Diagnostic histologique
FORMATION MIXTE
Auteur(s) : CONFÉRENCIER DANIEL JEAN, Dipl. ACVIM (Large animal), Département de sciences cliniques de l’hôpital équin du Centre hospitalier universitaire vétérinaire (CHUV) de Montréal (Canada), professeur en médecine interne équine à l’université de Montréal. Article rédigé d’après la conférence « Les indications cliniques des biopsies digestives chez le cheval », présentée lors des journées annuelles de l’Association vétérinaire équine française (Avef), à Toulouse (Haute-Garonne), en novembre 2023.
L’amaigrissement chronique est un motif de consultation fréquent chez le cheval, qui amène à suspecter des foyers inflammatoires, une insuffisance hépatique, rénale, cardiaque, des maladies dégénératives, un syndrome de malabsorption,
Maladies inflammatoires chroniques
Pour Daniel Jean, il serait préférable d’utiliser le terme d’infiltration immunitaire digestive car, la plupart du temps, des symptômes cliniques sont observés mais pas de syndrome de malabsorption.
Ces maladies peuvent être focales ou diffuses. La présentation clinique et les modifications macroscopiques à l’autopsie sont similaires pour les différents types d’infiltration immunitaire. Ainsi, l’histologie va permettre d’établir un diagnostic précis.
Globalement, les infiltrations sont divisées en 5 catégories : les entérites lymphoplasmocytaire, éosinophilique, granulomateuse, histiocytaire et la maladie multisystémique éosinophilique épithéliotropique1 (cette dernière inclut des modifications intestinales, mais aussi cutanées, du pancréas et du foie. La cause exacte est mal connue).
Clinique
Communément, la perte de poids est le premier symptôme. En présence de diarrhée, c’est souvent que le gros intestin est affecté. La colique chronique est de plus en plus documentée. Hypoprotéinémie, hypoalbuminémie, appétit variable, dépression, léthargie, œdème périphérique, fièvre sont des symptômes moins spécifiques.
La présence de fièvre peut alerter sur une entérite éosinophilique granulomateuse, un lymphome ou une infection digestive.
Diagnostic
Une étude de 20182 portant sur 66 chevaux souffrant de coliques chroniques révèle grâce à des biopsies digestives que 55 % d’entre eux avaient une inflammation significative.
Une autre étude, portant sur un groupe de chevaux présentant une infiltration immunitaire, montre que 46 % des sujets avaient aussi des ulcères au niveau glandulaire (versus 20 % sur les chevaux sans infiltration). Même si à ce jour, on ne peut pas se prononcer sur un lien, on peut émettre l’hypothèse que l’inflammation du duodénum pourrait entraîner un dysfonctionnement dans la zone de la jonction gastro-intestinale, provoquant du reflux au niveau du pylore, et expliquant une inflammation plus ou moins intense.
Biopsies digestives
Quand réaliser les biopsies ? Daniel Jean élargit les indications cliniques, notamment aux coliques récurrentes qui justifient de réaliser des biopsies duodénale et rectale. Ces dernières sont moins invasives, moins chères, plus rapides. La question peut être soulevée : sont-elles incomplètes ? Y a-t-il un risque de sous-évaluation de l’intensité du processus inflammatoire ?
Les biopsies digestives chez le cheval peuvent être réalisées selon 4 procédures : biopsies rectales, laparotomie exploratrice, laparoscopie et biopsies duodénales endoscopiques.
Prochaines étapes
Il reste beaucoup de travail en matière de validation des paramètres histologiques, d’interprétation, de compréhension entre les résultats histologiques et la clinique, explique Daniel Jean. Il suggère d’établir une charte d’interprétation spécifique pour le cheval.
À retenir
Les biopsies digestives sont une étape clé dans l’approche diagnostique, et ce malgré le défi d’interprétation.
Il convient d’élargir les indications cliniques pour justifier d’une biopsie.
Les entérites lymphoplasmocytaires constituent vraisemblablement la modification histologique la plus fréquente.
La recommandation d’effectuer des biopsies duodénale et rectale chez tous les chevaux suspects d’une infiltration immunitaire digestive.