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FORMATION CANINE
Auteur(s) : Mylène Panizo CONFÉRENCIER DAVID GUILLIER (A 14), diplômé de l’European College of Zoological Medicine (Small Mammals), spécialiste en médecine des nouveaux animaux de compagnie à la clinique Ric et Rac (Le Cannet, Provence-Alpes-Côte d’Azur). Article rédigé d’après la conférence intitulée « Affections du jabot », présentée au congrès de l’AFVAC, le 1er décembre 2023, à Lille.
Le jabot est une dilatation de l’œsophage localisée sous la peau, à la base du cou. Il est bien développé chez les oiseaux granivores, peu développé chez les oiseaux de proie et inexistant chez de nombreux passereaux, oiseaux insectivores et piscivores. Le jabot est principalement un organe de stockage de la nourriture, permettant un apport continu d’aliments au tractus gastro-intestinal. Cette nourriture est prédigérée grâce à la salive et aux sucs gastriques transportés par un mouvement œsophagien rétrograde (il n’y a pas de réelle production de liquide digestif ou d’enzymes par la muqueuse du jabot). Son pH est acide (4,5-6,7). Certaines espèces d’oiseaux (dont les flamants, les manchots empereurs et les pigeons) produisent du « lait de jabot » (une substance résultant du développement des cellules épithéliales tapissant le jabot) qui permet de nourrir les oisillons par régurgitation.
Lésions traumatiques
– Les brûlures sont fréquentes chez les oisillons nourris à la main. Elles sont causées par l’administration d’un produit de gavage trop chaud (souvent réchauffé au four micro-ondes ; la température n’est pas homogène à l’intérieur de la seringue de gavage). Les brûlures peuvent entraîner une nécrose de la paroi du jabot et du tissu sous-cutané, ce qui provoque l’apparition d’une fistule ou d’un trou. La nourriture coule alors à l’extérieur, sur le plumage.
Le traitement est chirurgical mais, dans la plupart des cas, il faut attendre 3 à 5 jours pour que la démarcation entre tissus sains et tissus dévitalisés devienne apparente (et cela peut prendre jusqu’à 14 jours). La chirurgie consiste alors à disséquer la peau du jabot, retirer les bords nécrotiques et suturer avec un surjet double enfouissant à l’aide d’un fil monofilament résorbable. La suture de la peau se réalise par un surjet simple ou continu avec un fil monofilament résorbable. En prévention, il est conseillé de réchauffer les produits de gavage au bain-marie en contrôlant la température.
– Les perforations du jabot sont causées par l’introduction d’une sonde de gavage métallique chez les jeunes oiseaux ; la muqueuse de leur jabot est en effet très fragile. Le traitement est chirurgical.
Infections
Le système immunitaire n’est pas pleinement fonctionnel chez les oisillons, ce qui les prédispose aux infections par des bactéries opportunistes, des champignons (Candida albicans, Macrorhabdus ornithogaster) ou des parasites (Trichomonas spp). Ces infections sont principalement causées par des mauvaises conditions d’hygiène (en particulier dans la conservation des produits de gavage et lors du nettoyage des ustensiles), une température insuffisante dans l’incubateur, ou par l’administration d’un produit de gavage trop froid (ce qui favorise les stases du jabot et les fermentations).
Lors d’une infection du jabot, les signes cliniques peuvent être variés. Parmi ceux-là, un temps de vidange augmenté, une dilatation du jabot par du liquide ou du mucus, une paroi épaissie, etc. Des signes généraux peuvent être associés.
La réalisation d’une cytologie du jabot, avec une culture bactériologique et fongique, est indispensable pour obtenir le diagnostic. Pour récupérer du contenu dans le jabot, il est possible de l’aspirer à l’aide d’une sonde, mais il faut faire très attention, car de la muqueuse peut être aspirée par pression négative. Il est donc préférable d’utiliser un coton-tige.
La cytologie d’un jabot sain révèle la présence de cellules épithéliales matures (principalement superficielles et intermédiaires), d’une flore bactérienne variée composée majoritairement de bactéries à Gram positif, de rares levures (dont Candida albicans) ainsi que des débris alimentaires. La bactérie Alysiella filiformis, un petit coccobacille à Gram négatif formant des chaînes comme un ruban, est couramment associé aux cellules épithéliales squameuses. Le résultat d’une cytologie doit donc toujours être interprété à la lumière des signes cliniques.
Le traitement est étiologique et repose sur l’administration d’antibiotiques et/ou d’antifongiques.
Stases et impactions
Les stases et les impactions sont très fréquentes chez les oisillons avant le sevrage. Les raisons peuvent être diverses :
– des causes iatrogènes : administration d’aliments froids, secs, épais, visqueux ou suralimentation.
– un iléus généralisé, qui peut être causé par une maladie systémique, un retard de croissance, la présence d’un corps étranger, une hypothermie, une déshydratation ou une intoxication aux métaux lourds.
– des anomalies primaires du jabot : atonie par étirement, ingluvite infectieuse, impaction alimentaire, brûlures.
Les signes cliniques associés à une stase ou à une impaction du jabot se manifestent par des régurgitations, une perte d’appétit, une déshydratation, et une absence de vidange supérieure à six heures. Un ingesta épaissi avec une odeur aigre est également caractéristique : on parle de « jabot aigre ». Au fur et à mesure du temps, la nourriture stagne dans le jabot, des fermentations apparaissent et des bactéries et des levures se développent.
La réalisation d’une cytologie du jabot, une mesure de son pH, des examens d’imagerie et un bilan sanguin sont recommandés. Le traitement dépend de la cause. Il est nécessaire de corriger la déshydratation et de vidanger le jabot par sondage ou par voie chirurgicale (notamment en cas d’impaction solide). L’utilisation de prokinétiques est souvent décevante. La fabrication d’un « soutien-gorge » permet de faciliter la vidange : un bandage non adhésif est placé sous le jabot et autour des ailes afin de rehausser le jabot, et ainsi jouer sur la gravité pour faciliter sa vidange.