Urologie du chat au centre du congrès de l’ISFM - La Semaine Vétérinaire n° 2027 du 29/03/2024
La Semaine Vétérinaire n° 2027 du 29/03/2024

Médecine féline

ANALYSE CANINE

Auteur(s) : Par Anne-Claire Gagnon

Insuffisance rénale aiguë, dialyse péritonéale, échoscopie Pocus et urolithiases étaient au programme du dernier congrès de l’International Society of Feline Medicine (ISFM). Voici quatre points à retenir.

L’édition 2023 du congrès de l’ISFM a réuni à Dublin (République d’Irlande) 509 congressistes venant de 44 pays, confirmant sa renommée internationale. Son programme balayait toute la pathologie urinaire, avec des approches médicales, chirurgicales, urgentistes et diététiques. Il comprenait une journée pratique consacrée aux ASV et vétérinaires généralistes, des masterclass pour les spécialistes et le congrès vétérinaire félin sur trois jours. L’intégralité des interventions est disponible en ligne pour tous les adhérents à l’ISFM1.

La dialyse péritonéale à la portée des généralistes

En 2020, Serge Chalhoub2 et Soren Boysen3, enseignants à la faculté de médecine vétérinaire de Calgary (Canada), avaient présenté la nouvelle technologie d’échoscopie VPocus (veterinary point of care ultrasound). Un outil devenu, grâce à eux, accessible à tous les praticiens généralistes et utilisé au quotidien. C’est avec le même pragmatisme et la même pédagogie qu’ils sont cette fois revenus sur l’insuffisance rénale aiguë (IRA) et sur les possibilités de dialyse intracorporelle, qui ne nécessitent pas toujours de matériel sophistiqué. Selon l’urgentiste Serge Chalhoub, tout vétérinaire peut réaliser une dialyse péritonéale bien qu’elle requiert des poches de liquide de dialyse (au coût cependant élevé). La dialyse ne répare certes pas le rein lors d’IRA, mais elle lui donne du temps pour permettre l’élimination des toxines (bilirubine, autoanticorps). La dialyse ne doit pas être réalisée tant que le chat est en état de choc ou déshydraté, ni sur un individu trop petit (< 2,5kg). Parmi les urgences responsables d’IRA, certaines intoxications demandent une approche pragmatique. Dans le cas d’une intoxication par des pollens de fleurs (lys), il s’agit de décontaminer le chat par un lavage du pelage, puis de traiter le choc, de réhydrater à bon rythme sans condamner aucun chat sur la foi des résultats biochimiques. "C’est la clinique qui prime, laissez les chats vous surprendre", a martelé Soren Boysen.

Prise en charge de l’IRA

En cas d’anurie vérifiée, avant de procéder à une dialyse, l’injection de furosémide doit permettre l’élimination d’urines en 20 à 60 minutes. Il ne faut pas non plus se priver de tenter l’injection de mannitol avant d’envisager l’euthanasie. En cas de pyélonéphrite, l’analgésie est de rigueur, avec de la buprénorphine toutes les 6 heures, puis de la méthadone en relais. Si le détenteur a un budget limité, le mieux est d’apprécier à l’échoscopie la dilatation du bassinet, vérifier la présence d’un diabète et de sédiments actifs dans l’urine pour prescrire les bons antibiotiques (pénicilline à spectre élargi, fluoroquinolones).

Les deux conférenciers ont souligné le manque de données sur la présence de gastropathies ulcératives lors d’IRA, rendant inutiles la prescription, habituelle pourtant, de sucralfate ou d’oméprazole.

Les vertus de la dissolution des struvites

Jody Lulicha condensé en une seule conférence plus de 40 ans de médecine au centre des urolithes du Minnesota (États-Unis). Et pour marquer les esprits, il a fabriqué des cristaux dans un bécher d’eau qu’il a dissous en direct ! Pour lui et toute la communauté vétérinaire, donner un aliment diététique au chat atteint de struvite est une technique bien moins invasive pour le félin qu’une chirurgie, avec ses éventuelles complications. Et bien plus économique pour le client (10 fois moins chère, tout en nourrissant le chat). Il estime à juste titre que l’aliment diététique est une pratique chamicale. Il recommande de ne surtout pas forcer le chat à consommer ce nouvel aliment lors de l’hospitalisation, mais à son retour à la maison, avec une transition. Ce message a également été délivré aux ASV par Laura Jones (ASV) et Gonçalo da Graçia Pereira5, vétérinaire portugais spécialiste du comportement. Ils ont insisté sur l’accompagnement de l’animal pour son retour le plus précoce possible à la maison. Soren Boysen et Serge Chalhoub ont précisé n’avoir jamais constaté d’obstruction pendant la phase de dissolution des cristaux.

Ordre et méthode pour détecter les urolithes

L’obstruction urinaire est une urgence vitale, avec des urolithes qui touchent entre 10 et 22 % des chats atteints d’affections du bas appareil urinaire. Le triage est essentiel pour savoir sur une présentation classique (hématurie, dysurie, strangurie, pollakiurie) si l’animal est stable ou pas. Car sa manipulation pour une radiographie peut le faire décompenser, donc lui coûter la vie. Le clinicien vérifiera la présence d’une douleur abdominale ou rénale et recherchera des anomalies de la kaliémie ou une azotémie. La présence d’une cristallurie n’est pas systématique ni indicatrice de la nature même des urolithes. Un examen cytobactériologique des urines (ECBU) devra systématiquement être réalisé. La réalisation d’un Pocus peut se faire sur un chat instable, avec une mauvaise visibilité des calculs urétraux alors que les néphrolithes pourront être détectés. Si l’état du chat est stable, la radiographie de l’ensemble de l’appareil urinaire permettra de visualiser les urolithes radio-opaques, dans les reins, les uretères, la vessie ou l’urètre. Les urétérolithes sont beaucoup plus fréquents chez les chattes, chez certaines races (tonkinois, burmese, british shorthair, ragdoll, persan). Le traitement tente à chaque fois que c’est possible d’être mini-invasif, avec une cystoscopie et extraction au panier ou une urohydropropulsion, désormais possible chez les chattes.