Inauguration d’UniLaSalle à Rouen : opération séduction - La Semaine Vétérinaire n° 2023 du 01/03/2024
La Semaine Vétérinaire n° 2023 du 01/03/2024

École vétérinaire privée

ANALYSE GENERALE

Auteur(s) : Par Tanit Halfon

Le vendredi 16 février, toutes les équipes du campus de Rouen d’UniLaSalle et une bonne partie des étudiants se sont mobilisées pour la journée d’inauguration de son nouveau cursus vétérinaire. Au programme : la visite des locaux, présents et futurs. Des responsables politiques, dont le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, avaient fait le déplacement.

En septembre 2022, le cursus vétérinaire proposé par l’institut d’enseignement supérieur à but non lucratif UniLaSalle ouvrait ses portes sur la commune de Mont-Saint-Aignan* (Seine-Maritime). Un an et demi plus tard, le vendredi 16 février, s'est déroulée son inauguration. Au total, l’école, aura accueilli près de 700 participants, dont 300 invités (élus, entreprises, parties prenantes, journalistes, etc.), 100 salariés de Rouen et du groupe UniLaSalle… et 300 étudiants. Ces derniers partagent pour l’instant les installations d’origine, à savoir un bâtiment vitré de 15 000 m2 implanté sur 3 hectares de terrain dont la capacité maximale est de 1 000 étudiants… Ce qui, à l’heure actuelle, suffit puisque 600 élèves y sont inscrits, dont les 240 des deux premières promotions vétérinaires d’UniLaSalle. Des ajustements ont toutefois été entrepris, notamment pour l’enseignement de l’anatomie, dont les premières dissections et ateliers d’ostéologie ont commencé dès la rentrée 2022. Par la suite, un pôle anatomie complet sera aménagé. À terme, d’ici 2030,  plus de 1 200 étudiants devraient fréquenter le campus, dont 720 futurs vétérinaires.

Des travaux en 2024 grâce aux financements publics

Cette inauguration aura permis de découvrir le futur hôpital pour animaux de compagnie/NAC. Bien que, pour l’instant, seule sa visite virtuelle soit possible, tous les plans sont finalisés. Ils prévoient 3 niveaux : un rez-de-chaussée dédié aux activités hospitalières, incluant les urgences et soins intensifs, et deux étages abritant des bureaux, des salles dédiées à l’enseignement et à la recherche, une salle de simulation, un espace de coworking, des locaux techniques, etc. Il fera face au campus, en lieu et place de son actuel parking (qui migrera en sous-sol). Le permis de construire a été obtenu et les travaux devraient débuter dès ce mois de mars pour une mise en service pour la rentrée 2025-2026.

Un investissement soutenu par les responsables politiques locaux présents à l’inauguration comme le président de la région Normandie Hervé Morin et le vice-président de la métropole Rouen Normandie Abdelkrim Marchani. La région a ainsi injecté dans l’école 21,67 millions d’euros, dont 20 millions via le plan Campus en 2022 pour le financement foncier (hôpital et espaces pédagogiques associés spécifiques à la formation vétérinaire, acquisition des équipements académiques et cliniques) et 1,13 million via le dispositif Normandie Sup ‘2023 pour le développement de l’école (dépenses de personnel, mobilités, professeurs invités et prestations intellectuelles, etc.). La métropole de Rouen est le deuxième investisseur public pour la construction de l’hôpital, à hauteur de 6 millions d’euros. Le reste provenant des fonds propres d’UniLaSalle. Le coût total de l’infrastructure s’élèverait à 34 millions d’euros.

Des élus enthousiastes

Hervé Morin aura montré le plus grand enthousiasme lors de la visite des locaux. Dans la salle d’anatomie, devant une foule de journalistes et d’invités dont le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Marc Fesneau, il a vanté les mérites de sa région aux étudiants présents, rappelant l’existence dans le Calvados du Cirale, le pôle équin de l’École nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA). Et a taclé au passage le numerus clausus vétérinaire face à Jacques Guérin, président de l’Ordre qui soulignait que la problématique d’aujourd’hui n’était pas celle de l’attractivité des écoles vétérinaires, mais celle de la souveraineté. « Reconnaissez que c’est parce que le système est bloqué depuis des années… », a dit Hervé Morin. « C’est une question d’adaptation de la formation aux besoins de l’Etat », lui a répondu Jacques Guérin. 

