EXPRESSION
Auteur(s) : Tanit Halfon
Face aux difficultés chroniques de recrutement mais aussi aux arrêts précoces de l’activité de certains, se pose la question de l’intégration des plus jeunes dans le milieu professionnel. Elle est d’autant plus prégnante que selon l’enquête du professeur Truchot sur l’état psychologique des vétérinaires français, les plus jeunes ne sont pas moins touchés par le burn-out, bien au contraire. Et ils se font happer aussi par le workaholisme.
Julien Herla (Liège 2008)
Praticien rural et ostéopathe toutes espèces à Guémené-Penfao (Loire-Atlantique), président du GTV des Pays de la Loire
Soyons à l’écoute
Il semble y avoir une prise de conscience de l’évolution des attentes de la nouvelle génération. Il me paraît essentiel d’y porter toute notre attention. On ne peut plus imposer nos vieux modèles de fonctionnement, dans lesquels il fallait tout donner à son métier, pouvant mener jusqu’à l’épuisement. Soyons à l’écoute et ouverts au dialogue intergénérationnel. Cela permet de s’adapter aux nouvelles attentes de manière raisonnée et concertée. C’est de l’absence de dialogue que naissent les conflits. De plus, ne limitons pas l’accompagnement de nos jeunes à la seule acquisition des compétences techniques et médicales. Il faut aussi transmettre des valeurs humaines, et leur apprendre à gérer les émotions, afin qu’ils puissent mieux appréhender le seul métier qui combine à la fois des enjeux médicaux et financiers. Permettre l’épanouissement personnel de chacun est aussi important. Nous pouvons apprendre les uns des autres.
Véronique Luddeni (T 92)
Praticienne mixte à Saint-Martin-Vésubie (Alpes-Maritimes)
Soyons des mentors
Nous avons une magnifique profession, pleine de sens, de technicité, de rapports humains, qui fait rêver mais traumatise aussi certains de nos jeunes. Pour la réenchanter, il faut se rappeler que nous avons été à leur place, il faut les écouter, prendre le temps de leur faire des retours sincères et constructifs. Rassurer aussi sur les doutes qu’ils peuvent avoir, et déconstruire le syndrome de l’imposteur. Il est normal de se poser des questions à ses débuts ! Il faut accompagner également au-delà du médical. La relation client peut effrayer les jeunes sortants qui n’ont pas forcément encore acquis les bons éléments de langage, la bonne posture, et qui doivent aussi gérer des questions tarifaires. Difficile de maîtriser tout cela en sortant de l’école, où ils avaient déjà un tel enseignement médical à apprendre et à maîtriser. De notre côté, apprenons à redonner de la place et à valoriser les points forts de nos jeunes, pas toujours experts, mais qui nous apportent un regard neuf avec de la créativité. Chaque génération apporte quelque chose à une profession, ne le tuons pas dans l’œuf.
Laurence Crenn (A 2003)
Praticienne canine à Lons-le-Saunier (Jura), présidente de Vétos-Entraide
Écoutons les jeunes
Ce qui me semble primordial est de se mettre dans une posture d’écoute, afin de bien comprendre les attentes et les besoins des plus jeunes. Et aussi de dépasser les clivages générationnels : les jeunes ne sont pas moins investis dans leur travail, le rapport du professeur Truchot l’a bien montré. On a tout à gagner à travailler en synergie. À l’espace d’écoute de Vétos-Entraide, il est fréquent d’avoir des appels de vétérinaires débutantes qui font face à des difficultés, notamment d’ordre relationnel au sein de leur structure. Ce constat donne à réfléchir quant à la façon d’améliorer l’accueil des jeunes. Cela peut passer par exemple par un aménagement du planning lors de la prise de poste. Le rapport Truchot montre bien, en effet, que le nombre de consultations journalières peut être une vraie source d’épuisement. Vétos-Entraide a collaboré avec d’autres partenaires pour élaborer un « livret d’accueil* » que nous espérons utile pour toutes les parties.