Douleur
FORMATION MIXTE
Auteur(s) : Ségolène Minster CONFÉRENCIER GUILLAUME BELBIS (A 06), DVM, PhD, Dipl. ECBHM, praticien rural et ancien maître de conférences à l’unité de pathologie des animaux de production à l’ENVA. Article rédigé d’après la conférence « Analgésie autour de la chirurgie du cordon » organisée par Axience, le 28 mars 2024.
Les omphalites (infection avec inflammation localisée de la région ombilicale) et chirurgies de hernies ombilicales sont des événements jugés très douloureux par de nombreux vétérinaires européens, certains les jugeant à un niveau de douleur proche de celle d’une fracture, d’une crise d’arthrite ou d’un iléus. Lors d’une chirurgie de l’ombilic, la plaie chirurgicale active des nocicepteurs locaux. Ces signaux sont transformés en influx nerveux véhiculé jusqu’à la corne dorsale, puis relayé vers l’encéphale et l’étage supraspinal. Les médiateurs de l’inflammation activent les nocicepteurs sensibles aux stimuli chimiques plus durablement. La prise en charge optimale est multimodale : pendant l’intervention en limitant l’activation des nocicepteurs et la transduction des signaux, et après l’intervention en limitant l’inflammation.
Prendre en charge la douleur pendant l’intervention
Les opioïdes peuvent être utilisés : le butorphanol à 2,5 mg/100 kg peut être utilisé, seul ou en association avec la xylazine à 5 mg/100 kg (et éventuellement la kétamine à 10 mg/100 kg). Une action de 30 minutes (IM) à 45 minutes (SC) est alors obtenue.
Guillaume Belbis recommande la réalisation d’une rachianesthésie, qui consiste en l’administration intrathécale dans le liquide céphalorachidien (LCR) d’un anesthésique local. La procaïne 2 % est utilisée à la dose de 2 ml/10 kg, ou la lidocaïne 2 % (1 ml/ 10 kg – utilisation hors AMM). L’injection peut inclure une sédation à la xylazine 2 % (0,1 ml/10 kg).
Procédé de la rachianesthésie
Le geste technique est proche de celui d’une ponction lombaire. Le veau est légèrement sédaté au butorphanol, positionné en sterno-abdominal. Le vétérinaire repère les ailes de l’ilium, et la dépression correspondant à la jonction lombosacrée. La zone est tondue et désinfectée. Pour les petits animaux, une aiguille rose permet de traverser la dure-mère. Sur des animaux lourds (200-300 kg), Guillaume Belbis recommande l’utilisation d’une aiguille verte (pour intraveineuse) comme guide, dans lequel est introduit un mandrin pour cathéter long. Lorsque le LCR se met à jaillir au goutte-à-goutte, il est nécessaire d’aspirer un peu moins de LCR que le volume qui va être administré, puis d’injecter en douceur l’anesthésique. Le retrait de LCR est recommandé par analogie avec la médecine humaine où l’injection d’anesthésique dans le rachis crée une surpression, à l’origine de maux de tête prononcés.
La rachianesthésie procure une excellente insensibilisation de l’arrière de l’abdomen et de la zone de l’ombilic mais celle-ci peut être insuffisante pour la partie crâniale à l’ombilic, vers le foie, particulièrement en présence d’une omphalo-phlébite et s’il est nécessaire de marsupialiser. Une anesthésie locale traçante le long de la paroi abdominale (quelques points) complète adéquatement l’analgésie.
La rachianesthésie et l’anesthésie locale traçante agissent pendant 40 minutes et procurent confort pour l’animal et le praticien. L’animal ne bouge pas, sans être sous anesthésie générale, il peut téter rapidement après l’intervention. Il n’y a pas de risque de léser la moelle épinière, absente à cet endroit. Les complications sont rares et réversibles
Analgésie en postopératoire
La chirurgie du cordon figure parmi les premières indications d’utilisation des AINS, avec la laparotomie, d’après une enquête auprès de vétérinaires. Dans une étude* menée sur 26 veaux, l’intérêt du métamizole a été évalué. Le lot témoin a reçu une analgésie comprenant du méloxicam IV, une prémédication de xylazine et une anesthésie de kétamine et isoflurane. Le lot « métamizole » a reçu en plus du métamizole IV une heure avant l’intervention. Dans ce dernier groupe, la concentration en cortisol plasmatique – mesurée à différents intervalles en postopératoire –, était constamment inférieure. En plus de propriétés anti-inflammatoires, le métamizole agit au niveau des centres nerveux de la douleur. Selon cette étude, l’association de méloxicam et de métamizole améliorerait l’analgésie postopératoire.