Faune sauvage
ANALYSE GENERALE
Auteur(s) : Par Caroline Driot
Mis en place en 1972, le réseau national des échouages (RNE) constitue le principal outil de suivi des populations de mammifères marins en France. Explications avec Sarah Wund (Liège 18), vétérinaire responsable de la surveillance sanitaire de ces animaux au sein de l’observatoire Pelagis.
Comment s’organise la surveillance des populations de mammifères marins en France ?
Cette surveillance repose principalement sur l’investigation des échouages signalés au réseau national des échouages (RNE) en métropole et en outre-mer. Créé en 1972 et coordonné par l’observatoire Pelagis, le RNE est constitué de correspondants locaux, bénévoles ou professionnels, biologistes, naturalistes, agents de l’environnement, mais aussi vétérinaires. Selon leur niveau de qualification, ces correspondants sont chargés d’effectuer un examen externe et/ou interne des animaux échoués et d’enregistrer les données relatives à l’évènement : date, localisation, espèce concernée, âge des individus. Les nécropsies sont pour leur part réalisées par des vétérinaires uniquement. Ces examens font l’objet de protocoles standardisés. En tant que coordinateur du RNE, l’observatoire Pelagis centralise les données collectées sur le terrain. Celles-ci sont validées et consolidées par des biologistes et vétérinaires expérimentés dans le domaine puis analysées pour déterminer et suivre l’évolution de la mortalité, ainsi que les dominantes pathologiques dans les différentes espèces.
Quelles missions assurez-vous en tant que vétérinaire au sein de l’observatoire Pelagis ?
Je suis responsable de la stratégie de surveillance sanitaire des mammifères marins au niveau national. Je réalise des nécropsies sur les animaux échoués suffisamment préservés - soit près d’une centaine par an, sur plus de 2000 échouages signalés chaque année en France. Ces autopsies permettent de déterminer les causes de mortalité, mais aussi d’évaluer l’état sanitaire des animaux et la circulation de pathogènes qui pourraient constituer une menace pour la conservation de ces espèces, voire pour la santé publique. Les prélèvements réalisés sur les animaux échoués permettent aussi d’obtenir des données biologiques, telles que leur statut reproducteur ou leur régime alimentaire ou encore de suivre la contamination chimique (métaux lourds et polluants organiques) de ces populations. En tant que vétérinaire spécialisée en épidémiologie, je participe à l’analyse des données issues du RNE et à la rédaction de son rapport annuel. J’anime également des formations destinées aux correspondants locaux du RNE. Pour finir, je peux être amenée à prendre en charge des animaux échoués vivants (environ 5 % des cas) avec, selon les situations, le renflouage de l’animal, le transfert vers un centre de soins pour les phoques en mauvais état de santé, ou l’euthanasie.
Quel est le profil des vétérinaires impliqués dans le RNE ? Comment sont-ils formés ?
Ce sont généralement des praticiens en clientèle canine, intervenant à titre bénévole sur des échouages, pour réaliser des nécropsies et des prélèvements, ou prendre en charge des animaux en détresse. L’observatoire Pelagis a également mis en place une convention de collaboration, avec des vétérinaires exerçant en laboratoire ou en milieu universitaire, pour les analyses histologiques notamment. On compte actuellement 35 vétérinaires affiliés au RNE, et 25 sont en cours d'intégration.
L’observatoire Pelagis organise en moyenne trois sessions de formation par an à destination des vétérinaires, chacune pouvant accueillir huit participants. Les formations sont animées par les membres du pôle échouage de Pelagis, dont je fais partie, ainsi que par nos vétérinaires conventionnés. Elles se déroulent sur trois jours, avec une journée pratique, en métropole ou en outre-mer. Cette année, il devrait y avoir une formation à Saint-Pierre-et-Miquelon, et deux à La Rochelle. L’objectif est d’être capable de réaliser une autopsie et des prélèvements selon les standards du RNE, afin d’évaluer l’état sanitaire d’un animal, de déterminer la cause de la mort et d’obtenir des données pour les études épidémiologiques. Au programme : des généralités sur le RNE, les mammifères marins et les modalités de surveillance sanitaire de ces animaux pour commencer. Puis nous détaillons l’anatomie des cétacés et des phoques, les pathologies classiquement rencontrées ainsi que les protocoles de nécropsies, d’échantillonnage et les modalités de rédaction d’un rapport standardisé.
Intéressé/e pour devenir correspondant local du RNE ?
Envoyez un mail à pelagis@univ-lr.fr, en précisant votre identité, votre zone d’intervention, votre cadre d’intervention (bénévolement en dehors du travail ou dans le cadre professionnel), vos coordonnées et vos disponibilités.
Captures dans des engins de pêche, traumatismes, mort naturelle… plus de 2 000 échouages sont signalés chaque année en France
Le rapport du RNE pour l’année 2021 fait état de 2 046 échouages en France (métropole et outre-mer), 74 % concernent des cétacés et 26 % des pinnipèdes (phoques et morses). 54 % des cétacés et 71 % des pinnipèdes ont pu être examinés selon le protocole d’examen lésionnel externe, et 10 % des cétacés et 6 % des pinnipèdes ont fait l’objet d’un examen lésionnel interne. La capture dans des engins de pêche constituait la première cause de mortalité chez le dauphin et le marsouin communs. La mort due à un traumatisme, d’origine anthropique ou non (compétition interspécifique), représenterait la principale cause pour le grand dauphin. En 2021, sur la base des examens internes, la mort naturelle résultant d’un état pathologique concernait 10 à 27 % des cétacés et 25 à 36 % des phoques. Parmi les causes ont été notamment identifiés des processus infectieux affectant différents organes (poumons, foie, système lymphatique, voire septicémie), des tumeurs ainsi que des infestations parasitaires massives.