EXPRESSION / LA QUESTION EN DÉBAT
EXPRESSION
Auteur(s) : Propos recueillis par Irène Lopez
Selon une enquête Ifop*, l’image qu’a le grand public des vétérinaires est dithyrambique. En effet, 92 % des Français propriétaires d’animaux de compagnie déclarent en avoir une image positive, voire très. À cette perception s’ajoute néanmoins une méconnaissance des difficultés qu'ils rencontrent. Leur ressenti reflète-t-il ce capital sympathie ? Sont-ils d’accord avec cette vision ?
Olivier Crenn (Liège 07)
Praticien rural à Cossé-le-Vivien (Mayenne)
Je suis LE véto
Je me sens bien perçu. Être vétérinaire est une vocation, ce n’est pas un métier. Il n’y a pas de différence entre nos vies personnelle et professionnelle au sens où, bien souvent, nous sommes identifiés comme « le véto ». On ne connaît pas toujours mon nom mais on sait que je suis « le véto ». Notre capital sympathie vient du fait que nous travaillons avec les animaux. Combien de fois ai-je entendu : « Vous êtes vétérinaire ? J’aurais adoré exercer ce métier. » Avant, dans les campagnes, le vétérinaire était le notable. Cette image d’Épinal a heureusement disparu. Je ne veux pas que mes clients m’appellent « docteur ». Je préfère qu’ils me tutoient. En revanche, le grand public ne perçoit pas l’évolution de notre métier. Auparavant, les vétérinaires étaient polyvalents. Aujourd’hui, nous sommes davantage spécialisés. Il n’y a plus un vétérinaire mais des vétérinaires. J’ai coutume de dire que je suis « spécialisé dans les vaches ». Or, cela n’empêche pas les gens que je rencontre en dehors de mon travail de venir me parler du problème que rencontre leur chat.
Aurélie Cantié (A 22)
Praticienne mixte à Gien (Loiret)
Le bashing sur les réseaux est une réalité
Mon ressenti est très bon par rapport à la perception que le grand public a de ma profession. Toutes les études montrent que les gens adorent les vétérinaires. C’est une profession qui fascine. On me dit souvent : « Vous faites un très beau métier, j’aurais voulu l’exercer. » D’ailleurs, les enfants qui se rêvent vétérinaires sont nombreux. Certes, il y a des personnes qui ne sont pas contentes et le font savoir. Elles peuvent véhiculer une mauvaise image de nous. Cela a toujours existé. Mais les réseaux sociaux ont amplifié le phénomène. Le bashing que subissent certains confrères et consœurs est une réalité. Le prix des actes est un sujet récurrent. On peut, par exemple, lire sur Internet : « Le vétérinaire ne pense qu’à l’argent. » Or, c’est une vraie méconnaissance des coûts. Lorsque le client paye 100 €, le vétérinaire n’en perçoit que 15. En outre, les examens de plus en plus pointus que nous pratiquons nécessitent de lourds investissements en matériel. Les clients ne s’en rendent pas compte.
Sylvie D’arcangela (A 01)
Praticienne canine à Biarritz (Nouvelle-Aquitaine)
Nous sommes loin de la série Urgences
De façon générale, le grand public a une image sympathique du vétérinaire. J’entends souvent : « Je n’aurais pas pu exercer ce métier. Il est difficile et triste car on s’occupe d’animaux malades. Et je n’aime pas faire mal aux animaux. » Ceux qui disent cela se trompent : le vétérinaire est un soignant. Il soigne pour faire du bien. Une autre distorsion entre leur perception et la réalité est celle que véhiculent les reportages diffusés dans les médias. Ils font la part belle aux situations telles que « 24 heures dans le service des urgences d’un centre hospitalier ». Les médias présentent au grand public une image qui ne correspond pas au quotidien des vétérinaires, en France. Nous sommes bien loin de la série Urgences. Les centres hospitaliers ne sont pas majoritaires. Un collégien de 3e a plus de probabilités de faire son stage auprès d’un vétérinaire généraliste qu’aux urgences d’un centre hospitalier. Si notre quotidien n’en est pas moins palpitant, il se peut que le jeune stagiaire ne retienne de son expérience que les consultations répétitives.