Virologie porcine
FORMATION MIXTE
Auteur(s) : CONFÉRENCIÈRE Maud Contrant, virologiste à l’Anses Article rédigé d’après la conférence du congrès de l’Association française de médecine vétérinaire porcine (AFMVP) intitulée « PCV3 : que sait-on actuellement ? Bilan des connaissances sur le circovirus porcin 3 », 30 novembre et 1er décembre 2023, à Rennes (Ille-et-Vilaine).
Depuis son identification en 2015, le circovirus porcin de type 3 (PCV-3) s’est révélé largement répandu dans la population porcine mondiale, tout comme dans la population des sangliers. Pour ces derniers, la prévalence est estimée à 30 à 45 %, c'est-à-dire supérieure à celle des porcs d’élevage. Par ailleurs, des analyses sur des échantillons conservés de porcs ont montré que le virus était présent depuis longtemps : il a par exemple été détecté dans des échantillons datant de 1967 au Brésil, de 1993 en Suède, ou encore de 1996 en Espagne et en Chine. À la différence du PCV-21 – dont le rôle dans plusieurs maladies est bien connu (c'est le cas pour le syndrome de l’amaigrissement du porcelet2) –, le PCV-3 questionne encore quant à sa pathogénicité.
Une découverte dans un contexte de troubles de la reproduction
Le PCV-3 a été identifié pour la première fois au sein d’une population de truies, en Caroline du Nord, aux États-Unis. Dans cet élevage avait été observée une mortalité de truies de 10,2 %, avec des animaux présentant des signes de dermatite-néphrite, mais aussi des troubles chroniques de la reproduction (baisse du taux global de la reproduction, hausse du nombre de porcelets momifiés et mort-nés). Après des premières recherches de pathogènes infructueuses (dont le PCV2), le PCV-3 a été identifié par métagénomique, avec une présence confirmée dans plusieurs tissus : peau, rein, poumon, ganglions lymphatiques, lésions de dermatite-néphrite. En 2016, toujours aux États-Unis, le PCV-3 a de nouveau été décelé, cette fois-ci dans le myocarde de porcelets de 3 semaines, atteints de myocardites et inflammations multisystémique.
Un virus largement détecté dans l’organisme
Il est apparu que l’ADN de ce virus pouvait être retrouvé dans presque tous les tissus et fluides d’un animal infecté : peau, poumons, cœur, reins, rate, foie, intestin grêle, cerveau, ganglions lymphatiques, placenta. Les charges virales sont variables suivant la localisation. Les fœtus présentent la charge la plus élevée, notamment au niveau du cœur. Coté fluides, les sécrétions nasales, oculaires, salivaires, les urines et fèces, mais aussi le colostrum/lait et la semence sont concernés. Le mode de transmission principal semble être la transmission horizontale. Dans ce cadre, on sait que l’excrétion nasale et dans les fèces est présente dès 3 jours post-infection, et est intermittente. Sur le terrain, les porcs de tout âge sont touchés, avec une prévalence supérieure chez les porcs sevrés. La quantité de virus est plus élevée dans le colostrum des truies primipares, tout comme leurs fœtus sont davantage porteurs du PCV-3.
Deux maladies associées au virus
Le PCV-3 est trouvé à la fois chez des animaux malades et en bonne santé. Si la question d’une infection sous-clinique se pose, on ne peut à ce jour parler de lien de cause à effet. En effet, les études terrain qui explorent l’implication du PCV-3 dans une maladie ne le font qu’à travers une simple recherche génomique dans les tissus et sérums. De plus, la majorité des infections expérimentales n’ont pas abouti à reproduire les signes cliniques du terrain. Dans ces conditions, on parle pour l’instant de « cas associés à ». Actuellement, deux maladies sont considérées comme associées aux PCV-3. La première est une maladie caractérisée par des troubles de la reproduction : avortements tardifs, mort-nés, momifiés, porcelets faibles à la naissance et mortalité périnatale élevée. Dans ce cas, le virus est détecté chez les truies, les fœtus et les porcelets nouveau-nés. La deuxième est une maladie systémique avec de l’amaigrissement, un faible poids et des troubles neurologiques. Le virus est détecté chez les porcs en pré et post-sevrage.
Diagnostic et prévention
C’est la combinaison de la présence de signes cliniques compatibles, de lésions histologiques modérées à sévères dans les tissus, et surtout de la détection de charge virale modérée à sévère dans les lésions, qui permettra de conforter le diagnostic clinique. Un quantitative polymerase chain reaction (qPCR) est un bon test pour confirmer la présence du virus dans les tissus, mais la vraie confirmation de l’association entre le virus et la maladie implique idéalement d’en passer par des techniques d’hybridation in situ ou d’immunohistochimie. Les tissus à privilégier pour l’histologie et la recherche de génome viral sont le cœur, les poumons et les ganglions lymphatiques. À noter qu’il existe aussi un test Elisa pour la détection des anticorps. Ce test et celui du qPCR trouveront leur intérêt pour la surveillance et le suivi d’infection. Il est recommandé d’envoyer à l’analyse du tissu fœtal (dont myocardes) en cas de suspicion de PCV-3 avec troubles de la reproduction, et de la peau en cas de suspicion de PCV3 associé à une dermatite néphrite.
Côté prévention, les recommandations sont les mêmes que celles faites pour le PCV-2 : biosécurité, réduction des facteurs de risque (surpeuplement, manque de ventilation, brassage des populations), nutrition de bonne qualité. S’il n’existe pas encore de vaccin pour le PCV3, aux États-Unis, des premiers tests par autovaccination (Sequivity) contre le PCV3 sont réalisés, mais aucune donnée sur l’efficacité n'est encore disponible. Il n’y a pas de protection croisée avec la vaccination contre le PCV-2. Une réflexion vis-à-vis de la vaccination contre le syndrome dysgénésique et respiratoire porcin (SDRP) serait intéressante puisqu’une étude suggère un possible effet protecteur de la vaccination par le SDRP.