ÉcoAntibio 3
PHARMACIE
Auteur(s) : Propos recueillis par Michaella Igoho-Moradel
Jacqueline Bastien (L 72), praticienne à Brassac-les-Mines (Puy-de-Dôme) et membre de la Commission médicament de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires, a participé aux travaux d'élaboration du plan ÉcoAntibio 3. Elle revient sur ses avancées.
Comment accueillez-vous le plan ÉcoAntibio 3 ?
Le plan ÉcoAntibio 3 est une avancée dans la continuité. En tant que prescripteur et pilote, je l’accueille favorablement car il prend globalement en compte les recommandations du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) s’agissant notamment de sa coconstruction et de sa gouvernance. Les personnes pilotes ont été impliquées dans son élaboration et dans celle du cahier des charges de l’appel à projets 2024. Pour les vétérinaires praticiens, les plans ÉcoAntibio 1 et 2 ont imposé beaucoup de contraintes d’ordre réglementaire. J'apprécie que ce plan 3 comporte des actions visant à leur apporter des aides à la décision pour prescrire et valoriser leurs savoir-faire.
Quelles mesures fortes retenez-vous ?
Le plan ÉcoAntibio 3 ne prévoit pas de contraintes supplémentaires pour les vétérinaires praticiens, hormis un seul objectif chiffré pour les praticiens canins. Mais ce n’est pas ce que je retiens comme objectif prioritaire de ce plan. L’une de ses nouveautés est la notion de « conférence de consensus », un axe piloté par l’Agence nationale du médicament vétérinaire (Anses-ANMV). Dans un certain nombre de recommandations d’usage, nous n’avons pas de consensus. Or, il y a des sujets sur lesquels nous avons besoin de confronter des avis d’experts et des avis de praticiens. Nous tentons de trouver ces consensus à l’échelle des filières. Les fiches de bon usage des antibiotiques pour certains animaux de rente sont en cours de révision et de validation pour plusieurs infections. Des consensus sont indispensables sur l’utilisation de diverses molécules ou de certains traitements. Nous exprimons actuellement nos besoins pour l’année 2024. Il faut encore définir la méthodologie de travail et déterminer les sujets prioritaires ainsi que les critères de hiérarchisation (volumes d’antibiotiques utilisés, fréquence des infections, etc.).
Les praticiens ont donc besoin d’outils pour mieux prescrire ?
Il est primordial de doter les praticiens d’outils d’aide à la décision. En premier lieu, ils devraient pouvoir recourir à des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) validés. Il y a de nombreuses offres sur le marché, mais notre préoccupation est de savoir quelle est la validité de ces tests et quelles en sont les limites. Nous avons besoin de ces informations pour préciser plus rapidement notre diagnostic et orienter notre prescription. Concernant les diarrhées des veaux, par exemple, des tests nous orientent vers tel virus ou telle bactérie ; or, le choix du traitement n’est de facto pas le même. C’est un gain de temps pour le praticien. Par ailleurs, dans notre pratique quotidienne, nous avons recours à des molécules anciennes pour lesquelles les posologies des AMM ne sont plus adaptées. Il devient plus que nécessaire de les réviser car il y a un risque de manque d’efficacité et la menace de générer des phénomènes de résistance lorsque les posologies sont inadaptées. À ce propos, je peux citer l’exemple des benzylpénicillines. Nous avons conscience que ce travail n’est pas attractif pour les fabricants en raison du manque de retour sur investissement. Un groupe européen élabore actuellement une méthodologie pour atteindre cet objectif. Tout reste à faire !