Ressentez-vous l’inflation au sein de votre structure de soins ? Et, si oui, comment ? - La Semaine Vétérinaire n° 2026 du 22/03/2024
La Semaine Vétérinaire n° 2026 du 22/03/2024

EXPRESSION

Auteur(s) : Propos recueillis par Chantal Béraud

La flambée des prix n’a pas la même incidence partout. Elle dépend du profil de la structure vétérinaire, de son lieu d’implantation et de sa clientèle. Mais déjà, dans certains cas, bien soigner son animal de compagnie n’est plus possible pour tout le monde.

Christelle Waysbort (L98)

Praticienne en canine à Claye-Souilly (Seine-et-Marne)

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Pour l’heure, c’est un problème ponctuel

Nous ne nous sommes pas très touchés par l’inflation. D’une part, notre clientèle ne fait majoritairement pas partie des moins aisés. D’autre part, comme nous sommes adhérents à Vétérinaires pour tous, cela nous permet de trouver des solutions pour les titulaires de minima sociaux. Même si cela entraîne, bien sûr, un abandon volontaire d’un tiers de nos honoraires… Dans d’autres situations, il nous arrive aussi d’accorder ponctuellement des remises. Plus globalement, nous faisons quand même attention à ne pas pratiquer de tarifs trop élevés, ce qui est facilité par le fait que nous n’avons pas de plateau technique trop pointu. Au contraire de certains établissements vétérinaires de référés où les factures peuvent s’avérer très élevées. Certains d’entre eux proposent d’ailleurs des solutions de crédit à leurs clients. Cependant, pour tous les praticiens, les situations les plus tendues sont celles où le bilan médical de l’animal soigné reste à leurs yeux insatisfaisant, avec des frais importants à régler.

Charly Pignon (A05)

Chef du pôle consultation et imagerie médicale au centre hospitalier universitaire vétérinaire (CHUV) animaux de compagnie d’Alfort (Val-de-Marne)

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Des coûts de fonctionnement qui flambent

Nos coûts de fonctionnement ont très fortement augmenté depuis la crise du Covid-19 ! Électricité, ménage, médicaments, l’inflation se ressent de façon majeure et nous impose d’augmenter nos tarifs, sinon nous ne pourrions plus financer notre fonctionnement. Malgré tout, je qualifierais notre gamme de prix d’intermédiaire. Elle est un peu plus élevée que celle d’une clinique généraliste, mais nous sommes un peu moins chers qu’un centre de spécialistes. Nous affichons nos principaux tarifs aux urgences et faisons une estimation préalable des coûts. C’est utile, car certains propriétaires pensent que nous pratiquons les mêmes prix qu’un dispensaire ! Nombre d’entre eux n’ont pas non plus bien conscience de ce que vont leur coûter les soins. Enfin, il y a les clients de mauvaise foi qui nous accusent de n’exercer que pour gagner de l’argent. Globalement, les propriétaires sont devenus plus exigeants – parfois plus agressifs – après Covid. Ces attitudes « négatives » sont en partie liées à l’inflation, mais en partie seulement…

Thierry Bedossa (A89)

Président d’AVA* et praticien à Paris et Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine)

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Prescrire des génériques serait une solution

Depuis environ dix ans, mais encore plus ces trois dernières années, les prix de la médecine vétérinaire s’envolent. Dès qu’il y a une chirurgie compliquée avec un temps long d’hospitalisation, dans les cas de certaines urgences ou maladies chroniques, la note peut vite dépasser plusieurs milliers d’euros ! Cette somme excède la capacité financière de bien des propriétaires. Sans compter que le prix du petfood augmente plus vite que l’inflation. En campagne, il existe parfois des arrangements informels de recours, auprès de l’abattoir ou du fermier du coin… Les refuges constatent aussi une augmentation des abandons. Car oui, surtout en milieu urbain, posséder un animal de compagnie devient un luxe. Et comme le nombre de praticiens totalement indépendants diminue, les arrangements de facturation « à l’amiable » deviennent probablement plus difficiles à obtenir. Pour rendre la situation moins tendue, il faudrait que les vétérinaires soient autorisés à prescrire des génériques, d’autant que les nouvelles molécules pharmaceutiques sont d’un prix extrêmement élevé.

  • *Agir pour la vie animale bitly.ws/3fIRL