèle, droit au bail, contrat de travail des salariés). La jurisprudence a admis qu’une clientèle libérale pouvait être incluse dans la cession d'un fonds libéral, à condition que soit sauvegardée la liberté de choix du client.
La valorisation du fonds libéral se fera de différentes manières, soit en valorisant les actifs en s’appuyant sur les données du marché (valeur de marché), soit par une approche financière selon laquelle le fonds libéral vaut ce qu’il rapporte (valeur de rendement). Les éléments à prendre en compte sont nombreux, comme la qualité du portefeuille clientèle, le personnel, les équipements ou la localisation géographique.
Les deux principaux modes de cession de l’activité libérale sont la cession du fonds libéral et la cession de titres d’une société d’exercice libéral. Contrairement à la cession de fonds libéral, la cession de titres entraîne la cession de l’actif et du passif de la société.
La question de la fiscalité, notamment celle de l’imposition des plus-values réalisées par le cédant, doit être nécessairement intégrée dans le projet de cession par voie d’anticipation.
L’imposition de la cession de l’activité libérale
En cas de cession du fonds libéral, vous serez immédiatement imposable sur les bénéfices réalisés à la date de cession au titre de l’impôt sur le revenu, à la condition toutefois que ces bénéfices n’aient pas encore été imposés1. En outre, vous serez imposé sur les plus-values professionnelles réalisées, c’est-à-dire la différence entre le prix d’acquisition du fonds et son prix de cession. Attention, si vous êtes à l’origine de la création du fonds, alors le prix d’acquisition du fonds sera considéré comme nul, ce qui entraînera par conséquent une plus-value plus forte.
La plus-value professionnelle est imposée différemment selon qu’il s’agisse d’une plus-value à court terme (moins de deux ans), ou d’une plus-value à long terme (plus de deux ans).
Ainsi, la plus-value à court terme sera assimilée à un bénéfice et relèvera d’une imposition au titre des Bénéfices non commerciaux (BNC). Le régime applicable sera celui du micro-BNC, pour un chiffre d’affaires inférieur à 77 700 €, et sera du ressort du régime de la déclaration contrôlée, au-delà de ce montant. Le montant de l’impôt sera déterminé, entre autres, en appliquant le barème progressif de l’impôt sur le revenu à ces bénéfices. Un simulateur de calcul est mis à disposition en ligne par le gouvernement2.
La plus-value à long terme relèvera d’une imposition au prélèvement forfaitaire unique ou « flat tax », qui s'élève à 30 %, comprenant 17,2 % au titre des prélèvements sociaux et 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu.
En cas de cession de titres, vous serez redevable de l’impôt sur le revenu3 sur la plus-value réalisée. L’imposition s’effectuera moyennant un prélèvement forfaitaire unique de 30 % comprenant 17,2 % au titre des prélèvements sociaux et 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu.
Néanmoins, il est possible de choisir d’être imposé selon le barème progressif de l’impôt sur le revenu. Cette option annuelle, qui s’applique à l’ensemble des revenus et plus-values, peut permettre l’application des abattements portant sur la durée de détention, mais seulement pour les titres acquis avant 20184.
En conséquence, la fiscalité du vétérinaire cédant est lourde, notamment lorsque le vétérinaire est à l’origine de la création du fonds libéral avec une valorisation importante.
Les régimes d’exonération des plus-values professionnelles
Toutefois, il existe un certain nombre de régimes d’exonération permettant de ne pas payer l’imposition sur les plus-values. Chaque régime est soumis à un ensemble de conditions cumulatives, lesquelles doivent faire l’objet d’une analyse approfondie et individuelle. Nous nous limiterons ici à un exposé général des régimes d’exonération.
Exonération des plus-values professionnelles des TPE en fonction des recettes
Si vous êtes entrepreneur individuel, ou associé d’une société de personnes relevant de l’impôt sur le revenu et qui participe de façon effective à l’activité professionnelle, vous pouvez bénéficier d’une exonération de l’imposition sur les plus-values professionnelles en fonction des recettes de votre entreprise5.
Pour en bénéficier, votre entreprise (i) doit être imposée sous le régime BNC professionnels (ii), avoir exercé son activité pendant au moins cinq ans (iii) et ne doit pas dépasser un seuil de chiffre d’affaires annuel de 126 000 €.
Exonération des plus-values professionnelles en fonction du prix de cession
Si vous cédez votre entreprise individuelle, une branche complète de votre activité ou la totalité des titres d’une société relevant de l’impôt sur le revenu, vous pouvez bénéficier d’une exonération, à la condition que le prix fixé des éléments transmis (ou, à défaut, leur valeur vénale), auquel sont ajoutées les charges en capital et les indemnités stipulées au profit du cédant, n’excède pas 1 000 000 €6. Ce dispositif s’applique également si le cédant est une société soumise à l’Impôt sur les sociétés.
Exonération des plus-values professionnelles pour durée de détention de l’immeuble dévolu à l’activité libérale
Un entrepreneur individuel ou une société de personnes relevant de l’imposition sur les sociétés et exerçant une activité libérale de vétérinaire depuis au moins cinq ans peut bénéficier d’une exonération d’imposition sur la plus-value portant sur des biens immobiliers inscrits à l’actif immobilisé et affectés à l’exploitation de l’activité libérale7. Ainsi, un abattement de 10 % par année de détention du bien au-delà de la cinquième année s’applique (i) aux biens immobiliers affectés à l’exploitation (ii) et aux titres de société dont l’actif est principalement constitué des mêmes biens.
Exonération des plus-values professionnelles en cas de départ à la retraite du vétérinaire cédant
En cas de départ, le cédant d’une activité libérale bénéficie d’une exonération particulièrement avantageuse de l’imposition sur les plus-values.
Ainsi, dans le cadre d’une cession d’une entreprise individuelle ou de parts dans une société de personnes, vous pouvez bénéficier d’une exonération de l’imposition sur les plus-values professionnelles en cas de départ à la retraite8. Le régime fiscal du cédant est sans incidence sur la mise en œuvre de cette exonération.
Pour en bénéficier, vous devez personnellement (i) avoir exercé votre activité pendant au moins cinq ans (ii) et transmettre à titre onéreux l’intégralité de votre entreprise individuelle ou l’intégralité des parts de la société de personnes soumise à l’impôt sur le revenu (iii). En cas de vente à une société, vous ne devez pas contrôler directement ou indirectement celle-ci à plus de 50 % des titres ou droits de vote. Enfin, vous devrez cesser toute fonction dans l’entreprise et faire valoir vos droits à la retraite dans un délai de vingt-quatre mois avant ou après la date de cession effective de votre entreprise (iv).
Dans le cadre de la cession de titres d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés, le cédant bénéficie également d’une exonération de l’imposition des plus-values9. Cependant, seule la cession des titres sociaux peut bénéficier du régime d'exonération, et non la vente du fonds libéral par la société.
Pour conclure, la fiscalité du vétérinaire cédant est complexe et nécessite un accompagnement professionnel.