La tournée s’est terminée dans le grand amphithéâtre. Devant la salle comble, les dirigeants d’UniLaSalle et les politiques se sont succédé au pupitre. Sébastien Windsor, président d’UniLaSalle qui est aussi à la tête des chambres d’agriculture de France et de la chambre d’agriculture régionale de Normandie, a rappelé la longue gestation de ce cursus. « Je salue un phénomène un peu exceptionnel… On connaît des gestations longues… celle-ci aura pris 168 mois, soit 14 ans (…) et 3 ministres de l’Agriculture. » Il a remercié tous ceux qui ont contribué à l’ouverture de l’école et a été remercié en retour par Hervé Morin pour avoir aidé à lever les freins administratifs et politiques. « Que 40 % des jeunes vétérinaires s’installant en France soient formés en Belgique, Espagne, Roumanie, c’est quand même ubuesque. (…) Quand en tant que parents, vous êtes obligés d’envoyer vos enfants à des prix d’or à l’étranger alors qu’on pourrait bâtir des formations de qualité ici (…) Nous n’aurions jamais eu cette école sans Sébastien Windsor, et son influence dans le système politico-administratif. »

Des étudiants mobilisés

Pour lui, cette nouvelle école contribuera à tarir l’expatriation des étudiants et participera à l’attractivité de la région. « Nous faisons un effort pour augmenter nos offres de formation. On va doubler le nombre d’ingénieurs formés en Normandie. » Ce qui vaut bien un fort investissement. « Pour ces prochaines années pour l’enseignement supérieur en Normandie, nous avons prévu un budget de 250 millions d’euros. UniLaSalle est probablement l’école qui nous coûte le plus cher », a-t-il souligné. Pour lui, « cette école est un bel exemple de ce qu’on veut construire avec l’enseignement supérieur. 80 à 85 % des étudiants viennent de toute la France. »

Pour Marc Fesneau, « UniLaSalle vient compléter le dispositif d’une politique globale de renforcement des effectifs vétérinaires. »

Au-delà de la valse des politiques, et des remerciements associés, cette journée aura montré la forte participation des étudiants, vétérinaires comme agronomes, reconnaissables à leur tee-shirt violet et porteurs d’un badge indiquant leur spécialité. Mobilisés pour accueillir les visiteurs et les guider dans les locaux, ils ont aussi profité de cette journée de festivités. Une preuve probablement, s’il en faut, de leur fierté d’être dans un cursus vétérinaire. Dans ce sens, deux étudiantes des cursus agronomique et vétérinaire ont aussi été invitées à faire un discours dans l’amphithéâtre. Elles ont parlé des valeurs du campus et partagé leur ressenti, positif pour les deux. Nul mot, toutefois, du coût des études. Pour l’étudiante vétérinaire, que nous avons interrogée (voir reportage vidéo), et qui a souscrit un prêt, cela ne change en rien sa vision des choses : elle reste motivée et optimiste pour la suite.

Jacques Guérin, rendez-vous pris en 2028

Le président de l’Ordre a aussi pris la parole dans l’amphithéâtre d’UniLaSalle. Et a rappelé les défis identifiés du secteur vétérinaire : « la profession est confrontée à un problème démographique et de cohérence de la répartition de ces effectifs. L’enjeu est celui de l’accès aux soins vétérinaires pour tous les animaux, en tout lieu et en toutes circonstances. Il y a aussi un enjeu de santé publique et sécurité sanitaire des aliments. » L’ouverture d’UniLaSalle est une partie de la réponse dans la mesure où cela permet d’augmenter les effectifs, aux côtés de l’évolution en cours au sein des ENV. Au final, cette hausse globale permettra de renforcer les effectifs, « mais avant d’aller plus loin, il convient d’en mesurer les effets », prévient-il. Pour UniLaSalle, « l’obtention de l’agrément est l’objectif final à viser avec une obligation de réussir (…) Vous pourrez compter sur l’Ordre pour contribuer à la bonne intégration des futurs diplômés dans tous les domaines vétérinaires (…) Rendez-vous en 2028 ».

Un campus mixte

Le campus de Rouen a vu le jour en 2008 pour accueillir une formation d’ingénieurs en agriculture de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture. C’est en 2016 qu’a eu lieu une fusion avec UniLaSalle… Il regroupe donc désormais une formation d’ingénieur en agronomie et agro-industrie, une formation vétérinaire, mais aussi des masters. Cette offre multiple, sur un même lieu, a été mise en avant comme une force par l’établissement, mais aussi par ses étudiants lors de cette inauguration.

  • *UniLaSalle a trois autres campus, à Amiens, Beauvais et Rennes.
  • Voir aussi notre reportage vidéo: bitly.ws/3eHxq